N’en déplaise aux pessimistes et autres oiseaux de mauvais augure. Il y a toujours du nouveau dans la chanson alsacienne …
Et en ce début d’année les bonnes nouvelles proviennent de la vallée de la Bruche avec “A wort em hàls”, album de 7 titres aux accents rock, blues et ballade signés Jaki Koehler. Assurément une grande première pour cet auteur-compositeur-interprète.
“Enfant j’ai toujours parlé l’alsacien avec ma famille” me confie celui qui est bien connu depuis plus de 30 ans dans le milieu musical en Alsace.
“Derrière ma batterie dans les années 80, j’ai joué dans plusieurs formations de jazz et de blues, et ai aussi accompagné la revue du Barabli et Roger Siffer. J’ai monté mon 1er studio d’enregistrement dans les années 90 et produit plusieurs albums dont Marcel Loeffler, Dédé Flick, Remes un Sini Band, etc. Plus tard j’ai produit 5 albums pour la chanteuse américaine Lisa Doby dans un registre soul /rock, albums sur lesquels l’on peut retrouver une dizaine de musiques que j’ai composé pour elle”.
MAQUETTES EN SOLO PUIS ENREGISTREMENT AVEC PLUSIEURS MUSICIENS
C’est durant ces années-là que Jaki Koehler apprend à utiliser d’autres instruments dont les claviers et les guitares “pour communiquer avec les musiciens avec qui je travaillais”. Mais de là à se lancer en tant qu’auteur, compositeur et interprète dans sa langue maternelle il y a un pas à franchir. Le déclic a lieu voici près de quatre ans, à l’occasion des 60 ans d’un ami.
“J’ai écrit une première chanson en alsacien à cette occasion, puis une deuxième pour un autre anniversaire … J’ai pris beaucoup de plaisir à essayer de faire sonner l’alsacien et de le phraser comme le ferait un songwriter anglo-saxon, car ça aussi c’est ma culture”.
Hé oui, tel est le point de départ de cette aventure discographique enracinée dans une bonne demi-douzaine de chansons écrites et enregistrées durant l’hiver 2019-2020.
La 1ère étape sera consacrée aux maquettes réalisées en solo.
“Puis, j’ai invité plusieurs amis musiciens : Aurel King (guitare électrique) Jérôme Spieldenner (batterie) et Bernhardt Ebster (contrebasse) à élaborer et rejouer certaines parties. J’y joue de la guitare acoustique, électrique, des batterie, percussions et la basse et quelques pistes de claviers.
Au final j’ai souvent repris les pistes enregistrées moi-même, malgré les imperfections : j’y trouvais un caractère d’urgence qui collait aux chansons. J’ai réalisé le mixage dans la foulée”.
« LE CALME DE L’HIVER EST PROPICE À L’EXPLORATION DE NOUVELLES PISTES MUSICALES »
Ces chansons dormiront plusieurs mois sur un disque dur à Poutay, près de Plaine et quelques amis proches les écouteront.
Mais il faut bien le reconnaître, Jaki Koehler n’assume pas d’emblée cette casquette de singer/liedermacher. Et pourquoi donc ?
“Autant cela m’a amusé de réaliser les chansons, je ne me voyais pas les rendre publiques, pas assez bon, trop personnel … Et quand on me demandait quand j’allais les jouer live, l’angoisse m’a fait ranger ce projet aux oubliettes “.
L’histoire ne s’arrête pas là et pour cause puisque ces 7 chansons sont désormais disponibles.
“J’aime passer du temps au studio avec mes instruments, et le calme de l’hiver est pour moi propice à l’exploration de nouvelle pistes musicales. Puis je me suis dit : à quoi bon ? refaire des chansons ? pour les ranger au placard ? Du coup j’ai décidé de libérer ces quelques titres enregistrés il y 2 ans, tels quels sans retouches, ni mastering… Au moins ces 7 chansons-là ne vont pas hanter pas les prochaines journées d’hiver ! “.
Ces chansons ont retenu l’attention d’Antoine Jacob, animateur de “Lieder un Gedìchtle, e Elsassichi Sendung, fer eich un mìt eich” : une émission consacrée à la chanson et la poésie en alsacien et aussi en platt et en badois.
Soit près d’une heure entièrement en alsacien avec interview Jaki Koehler et programmation de plusieurs extraits de l’album “A Wort Em Hàls”.
A écouter dimanche 23 janvier de 10 h à 11 h sur Fréquence Verte et à retrouver ICI en podcast.
« J’AIME TROUVER LES MOTS EN ALSACIEN QUI COLLENT A LA MUSICALITÉ »
“Geh Us De Luft”, “Unterem Debbi”, “Am Kleine Weyer”, “Du Besch”, “Di Plakate Sen A Schand”, “Mer Redde Nem Davon”, “Angelo” : l’écoute attentive de ces titres réserve bien des surprises pour qui aime la langue alsacienne, la richesse de ses expressions, la subtilité des doubles sens.
Dans « Geh Us De Luft », Jaki Koehler se met dans la peau d’un personnage fictif (ou peut-être pas !) en évoquant cette personne que nous connaissons tous dans notre entourage. Vous savez bien, celui qui vous énerve chaque fois que vous le voyez ou l’entendez.
“Unterem Debbi” parle des faux semblants que l’on entretient et qui peuvent engendrer des ragots. D’où l’importance de faire le tri, histoire d’y voir plus clair et de ne surtout pas oublier de s’amuser !
« Am kleine Weyer », c’est une ballade sur le temps tranquille, envie et besoin d’une pause. D’une escale dans la nature, dans l’attente sous les sapins rouge, et le souhait de laisser les animaux boire tranquille à l’étang. Une chanson qui me fait penser à “La maison près de la fontaine” de l’inoubliable Nino Ferrer. Sans doute ma préférée … disons à égalité avec “Di Plakate Sen A Schand”.
