“Pas croyable !” “J’hallucine !”, Complétement dingue !”. Ainsi peut se traduire “Ich bekum a Aff”, le spectacle vivement applaudi vendredi 2 février à l’Orgestubb de Pfaffenhoffen.
Face au public le comédien-humoriste-chanteur Christophe Voltz et son compère Gaël Sieffert, lauréat du concours D’Stimme 2017 organisé par l’OLCA (Office pour la Langue et les Cultures d’Alsace et de Moselle) et France-Bleu Elsass.
D’emblée une précision s’impose : le spectacle “Ich bekum a Aff” est synonyme de renaissance.
En effet, dès les années 2004, Christophe Voltz s’était lancé dans cette aventure scénique nourrie de ses chroniques humoristiques en alsacien diffusées sur RFM Strasbourg. D’où diverses représentations : Caveau du Scala; Illiade; Festival Clair de Nuit; Café-théâtre Le Kafteur, etc.
UN TANDEM D’EFFICACES COMPLICES
Évidemment, le ton et l’esprit de la version 2018 sont toujours fidèles à ses origines … grâce aux fameux monologues plein de bon sens et d’humour.
La nouveauté, c’est qu’au fil des années, la formule s’est enrichie avec les chansons de Christophe Voltz et depuis 2010 avec la participation du chanteur Gaël Sieffert.
Les deux complices ont multiplié expériences et projets, entre l’Alsace avec l’Atelier Voix du Sud organisé par le Ville de Strasbourg et Astaffort pour la création de “La Nuit d’Encontre” : intense aventure d’une dizaine de jours de création multirégionale réunissant langues de Bretagne, de la Réunion, d’Occitanie, de Corse et … d’Alsace !
Mais ce n’est pas pour autant que le tandem Voltz-Sieffert a abandonné “Ich bekum a Aff” que j’ai eu le plaisir de découvrir en mai 2017 au Petit Théâtre d’Epfig. J’avais alors été bluffé par ces deux artistes d’une nouvelle scène alsacienne aussi talentueuse que décomplexée, en espérant que ce spectacle retienne l’attention d’espaces culturels en Alsace mais aussi ailleurs dans le monde, sous l’égide de l’Union Internationale des Alsaciens.
La détermination de Christophe Voltz (également parolier des chansons alsaciennes de Gaël Sieffert) a retenu l’attention de Jacques Schleef à l’origine du Festival Summerlied et du Club Perspectives Alsaciennes.
C’est lui qui est à l’origine de la soirée organisée à l’Orgelstubb, dans le logique prolongement d’un spectacle à domicile ayant permis à plusieurs professionnels de savourer la nouvelle version de “Ich bekum a Aff”.
ENTRE MONOLOGUES ET CHANSONS
Débuté par Gaël Sieffert seul à la guitare pour la chanson “Schall”, le spectacle se poursuivra, ce soir-là à l’Orgelstubb, sans temps mort avec un Votz des plus à l’aise pour raconter des tranches de vie, évoquer des situations aussi inattendues que réalistes.
Et c’est avec une déconcertante facilité qu’il se glisse dans la peau d’une vieille dame dans une file d’attente à la caisse du supermarché … d’un vampire pas comme les autres … d’un nostalgique de Goldorak, Candy et Cap’tain Flam … d’une famille oubliant la grand-mère sur l’aire de stationnement d’une grande surface, …. et la liste est très loin d’être exhaustive !
Avec Voltz on en sait enfin un peu plus sur le fameux Cac 40 devenu “Drack 40″ … et aussi sur ce qui vous attend en prenant l’ascenseur en ayant trop bu et que les gendarmes viennent vous contrôler …
DU CÔTÉ DE DESPROGES ET DEVOS
Attention ! “Ich bekum a Aff” n’a rien à voir avec un enchainement de “blagues alsaciennes”.
Ici on navigue dans un autre univers, dans un registre à la fois plein de bon sens et d’illogisme. En l’occurrence deux repères de “La minute nécessaire de Monsieur Cyclopède”, la célèbre émission télévisée de Pierre Desproges déclinée en 98 épisodes au début des années 80.
Assurément une référence pour Christophe Voltz qui affiche avec tout autant de spontanéité son admiration pour un autre magicien des mots : Raymond Devos. Avec une différence taille tout de même : ce spectacle est irrigué avec talent par la maîtrise, la virtuosité de la langue alsacienne par Christophe Voltz.
“Besserwisser”, “Volonté”, “Courant d’air”, “Racing”, “Agence de voyage”, “Wym em Wawe”,” “Frigo”, 14 Kinder”, “Fahne”, Cuisine”, “Strasbourg” : autant de titres de monologues qui font mouche. Qui suscitent rires et fous-rires, qui font réfléchir aussi….
DE QUOI ENVISAGER UN ALBUM …
Que dire de plus avoir situé l’historique de ce spectacle présenté vendredi 2 février dans une version de près d’une heure 45 minutes entre monologues, sketches et chansons ?
Les grandes bizarreries et petits travers de notre société évoquées par Voltz ne sont pas les seuls atouts de “Ich bekum aAff”. Les chansons interprétées seul par Gaël Sieffert (Schall; E Weij; Ussenwendi) ou avec Christophe Voltz (Mamama; Sterne) offrent une couleur tout à fait particulière au spectacle à soutenir, à faire connaître.
Une autre manière d’exprimer en alsacien des sensations et des émotions aussi. De là à espérer que les deux compères enregistrent leurs chansons, il n’y a qu’un pas que je franchis allègrement.
Texte et photos ALBERT WEBER
ICH BEKUMM A AFF : Médiathèque de Hangenbieten (7 avril) et Théâtre de la Choucrouterie, Strasbourg (16 juin).
Texte du monologue ” Besserwisser”
Horrische Geud,
Di wo net wesse
Wesse net
Dass di wo alles wesse
Net alles wesse
Awer
Di wo mahne alles richtich ze wesse
Profedere fun dähne wi net wesse
Und gähn’ne ze glaüwe
Dass sie alles wesse
Un zälli glaüwe’s dahn
Dahn die wo net wesse
Glaüwe alles
Di sehn b’stimt sicher
Dass di wo alles wesse
Alles wesse
Awer mer kahn jo net alles wesse
Die wo mahne alles richtich ze wesse
Sähn net
Dass mer net alles richtich wesse kahn
Und die wo net wesse
Die wuche dess aü ne sähn
De richtich mittelpung’t
Ech ze wesse
Dass m’r net alles wesse kahn
Und aü wesse
Dass di wo meine alles ze wesse
E glaner wesse hahn !