La participation québécoise à la 18ème édition du festival “Caméras des Champs” n’est pas passée inaperçue : Pascal Gélinas y a remporté le Prix du Public pour son nouveau documentaire, “Un pont entre deux mondes”.
Retour sur un événement fertile en chaleureuses rencontres pour ce cinéaste québécois. Et même en retrouvailles avec l’auteur-compositeur-interprète Régis Cunin.
UNE SUITE LOGIQUE AU “PORTEUR D’EAU”
Le chanteur et le cinéaste ne s’étaient pas revus depuis 2008, lors des Déferlantes Francophones créées par Françoise et Maurice Segall à Capbreton.
Pascal Gélinas y avait en effet présenté “Le porteur d’eau” également consacré à Gilles Raymond en Indonésie.
Ce documentaire s’affirme en quelque sorte le premier épisode d’une aventure collective dont “Un pont entre deux mondes” offre une suite pleine de promesses et surtout de réalisations concrètes menées à bien avec les paysans de l’ile de Florès en Indonésie.
UN FESTIVAL DE CINÉMA DANS LE PARC NATUREL RÉGIONAL DE LORRAINE
LES CINÉASTES VENUS PRÉSENTER LEUR FILM LOGEAIENT CHEZ L’HABITANT
Quant aux cinéastes venus pour présenter leurs films, ils logeaient chez l’habitant.
“CAMÉRAS DES CHAMPS” LOIN D’UN REGARD PASSÉISTE SUR LES CAMPAGNES
Ce Festival international du film documentaire sur la ruralité est organisé par la commune et le foyer rural de Ville-sur-Yron, avec le concours du Parc naturel régional de Lorraine et de l’Université de Lorraine.
Il est soutenu par le Conseil Régional de Lorraine, le Conseil Général de Meurthe-et-Moselle, la Direction Régionale des Affaires Culturelles de Lorraine et la Communauté de Communes du Jarnisy.
Comme l’explique sur le site du festival son directeur Luc Delmas, “depuis 17 ans «Caméras des Champs» permet de montrer les mutations des mondes ruraux. Aussi, loin d’un regard passéiste sur les campagnes, l’objectif du 18ème festival reste le même que celui des précédents :
- susciter un échange sur les évolutions des paysages, sur les pratiques sociales des ruraux et néoruraux, sur l’impact des techniques, sur les villages et les habitats,
- voir comment changent aussi les représentations que chacun peut avoir du monde rural, habitants des villes, artistes, créateurs, décideurs divers et ruraux eux-mêmes”.
15 DOCUMENTAIRES EN COMPÉTITION
Et, chaque soir du festival, les projections de films présentés eux aussi hors-compétition étaient suivis de tables rondes et débats comme “L’avenir des villages en France” ou bien “Quelles solutions pour maîtriser notre avenir ?”
UN FILM QUÉBÉCOIS DANS LA CATÉGORIE “UN MONDE SOLIDAIRE”
GILLES RAYMOND DU MOUVEMENT “OPÉRATION DIGNITÉ” EN GASPÉSIE AU PROGRAMME “OTONOMI” EN INDONÉSIE
Il est vrai que son destin est assurément hors du commun !
Originaire de Donnacona au Québec, Gilles Raymond s’est impliqué pendant une vingtaine d’années dans le mouvement “Opération Dignité “qui combattait la fermeture des villages en Gaspésie et dans le Bas-Saint-Laurent.
Il a également été le président fondateur du mouvement pancanadien “Dignité Rurale”. En 2000, il arrive à titre de coopérant en Indonésie, un pays qui renoue avec la démocratie après 32 ans de dictature.
Et Pascal Gélinas de préciser : ” Constatant qu’une bonne partie des sommes versées par l’aide internationale est détournée, il décide de mettre sur pied une autre forme d’aide qu’il a baptisé «programme Otonomi ». Avec l’aide du clergé et du gouvernement local, Gilles travaille à établir une démocratie directe où les résultats dépendent de l’action responsable de la collectivité”.
UNE AUTHENTIQUE SOLIDARITÉ ENTRE HABITANTS DE FLORÈS ET QUÉBECOIS
En remportant le Prix du public et des habitants pour “Un Pont entre deux mondes”, Pascal Gélinas confirme ce que j’ai entendu et ressenti en découvrant enfin ce film sur grand écran.
Entre plusieurs réflexions relevées autour de moi durant la projection et surtout durant l’échange à bâtons rompus avec le public, une évidence s’impose : ce film retient immédiatement l’attention pour plusieurs raisons.
Gilles Raymond y est montré dans sa vraie vie quotidienne, car au-delà des fameux projets et des réalisations menées à bien avec les habitants de Florès, le documentaire raconte un destin pas comme les autres. En somme la vraie vie loin des bureaux des ONG, avec une adaptation permanente aux contraintes quotidiennes puisque Gilles Raymond n’a même pas de voiture pour se déplacer !
Mais attention, Gilles Raymond n’est pas décrit comme un super-héros.
Il est à l’origine de l’étincelle qui a mis le feu à une prise de conscience, à des actes concrets. Ici pas de baratin mais une aventure humaine collective vraiment synonyme de solidarité entre Indonésiens, et aussi entre Indonésie et Québec.
Cette solidarité a également été efficace durant la préparation et le tournage du film. Nombre de donateurs ont en effet contribué au financement de ce fameux pont entre deux deux mondes via des chèques envoyés directement au cinéaste !
Sans passer par une plate-forme de collecte de fonds retenant son pourcentage au passage, Pascal Gélinas a réussi un sacré tour de force, en bénéficiant d’un formidable élan populaire ne se réduisant pas à de belles promesses.
RÔLE DES ONG, CULTE DES ANCÊTRES ET SOLIDARITÉ ENTRE PAYSANS MUSULMANS ET CATHOLIQUES
Autre thème du film qui n’est pas passé inaperçu: la fraternelle collaboration entre paysans musulmans et catholiques de l’île indonésienne de Florès qui sortent ainsi de la pauvreté et transforment leur environnement.
“LA GENÈSE D’UNE FAMILLE PLANÉTAIRE QUE LA DISTANCE N’ATTEINT PAS”
Laissons le mot de la fin au cinéaste québécoise.
Comment définit-il son film ?
“C’est la genèse d’une famille planétaire que la distance n’atteint pas, un récit rythmé par l’âpreté du travail, le sourire des enfants et le lien avec les ancêtres. Une aventure qui ouvre à largeur d’épaules un chemin entre nos deux hémisphères, à une époque où le développement international est trop souvent remis en question”.
Bref, un film à voir, vous l’aurez compris !
Texte ALBERT WEBER
Photos NICOLE GIGUÈRE, GÉRARD LESQUOY, MONIQUE POURKAT ET ALBERT WEBER
UN FESTIVAL FERTILE EN RENCONTRES ET RETROUVAILLES