Autre titre : “Du besch”, « Je me suis inspiré de “The Golden State”, un titre de de John Doe. J’ai organisé quelques concerts de John il y a une dizaine d’année et cette chanson m’est restée … Je l’ai adaptée en Alsacien sur un tempo bien plus lent, et d’autres accords ». Une chanson à savourer à divers registres : elle peut évoquer l’amour, l’amitié, la filiation, les complicités entre deux êtres, des liens invisibles aux autres.
Une autre chanson est dédiée à son père. Son titre rappelle évidemment le titre de la fameuse pièce de théâtre de Germain Muller “Enfin… redde m’r nimm devun !”». Peut-être le texte le plus personnel…
“Di Plakate Sen A Schand”, assurément le titre le plus percutant fait allusion à de mauvais souvenirs. “Il y a quelques années les murs de Schirmeck étaient recouverts des affiches de campagne de Marine LePen et consorts … D’où cette chanson où je parle d’un certain discours extrémiste, et d’affiches qui m’emmerdent et polluent le paysage… D’autant plus que les affiches de notre Festival Poutay Jazz & Blues étaient recouvertes toutes les nuits !”.
Quant à “Angelo”, c’est la seule chanson dans laquelle intervient Lisa Doby, dans les chœurs. Un intense hommage à un “frère de musique” disparu trop tôt, en 2018 : Angelo Mannarelli : un guitariste/chanteur de blues, avec qui Jaki Koehler jouait dans le groupe Blue Lagoon dans les années 80.
“J’aime trouver les mots en alsacien qui s’assemblent en musicalité” souligne Jaki Koehler, aux chansons enracinées dans des sources d’inspiration variées.
Pas de doute, c’est avec brio que le créateur de la web radioWe Bruche franchit une nouvelle étape, en s’affirmant avec fierté comme auteur-compositeur-interprète dans sa langue maternelle. A suivre, en attendant des concerts….
Albert Weber
“A Wort Em Hàls” est disponible par la poste (15 € + frais de port) et à La Cavine à Poutay.
Et à partir du 4 février en téléchargement et en streaming sur toutes les plateformes.
Retour en images sur le dimanche 19 septembre. Ce jour-là, la Maison Rurale de l’Outre-Forêt à Kutzenhausen a célébré la langue et la culture alsacienne avec éclat.
Voici l’album photos de cet événement marqué par plusieurs temps forts à commencer par une passionnante visite guidée assurée par Willy Weisslocker. Superbe occasion pour comprendre, entre anecedotes et explications, la vie quotidienne dans ce lieu si chargé d’Histoire : un ancien corps de ferme du 18ème siècle rénové et transformé en musée.
Cette journée a aussi été marquée par le Prix Charles Goldstein décerné par l’association Heimet Sproch un Tradition présidée par Remy Morgenthaler, membre de la société des écrivains d’Alsace, auteur, poète et metteur en scène de pièce de théâtre en alsacien.
Ce prix a été remis à l’auteur-compositeur-interprète Serge Rieger pour son “engagement pour l’Elsässerditsch en particulier auprès des enfants des écoles”.
Voir aussi sur ma chaine Youtube l’intervention de Remy Morgenthaler s’adressant aux élus présents (et à ceux qui verront cette vidéo !) pour que langue et culture alsaciennes soient enfin mieux mises en valeur : c’est-à-dire concrètement et bien au-delà des paroles nostalgiques et rassurantes enracinées dans la “préservation du patrimoine”.
Ces propos plein de bon sens et sans langue de bois, il les également tenu au micro d’Antoine Jacob dans son émission sur la chanson en alsacien et en platt : il en a été l’invité durant près d’une heure sur Fréquence Verte, ce même dimanche.
Dans la foulée de Rémy Morgenthaler, d’autres personnes ont pris la parole : Jean-Laurent Vonau, père fondateur de la Maison rurale; la vice-présidente de Sauer-Pechelbronn Lysiane Dudt; la conseillère départementale Natahlie Marajo-Guthmuller et le député Frédéric Reiss.
Dans le public se trouvait a Dominique Lô connu pour nombre d’activités musicales, entre autres comme membre du groupe de rock alsacien Schnapps fondé par Nicolas Fischer.
Et c’est dans son studio que se prépare le nouvel album de Serge Rieger. Et aussi le 1er EP de Stéphane Jost. Peut-être même son 1er CD !On verra bien selon l’intérêt sus cité auprès des organismes et autres institutions qui devraient être sensibles à la langue et la culture alsacienne. Et donc à la chanson alsacienne …
La 4ème édition du concours D’Stìmme débutera le 12 novembre 2019. Les chanteurs amateurs seront invités à participer au concours à travers une campagne de communication commune menée par France Bleu Elsass, l’OLCA, France 3 Grand Est, SR3 Saarlandwelle et SWR.
Pour participer, chaque candidat devra envoyer sa maquette à France Bleu Elsass avant le 20 janvier et la finale aura lieu le 6 juin 2020 à la Cité de la Musique et de la Danse à Strasbourg.
On en saura plus lors de la conférence de presse prévue mardi 12 novembre à 11h30 au Club de la Presse de Strasbourg.
Elle sera animée par à l’invitation de Justin Vogel, président de l’Office pour la Langue et les Cultures d’Alsace et de Moselle, en présence de Matskat et Charlotte Vix, gagnante de l’édition 2019.
Mais nous n’en sommes pas encore là.
Avant d’en savoir plus sur les modalités de l’édition 2020, il me semble important de faire le point sur l’édition 2019 remportée par Charlotte Vix vendredi 31 mai 2019 aux Tanzmatten à Sélestat.
A 28 ans, la chanteuse de Kurtzenhouse a ainsi succédé à Gaël Sieffert et SergeRieger, lauréats en 2017 et 2018.
Rappelons que le 3ème concours de chanson en alsacien et platt a été lancé en 2018 par l’OLCA et France-Bleu Elsass. Cet événement a été médiatisé dans la presse régionale écrite et audiovisuelle.
Bien, et puis ? Car il faut bien se poser quelques questions de fond.
Quel reflet cet événement donne-t-il de la créativité de la chanson en Alsace ?
Et quel est vraiment son impact sur la promotion de la langue alsacienne ?
Deux interrogations parmi d’autres, sachant que deux des trois chansons arrivées en finale sont des adaptations alsaciennes de tubes internationaux.
S’y ajoute une 3ème interrogation : est-il plus facile d’écrire un texte en alsacien sur un tube plutôt que de composer paroles et musique d’une chanson originale ?
Autant de questions que je me suis posé après la finale 2019 présentée par Bénédicte Keck (OLCA) et Clément Dorffer (France Bleu Elsass).
STEVIE WONDER, SOPRANO, LIONEL RITCHIE ET ANTONIA AUS TIROL EN VERSION ALSACIENNE
Charlotte Vix y a remporté le 1er prix avec une reprise de « Isn’t she lovely » de Stevie Wonder adaptée en alsacien sous le titre « ‘s Lëwe isch scheener mit Lieb ».
Seconde place à Julien Hachemi pour « Min Herzschritt Maker », chanson inédite dont il a composé la musique sur un texte de Bénédicte Keck. Et 3ème place pour Christine Wambst qui a adapté la chanson « Cosmo » de Soprano devenue « Min Ziel ».
A cette finale chacun de ces artistes a également interprété une seconde chanson en alsacien : « All nigth long » de Lionel Ritchie est devenu « D’gànz Nacht làng » avec Charlotte Vix.
Julien Hachemi a offert une nouvelle version de «’s Elsass unser Landel » sur des paroles de Christian Hahn et des arrangements des Bredelers. Et Christine Wambst a chanté « E Owe mit eich », adaptation alsacienne de « Auf die Banke » d’Antonia aus Tirol.
Certes, des artistes tels Robert-Franck Jacobi ou Armand Geber – deux noms parmi d’autres – se sont fait connaître avec des versions alsaciennes de tubes français ou anglo-saxons. Et FrançoisBrumbt a chanté en alsacien Brassens, Moustaki, Léo Ferré ou Woody Guthrie.
Mais ils ne se sont pas contentés d’exploiter encore et encore ce « filon des adaptations » qui fait chaque année le bonheur des spectateurs des tournées d’été de la Choucrouterie. Ce fut encore le cas cet été 2019 marqué par une 33ème édition où Roger Siffer et ses amis offraient des versions alsaciennes de nombreux succès français ou anglo-saxons
Et le 31 mai, invité à chanter une chanson en qualité de lauréat 2018, Serge Rieger a offert « Baggersee », adaptation des « Champs-Elysées » de Jo Dassin. Mais rappelons que sa victoire à D’Stimme 2018 s’enracine dans « Nit um’s verrecke », titre dont il l’auteur, le compositeur et l’interprète.
UNE LANGUE SI RICHE CÉLÉBRÉE PAR TANT DE CHANSONS
La création n’aura pas été l’atout majeur de cette finale 2019. Plutôt inquiétant pour une langue alsacienne censée être célébrée via ce concours. D’autant plus que chaque année, nombre des 10 finalistes ne maitrisent pas la langue alsacienne et s’expriment donc en français dans les entretiens réalisés par France Bleu Elsass.
Cette abondance d’adaptations alsaciennes n’est pas une grande première pour D’Stimme !
En 2017, la finale remportée par Gaël Sieffert a été marquée par des chansons alsaciennes sur des airs de de Claude Nougaro, Léonard Cohen, Claude François, Creedence Clearwater Revival, etc interprétés par trois de quatre finalistes : Lucie et Valentin Zaepffel (2ème) ; Tatiana Henius (3ème) et Maxime Kuhm (4ème).
Étonnant non ? Frustrant aussi …
Car l’alsacien est une langue si riche !
Et assurément teintée de force nuances dans les chansons enregistrées par Jean Dentinger, Germain Muller, Dinah Faust, Liselotte Hamm, Jean-Marie Hummel, Daniel Muringer, Sylvie Reff, Roger Siffer, Bernard Biechel, Pierre Specker, Jean-Marie Friedrich, Bernard Guntz, François Brumbt, Dany Dollinger, Cathy Bernecker, Roland Engel, René Eglès, Jean-Pierre Albrecht, Alain Martz, Robert-Franck Jacobi, Armand Geber, Jean-Pierre Schlagg,
et ÉVIDEMMENT tant d’autres encore …
DU CÔTÉ D’ISABELLE GRUSSENMEYER ET STÉPHANE JOST
Bon me direz-vous cette énumération concerne des artistes disparus ou ayant dépassé la soixantaine !
Oui vous avez raison et j’y ajoute donc Isabelle Grussenmeyer, une des (très) rares voix de la nouvelle génération maitrisant vraiment l’alsacien.
Cette chanteuse pour petits et grands a fait ses premiers pas à 12 ans sur scène et en studio avec René Eglès. Et au fil des albums et des scènes, elle s’est affranchie de son talentueux mentor grâce à un répertoire inédit pour publics de tous âges, “de la crèche à l’EPHAD” selon son expression.
A suivre aussi de près Stéphane Jost, remarqué pour “Henner chez les Yennisch”, son spectacle solo mis en scène par Jean-Pierre Schlagg sur un texte de Roger Siffer. Bien connu dans le nord de l’Alsace, notamment dans la région de Lembach (théâtre alsacien, revue satirique, etc), c’est aussi un artiste inspiré qui aurait toute sa place au sein d’une nouvelle chanson en alsacien, langue qu’il maîtrise parfaitement …
Et ce ne sont pas les chansons inédites qui manquent.
Mais à quoi bon comment se lancer dans l’enregistrement d’un album à l’heure où les CD se vendent de moins en mois ?
Reste la perspective d’un financement participatif : encore faut-il parvenir à boucler son budget alors que cette formule suscite de plus en plus de courriels d’artistes et groupes en quête d’argent !
NICOLAS FISCHER : “CE N’EST PAS DE LA MUSIQUE ALSACIENNE”
Et pourquoi pas la dématérialisation des chansons ? Une solution dans l’air du temps …
En témoigne le triple album récemment enregistré en alsacien et allemand (Krock”) et français (“Crock”) par NicolasFischer. “Il est est diffusé sous forme de PDF avec tous les liens vers les chansons mises à disposition gratuitement suite au financement du Rectorat de Strasbourg. Pas de diffusion physique prévue dans l’immédiat” précise l’auteur-compositeur-interprète, avant d’évoquer la mise en ligne de clips sur sa chaine Youtube et les chansons disponibles via www.nicolasfischer.bandcamp.com
Son précédent album, “E nejes Lied” sorti en 2016 est toujours disponible en version physique et via son site http://nicolasfischer.net/e-nejes-lied.
“Un album sans bretzels, sans cigognes ni colombages… Ce n’est pas de la musique alsacienne” mentionne la pochette de cet enregistrement : des chansons originales créées avec l’auteur et poète Yves Rudio, connu pour ses textes mis en valeur sur un recueil de chants de Jean-Marie Friedrich et les fameuses “Alsa’Comptines” enregistrées par Isabelle Grussenmeyer, Jean-PierreAlbrecht, Daniel Muringer et Gérard Dalton.
Les 19 titres de “E nejes Lied” mixés par Jean-François Untrau confirment tout simplement que la chanson alsacienne a encore de beaux jours devant elle … du moment que l’innovation est préférée à la “version alsacienne” de tubes internationaux. Cet album résulte d’un efficace travail d’équipe auquel ont participé Matskat au violon pour la chanson “E altes Lied” et Dinah Faust dans “D’Letschde 2015 ” qui offre une nouvelle jeunesse au célèbre texte de Germain Muller.
“Cet album été réalisé grâce au soutien de l’association Liederbrunne, des Editions SALDE, de la Fondation Joseph David, du Rotary Club de Wissembourg, de l’Eurodistrict Pamina, de la commune de Sebach et de France Bleu” ajoute Nicolas Fischer à l’aise aussi bien devant le micro qu’en coulisses (direction artistique, arrangements, identité visuelle du CD, prise de son avec Denis Bildstein, etc)
Assurément le genre de chanson que tout(e) candidat(e) de S’timme 2020 devrait écouter avant de se lancer dans l’écriture d’un texte alsacien à plaquer sur un titre à succès …
Nul doute que Nicolas Fischer aurait toute sa place lors du spectacle de la finale du 6 juin 2020 à la Cité de la Musique de Strasbourg : une évidente légitimité à l’instar de celle de Christophe Voltz vivement applaudi le 26 octobre à la soirée des Holpl’Awards pour ses trois titres. Soit deux chansons en alsacien (dont une qui n’avait pas franchi le cap des trois finalistes de D’Stimme !) et une superbe reprise du “Corridor” de Germain Muller.
EN PARTENARIAT AVEC SR3 SAARLANDWELLE ET SWR EN 2020
Isabelle Grussenmeyer a été membre du jury aux Tanzmatten.
Elle qui manie avec brio sa langue maternelle s’est retrouvée à délibérer sur les trois finalistes avec plusieurs autres personnes, dont une autre passionnée de chanson en langue régionale : Suzanne Wachs du Saarländischer Rundfunk (Radio de Sarre). Laquelle avoue sa perplexité quant à la diffusion de ces adaptations alsaciennes : comment en assurer la médiatisation ?
La question vous semble bizarre ?
Non puisque les enregistrements de ces candidats retenus seront diffusés sur les ondes de France Bleu Elsass et France Bleu Alsace, SR3 Saarlandwelle et SWR durant toute la durée du vote (du 20 mars au 20 avril 2020).
L’édition 2020 sera-t-elle marquée par une « compétition » entre voix d’Alsace- Moselle et d’Allemage ? Espérons que l’imagination sera au rendez-vous avec des chansons inédites et non pas/plus des paroles alsaciennes posées sur des tubes.
D’où l’intérêt de la démarche de Julien Hachemi, ayant grandi comme Abd al Malik dans le quartier du Neuhof sans y parler l’alsacien.
Aux finales de D’Stimme 2018 et 2019, il s’est retrouvé chaque fois en 2ème place avec des textes de Christophe Voltz puis Bénédicte Keck. Et il a pris des cours d’alsacien lui permettant petit à petit de se familiariser avec la langue de sa grand-mère. Laquelle a inspiré Christophe Voltz à écrire paroles et musiques de la chanson « Mamama ».
Hélas, ce titre ne figure pas sur « Elsässich Poet », titre du EP de 4 titres en français plus « Mitnander Lewe », chanson interprétée par Hachemi en finale de D’Stimme 2018. Les puristes diront sans doute que le titre de cet album devrait plutôt être « Elsässicher Poet » mais tel est le choix de l’artiste.
MATSKAT CHANTE ALBERT MATTHIS
La finale de D’Stimme 2019 aura mis en relief trois autres talents d’Alsace aux parcours musicaux très différents : Matskat, Serge Rieger, et Robin Léon.
Le chanteur-violoniste Mathias Hecklen-Obernesser alias Matskat participe depuis longtemps à la vie artistique de sa région et pas seulement en alsacien !
Il est vrai que son expérience de coach pour les 30 finalistes de D’Stimme depuis 2017 l’a confronté à des chansons alsaciennes extrêmement différentes.
Comme indiqué dans le dossier de presse de l’édition 2020, “Matskat offre aux candidats sélectionnés, un coaching vocal personnalisé et travaille avec eux les arrangements musicaux. Il accompagne également, avec ses musiciens professionnels, les participants lors des enregistrements en studio et de la soirée concert”.
Et c’est avec bonheur que la finale du 31 mai a résonné aux entraînants accents de « Wilde Stimme » : une création de Matskat présentée au Festival Summerlied 2014 suite à un appel à la création lancé par Jacques Schleef, alors directeur du festival.
Ce soir-là – en plus de cette chanson il signe le texte et avec Jean-François Untrau la musique – Matskat a interprété deux autres titres enracinés dans l’histoire d’Alsace : un hommage au peintre et illustrateur Léo Schnug (« Crazy Léo ») avec texte de Christian Hahn et musique du tube « Crazy » de Seal. Il a aussi célébré la cathédrale de Strasbourg avec « Hitt grattle mir uff d’Schnecke nuff » : un texte d’Albert Matthis extrait de « Bissali ».
Ces deux titres sont extraits du formidable spectacle « L’Ill aux trésors/D’Wunderinsel » présenté en mars 2019 avec René Eglès et Cathy Bernecker dans le cadre de « E Friehjohr fer unseri Sproch / Un printemps pour notre langue » à la Cité de la Musique, Strasbourg. Une représentation hélas unique …
SERGE RIEGER ENTRE CHANSON ALSACIENNE ET BLUEGRASS
Cet auteur-compositeur-interprète de Surbourg aime se présenter, à juste titre, comme Lìedermàcher.
Il bénéficie d’une belle expérience dans la chanson alsacienne. En témoigne entre autres son portrait par Antoine Wicker (Nouvel Alsacien, 10 décembre 1981) qui annonce sa participation à la soirée « Ecolofolk » de Bischwiller organisée par le REM. Il s’agissait du Rassemblement écologique de Moder l’ayant invité avec Sylvie Reff et Roland Engel pour un concert retransmis par Radio Dreyeckland. En l’occurrence la station qui était alors la digne héritière de Radio Verte Fessenheim et pas encore le réseau commercial désormais connu sous ce nom.
Chez Serge Rieger, la maitrise de l’alsacien tranche radicalement avec la majorité des participants des trois éditions de D’Stimme. Une maitrise partagée avec le comédien-humoriste-chanteur Christophe Voltz, un des 10 finalistes de D’Stimme 2018 et 2019 qui ne s’est hélas jamais retrouvé parmi les 3 lauréats.
Chaque année, Serge Rieger organise le rassemblement de bluegrass à la Maison Rurale de l’Outre-Foret à Kutzenhausen : une passion musicale partagée par Aurélie Diemer alias Cadillac Lilou, finaliste de D’Stimme 2018 avec Julien Hachemi.
Connu pour ses interventions dans les écoles d’Alsace du Nord et divers festivals Summerlied, il est membre du cercle alsaco-badois d’écrivains et chanteurs.
En tant que finaliste en 2018, Serge Rieger a gagné une étoile en cristal de Baccarat, l’enregistrement d’un clip destiné aux réseaux sociaux, et un ticket pour Summerlied.
Il y a chanté le 19 août 2018 sur la grande scène avec l’orchestre des Rhinwagges, et à l’Espace Poésie Patrick Peter avec les chanteuses française Élise Fraih et allemande Cindy Blum.
ROBIN LÉON, VEDETTE DE SCHLAGERMUSIK
Aisance scénique et professionnalisme sont évidents chez Robin Léon, inconnu dans la chanson alsacienne et vedette de « Schlagermusik ».
En août 2016, en direct d’Europa-Park, il remporte à 19 ans le concours «Immer wieder Sonntags» (“Encore et toujours dimanche”) de la chaîne allemande ARD : une émission consacrée à la chanson populaire entre Schlager et Volksmusik.
Depuis plusieurs années, le chanteur de « Mein Sommertraum” (« Mon rêve d’été ») attire la foule dans les soirées aussi dansantes que chantantes d’Alsace, dont les Fêtes de la Bière de Schiltigheim.
Robin Léon est un artiste aussi décontracté que performant sur scène dont la présence dans le jury pour la sélection des 10 finalistes) et sur la scène de la finale 2019 a surpris les amateurs de chansons en alsacien et en platt.
Pourquoi avoir programmé un chanteur de Schlager et non un talent reconnu dans la chanson alsacienne ? La question m’a été posée plus d’une fois avant et après la finale 2019.
Bonne question … N’empêche que lors de la finale D’Stimme 2019 Robin Léon a repris en duo avec Matskat l’inusable “Hans im Schnokeloch » dans une convaincante version arrangée par le groupe manouche DiMauro Swing.
Cette version aux accents jazzy manouche, Matskat la reprendra d’ailleurs en guise de rappel à la salle comble du Cercle de Bischheim, vendredi 18 octobre 2019 au terme de 2h30 de concert assuré avec Francky Reinhardt, Grégory Ott, Matthieu Zirn, Jean-François Untrau, Christian Clua, Guillaume Nuss et Franck Wolf.
ENTRE ADAPTATIONS ET TITRES INÉDITS
« Il est dangereux de donner des espoirs à de jeunes artistes, et ensuite de les laisser se débrouiller » commente un artiste alsacien reconnu qui estime que « D’Stimme est un alibi pour les organisateurs ».
Sans aller jusque-là, notons que D’Stimme incite chaque année une bonne trentaine d’artistes d’Alsace à envoyer une chanson avec l’espoir d’être sélectionné parmi les 10 finalistes.
Ayant été à deux reprises membre du jury pour la sélection des 10 finalistes, j’y ai découvert une indéniable diversité des chansons écoutées intégralement. De quoi se réjouir de l’intérêt suscité par ce concours, en regrettant cependant l’absence de titres en platt mosellan.
Au vu de la finale de la 1ère édition, j’avais interpellé sur mon site www.planetefrancophone.fr les organisateurs : pourquoi ne pas envisager une catégorie création et une autre de reprise/ adaptation ?
Suggestion non retenue … vu que France Bleu Elsass ne reçoit pas suffisamment de chansons alsaciennes inédites pour envisager deux catégories bien distinctes.
J’en déduis que soit D’Stimme ne donne pas suffisamment envie de créer en alsacien ou en platt … soit l’Alsace ne compte plus suffisamment d’auteurs et compositeurs capables de créer en alsacien.
« Pour qu’une langue soit parlée, il faut qu’elle soit utile. Et pour qu’elle soit utile, il faut qu’elle soit pratiquée tous les jours. Ça sert à quoi qu’un jeune chante en alsacien si personne ne le diffuse ? » : durant ses 3 ans en Alsace, Hervé de Haro a souvent insisté sur la langue régionale.
Et en juin 2019, c’est d’ailleurs pour D’Stimme en partenariat avec l’OLCA qu’il a reçu un prix décerné par la Fondation Aquatique Show … dont la directrice Isabelle Formhals présidera le jury de D’Stimme 2020.
L’organisation de la 4ème édition sera assurée à France Bleu Elsass, par celui ou celle qui succédera à Hervé de Haro. Lequel a préféré quitter Radio France plutôt que de devoir appliquer la nouvelle stratégie nationale et régionale décidée à Paris.
Donc nul ne sait si le/la futur(e) responsable sera aussi sensible à la langue alsacienne que celui qui a lancé D’Stimme avec le soutien d’Isabelle Schoepfer Dietrich, directrice de l’OLCA. On en saura sans doute plus lors de la conférence de presse du 12 novembre située dans un nouveau contexte avec l’arrivée de nouveaux partenaires et l’internationalisation du concours
L’avenir de D’Stimme aura été une des priorités de celui qui est désormais directeur délégué du groupe Radio Caraïbes International.
Évoquant sa démission le 31 mai aux Tanzmatten, il a lancé un appel en faveur de la langue et de l’avenir de France Bleu Elsass en s’adressant directement à Brigitte Klinkert et FrédéricBierry, présidents des conseils départementaux du Haut-Rhin et du Bas-Rhin présents dans la salle.
CONCERTS INTER-GÉNÉRATIONELS
L’envie des finalistes de D’Stimme de chanter en alsacien suscite en certaines circonstances des rencontres très symboliques.
Deux exemples parmi d’autres …
A commencer par Gaël Sieffert et Julien Hachemi entourant Jean-Pierre Schlagg face à la foule de la place Kleber pour chanter « E stickel Barabli » durant la tournée 2018 des Voix de la Liberté. Enregistré sur le CD des 20 ans de chansons, ce titre rend hommage à Germain Muller au Barabli sur la musique de “Quelque chose de Tennessee” de Michel Berger composé pour Johnny Hallyday.
A souligner aussi la 1ère partie assurée par Charlotte Vix, Julien Hachemi et Gaël Sieffert au Festival Clair de Nuit à Andlau début août avant les concerts de Selia et Dick Annegarn !
Les trois finalistes de D’Stimme y ont chanté en alsacien mais aussi en français, anglais et italien : ce concert vivement applaudi par la foule a bénéficié de l’accompagnement de Di Mauro Swing et de l’accordéoniste Jeannot Vix, père de la chanteuse.
EFFICACE TREMPLIN POUR CHARLOTTE VIX
« Je chante depuis toujours. Je suis en train de faite valider mes titres auprès de la SACEM et d’écrire pour un EP de 6 titres, dont deux en alsacien » confie Charlotte Vix, à l’approche de sa trentaine.
Au compteur 10 ans de conservatoire en chant, sous la houlette de Catherine Fender (technique vocale) et Catherine Bolzinger (chœur d’enfants du conservatoire) … une longue expérience avec Familly Project, groupe créé avec son père (mariage, fêtes de comités d‘entreprises, Nouvel An, Saint Valentin, restaurants, soirées privées, etc).
Employée au sein d’un foyer d’hébergement pour personne en situation de handicap, elle affirme « vivre un rêve éveillé » grâce à son 1er prix de D’Stimme 2019. Ce qui a suscité divers nouveaux contacts chez celle qui est heureuse de jouer depuis peu sur scène avec Di Mauro Swing : un groupe où joue aussi Matskat selon sa disponibilité.
Charlotte Vix participe également à « un magnifique projet : la création de « Être Ange », une troupe de comédie musicale composée de personnes en situation de handicap ».
A quand des textes d’auteurs alsaciens repris par Julien Hachemi et Gaël Sieffert ?
CHANTER WECKMANN, KATZ, VIGÉE ET LES AUTRES
Comment donner à D’Stimme un nouveau souffle ?
Car il y aurait tant à faire en faveur d’un concours enraciné dans une vraie chanson alsacienne synonyme de créativité et non pas/plus de reprise….
A commencer par mettre au centre de D’Stimme un vrai travail : écrire une chanson, maitriser la langue, développer le sens de la musique, de la ligne mélodique, des accents toniques …
Et puis créer des spectacles, des récitals construits et bien mis en scène à l’instar de « L’Ill aux trésors/D’Wunderinsel ».
Et aussi inciter Summerlied 2020 à jouer la carte d’une création régionale encore plus enracinée dans la … ou plutôt dans les langues parlées en Alsace !
Autre piste de réflexion : proposer aux candidats de mettre en musique des textes d’André Weckmann, Nathan Katz, Gaston Jung. Des noms pris au hasard ? Pas du tout, c’est la démarche de la chanteuse Isaka qui a célébré ces auteurs début août au Festival Music’In Music’Août.
A vrai dire, rien de nouveau sous le soleil !
François Brumbt chante Marie Hart, André Weckmann, Conrad Winter, Henri Mertz, etc. Nombre de chansons alsaciennes mettent en valeur des textes de Conrad Winter (Jean-Philippe Winter et le groupe D’Sonnebluem ; Isabelle Grussenmeyer), Albert et AdolpheMatthis (Liselotte Hamm et Jean-Marie Hummel), André Weckmann (René Eglès), Henri Mertz (Roland Engel, Isabelle Grussenmeyer) … et la liste est évidemment très loin d‘être exhaustive !
La littérature d’Alsace compte tant de textes à mettre en musique chez les classiques d’hier ou les auteurs actuels tels Jean-Christophe Meyer, Albert Strickler, Jean-Paul Klee, etc.
Le 11 septembre 2019, grâce aux Bibliothèques Idéales créées par la Librairie Kleber, Claude Vigée, Hans Arp et Tomi Ungerer étaient au coeur de la soirée « Du génie alsacien /Vum elsässische Geischt » … à l’initiative de l’association “A livre ouvert…wie ein offenes Buch” qui a porté à bout de bras ce concert-lecture aux Bibliothèques idéales à l’instar des trois années précédentes !
Entre musique, lecture et conférence, La Cité de la Musique de Strasbourg a accueilli Matskat, Bénédicte Keck, Aline Martin, Charles Fichter, Jean Lorrain, Fabrice Kieffer, Mathieu Zirn, Romain Pivard, Jean-François Untrau, la chorale Collège Baldung-Grien de Hoerdt et le Neuhof Orchestra, etc.
Les auteurs – en alsacien et en français – ne manquent pas ! Et chaque “Dichterwaj” d’Alsace est une sacrée mine pour qui cherche des textes.
On ne peut qu’encourager les artistes de la génération D’Stimme à s’aventurer sur ces sentiers des poètes qui mettent en valeur tant d’auteurs dont nombre de chanteurs et chanteuses.
DES ARTISTES EN QUÊTE DE SALLES
Certes, D’Stimme suscite des contacts et échanges entre talents de générations différentes. Mais l’avenir de la chanson alsacienne ne se limite évidemment pas aux lauréats de D’Stimme.
Le concours a fait sortir de l’anonymat plusieurs voix et elle peut donc servir de carte de visite : un constat à relativiser car D’Stimme n’a pas valeur de sésame auprès des salles de concerts d’Alsace.
Pas facile pour Gaël Sieffert, 39 ans, à trouver des dates de concerts comme lauréat de la 1ère édition de D’Stimme. Ce concours lui a permis d’enregistrer un EP de six titres en alsacien sous l’étiquette « Vostok Project » avec la parolier Christophe Voltz, son complice dans « Ich bekum a Aff », spectacle de monologues et chansons synonymes de réjouissante maitrise de l’alsacien.
Ce CD a été mis en valeur grâce au concert de la salle du Cercle de Bischheim le 26 avril 2019, soit près de deux ans après la finale. Bien, mais à part cette soirée synonyme de dédicaces pour Gaël Sieffert et Christophe Voltz, quoi de plus ?
Hélas, trois fois hélas … Aucun autre concert n’a médiatisé cet album résultant du concours lancé par France Bleu Elsass et l’OLCA. C’est dire l’impact relatif de D’Stimme sur les programmateurs en Alsace, à de rares exceptions telles la Foire Européenne de Strasbourg ou bien le Festival Clair de Lune grâce à la chanteuse-programmatrice Christel Kern.
On peut aussi citer Olivia Lams qui programme chaque année un talent d’Alsace au Cercle le de Bischheim, et évidemment Roland Engel qui organise chaque mois un concert à Hoerdt. Depuis nombre d’années, tant d’artistes d’Alsace ont été invités à chanter à l’Espace Heyler, dont Julien Hachemi en octobre 2019.
La conférence de presse du mardi 12 novembre permettra d’en savoir plus sur l’édition 2020 de ce concours ayant “pour ambition de faire découvrir au public les nouveaux talents de la chanson en alsacien et en platt” selon l’expression de l’invitation à cet événement.
Depuis samedi 17 juin 2017, le groupe scolaire (maternelle et primaire) de ce village alsacien porte le nom de René Egles, un des auteurs-compositeurs-interprètes majeurs de la chanson alsacienne et un de ses obstinés pionniers.
Retour sur une cérémonie aux multiples facettes entre discours officiels, chansons reprises par des écoliers d’hier et d’aujourd’hui, expo photos d’antan, déjeuner préparé par l’US Gumbrechtshoffen et par les parents d’élèves, animation par l’Harmonie Municipale.
UNE LONGUE HISTOIRE AVEC LES ÉCOLIERS DE GUMBRECHTSHOFFEN
C’est la première fois en Alsace qu’une école ou un groupe scolaire porte le nom d’un chanteur alsacien vivant.
Une initiative qui rappelle l’inauguration en octobre 2004 de l’école André Weckmann de Roeschwoog, alors organisée en présence du poète et romancier alsacien ainsi que de René Eglès.
D’où l’importance du symbole mis en évidence à Gumbrechtshoffen par nombre d’interventions parlées (élus, ancien et actuel directeur d’école) et chantées avec l’active participation des actuels écoliers de ce groupe scolaire mais aussi d’une chorale d’anciens élèves reformés pour la circonstance.
Hé ou, si cette école porte aujourd’hui le nom d’Egles, c’est qu’une longue histoire unit le village alsacien et le chanteur.
A partir de la fin des années 70, cet ancien instituteur a passé une bonne partie de sa vie à circuler dans toute l’Alsace, guitare à la main, pour valoriser sa langue et sa culture natales.
En résulte une bonne cinquantaine de comptines enregistrées sur 33 tours avec la complicité d’écoliers de Niederbronn, Hochfelden et Gumbrechtshoffen : une période également marquée par nombre de concerts et émissions télévisées avec les enfants.
“ICH BIN A KLEINER MUSKANT” : TOUTE UNE ÉPOQUE !
L’exposition de photos présentées samedi 17 juin a ravivé bien des souvenirs chez les anciens écoliers.
Ils sont venus en grand nombre à l’inauguration de l’école, et leurs téléphones portables ont été bien utiles pour photographier des clichés pris voici plus de 30 ans avec le chanteur.
Même émouvant plongeon dans le passé lors de la projection d’extraits de “Ich bin ein kleiner Musikant”, l’émission télé réalisée avec les écoliers …
S’y sont ajoutées plusieurs minutes d’une vidéo réalisée voici quelques semaines avec des écoliers d’aujourd’hui : un clin d’œil plein d’humour et de rythme présenté à René Eglès en présence de Yann Schaller, actuel directeur de l’école.
Il est vrai que René Eglès est revenu à plusieurs reprises à Gumbrechtshoffen ces derniers mois pour préparer la fête organisée samedi 17 juin. D’où notamment ce panneau de photos de la “préparation du baptême de l’école”.
« Aujourd’hui, notre école est aussi ton école, depuis 1985 nous entretenons une relation forte, j’espère que tu continueras à venir de temps en temps nous rendre visite ».
Relatés par Jeannot Jeannot Schamber, correspondant des Dernières Nouvelles d’Alsace (23 juin 2017) ces propos du maire Fernand Feig en disent long sur les liens tissés entre le village et cet artiste chanté par des générations d’Alsaciens de tous âges.
Car il ne faudrait surtout pas réduire René Egles à son parcours de “chanteur pour enfants”.
Il est bel et bien un des artistes majeurs d’Alsace célébré comme il se doit ce fameux samedi par les écoliers et anciens écoliers … qui, dans l’après-midi, lui ont rendu hommage entre sketchs, chansons et lectures de textes.
“PAVANE POUR UNE LANGUE DÉFUNTE” : TOUJOURS D’ACTUALITÉ
Une des chansons les plus expressives de René Egles, celle qui évoque sans doute le mieux son engagement et ses inquiétudes en faveur de sa langue natale, c’est “Pavane pour une langue défunte”.
A découvrir ICI sur le site de l’INA … durant les 5 premières minutes à visionner gratuitement de cette émission diffusée le 3 décembre 1982. Ses paroles dénoncent en français la disparition de l’alsacien, mais aussi du breton et de l’occitan.
Oui, nombre de chansons d’Egles célèbrent l’urgence de la préservation de l’alsacien. Et cette préoccupation, il l’exprime avec une intense richesse de vocabulaire aux accents souvent poétiques, avec le souci du mot précis, de l’expression qui fera mouche.
D’où, par exemple, l’hymne composé pour l’événement “Friehjohr fer unseri Sproch” (Printemps pour notre langue”) renouvelé chaque année via nombre d’événements artistiques et cultures en Alsace.
“DES FRÉMISSEMENTS QU’ON SURVEILLE POUR LES VALORISER”
Drôle de question ? Lors de l’assemblée générale de l’OLCA (Office pour la langue et la culture d’Alsace) elle a été posée par … René Eglès !
“Je ne connais personne qui écoute cette radio sur internet” a-t-il tout simplement déclaré quand l’assistance a été invitée à s’exprimer.
Le déménagement de France Bleu Elsass des ondes moyennes vers internet et son réel impact auprès du grand public font toujours débat. Du moins chez ceux qui sont sensibles à la promotion de la chanson alsacienne.
Le “pavé dans la mare” jeté avec bon sens et sans hésitation par René Egles a évidemment suscité une réponse immédiate du directeur Hervé de Haro, le directeur de France Bleu Amsace et France Bleu Elsass présent à l’assemblée générale de l’OLCA.
Selon Christine Zimmer (Dernières Nouvelles d’Alsace, 24 juin 2017), il “estime qu’il est en train de se passer quelque chose (sans crier victoire), qu’il y a là des étapes nouvelles à franchir et qu’il y a là des frémissements qu’on surveille pour les valoriser”.
Réponse convaincante ?
Il en ressort tout au moins par déduction qu’il n’y pas/plus de place pour une “radio alsacienne” sur les ondes moyennes et encore moins sur la bande FM en Alsace. Certes, les multiples rediffusions sonores avec ou sans vidéo sont assurément bien en valeur sur le site de France Bleu Elsass.
Mais peuvent-elles efficacement “remplacer” une station de radio comme il en existe tant sur la bande FM ? J’en doute fort …
En tout cas bravo à Rneé Egles d’avoir “mis les pieds dans le plat” durant l’assemblée générale de l’OLCA.
Et saluons à juste titre la décision de la mairie de Gumbrechtshoffen d’honorer ainsi un chanteur alsacien DE SON VIVANT.
ASSURÉMENT UN SYMBOLE FORT plus efficace, à long terme, que le bouquet de rassurantes déclarations officielles prononcées en ce jour de fête devant le “groupe scolaire René Egles”.
Et ce symbole évoqué avec enthousiasme par le maire Fernand Feig s’inscrit dans la suite logique des initiatives de Pierre Deyon, Recteur de l’Académie de Strasbourg (1981-91). C’est lui qui avait donné à René Egles l’indispensable feu vert pour intervenir en parles et en musique en milieu scolaire.
Un appréciable soutien qui aura largement fait connaître cet auteur-compositeur-interprète alsacien, un des efficaces pionniers d’une chanson alsacienne … qui n’a ASSURÉMENT pas dit son dernier mot.