TIBERT : “TRANCHE DÉSIR” A SAVOURER … ENCORE ET ENCORE

Pas de doute, la vie va parfois trop vite, et le tourbillon du quotidien nous incite à décaler telle “bonne résolution” pourtant prise avec enthousiasme. C’est ce que je me dis en rédigeant ce texte consacré au 6ème album de Tibert sorti au dernier trimestre 2020. Hé oui, à force de retarder plus d’une fois le moment de vous en parler, le temps a filé plus intensément que prévu.

Bon je vous rassure, il n’est évidemment jamais trop tard pour parler de l’album de Tibert qui mérite d’être connu et surtout reconnu auprès d’un public en quête d’une chanson sans maquillage ni baratin ni effets spéciaux.

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AVEC LA COMPLICITÉ DE DENIS FAVRICHON

En 2014, son précédent album, Sortir a retenu l’attention de l’excellent “Trad Magazine hélas disparu trois ans plus tard. Cet album sera synonyme de nombreuses tournées françaises et canadiennes.

Et six ans plus yard, voici Tranche désir : 41 minutes et 42 secondes aux accents folk et rock mixés à Saint Etienne par Tony Bakk chez Studio Mag, mastérisé par Alexis Bardinet chez Globe Audio (Noir Désir, Benabar, etc.) : « une production est léchée et délaisse les réalisations hyper compressées pour garder ampleur et dynamique. En ces temps de claustrophobie, de visages masqués et d’humeurs autocentrées, écouter cet album est une belle évasion, aérienne et vivante, comme une longue course le long de la mer ».

Au menu 11 titres signés par l’artiste originaire de Saint-Étienne  : paroles et musique, guitares, mandoline, banjo, programmation, tin whistle (une variété de flûte)  et basse sur “Le mur” et “Vois” …  et , bien sûr, l’incontournable complicité avec Denis Favrichon (basse, contrebasse, cellobasse) présenté comme un « compagnon de voyage et de galère, de répétitions sans fin et de retrouvailles sans qui cet album n’aurait pas la même saveur ». 

Trois autres musiciens sont au rendez-vous :  Corinne Lamure (violon alto), Michel Turco (programmation batterie, percussions) et Véronique Guinet (flûte pour “Sur ce caillou). C’est vous dire combien la diversité des instruments à cordes utilisés pour cet album ô combien soigné, entre autres via des arrangements à vous donner … oui …des frissons.

Pas étonnant, connaissant le sensibilité, la prédilection de Tibert en faveur des orchestrations de cordes tant en studio que sur scène.

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PASSERELLES MUSICALES ET FRATERNELLES AVEC L’ACADIE

A cette liste de musiciens français s’ajoutent plusieurs complices d’Amérique francophone : Sylvain Doucet (pedal steel);  Justin Doucet (violon) ainsi que deux artistes que j’ai si souvent apprécié en concert des deux côté de l’Atlantique et que j’estime autant pour leur talent que leur personnalité : Danny Boudreau (choeurs), également une des figures marquantes de la chanson acadienne (parfois surnommé “le Cabrel acadien” dont il assura la première partie au Capitol de Moncton) et Jesse Mea (piano, accordéon).

Bref une sacrée brochette de talents français et francophones réunis au-delà des distances pour cet album  bénéficiant du soutien d’Inouïe Distribution. 

Surtout ne vous étonnez pas de cette passerelle internationale. Ce n’est pas la première fois que l’Acadie est présente sur des enregistrements de Tibert, tant pour des paroles que des musiques. Il faut vous dire que le parcours de cet auteur-compositeur-interprète s’enracine depuis longtemps entre France et Acadie.

« Une histoire d’amitié et de musique, de défense de notre culture commune aussi, souligne l’artiste. Depuis je me suis fait piquer par les maringouins de Beresford, j’ai bu des Moosehead dans les soirées de la FrancoFête, j’ai dégringolé les rapides de la Restigouche et j’ai dévoré pétoncles et homards à Shediac … J’aime l’Acadie, il m’arrive même de la chanter des deux côtés de la grande mare et j’y reviens chaque fois comme on revient visiter ses proches, avec un attachement et un bonheur sincère. » confiait-il voici une dizaine d’années à un journal acadien.

Hé oui, c’est au début des années 2000 que débute l’histoire de Tibert avec l’Acadie et j’en parle ici en connaissance de cause – et avec d’autant plus d’enthousiasme – que j’ai été témoin de ses premiers pas dans le vaste espace francophone canadien. Plus d’une fois j’ai eu la chance de vivre des événements musicaux avec lui en Acadie, notamment dans le cadre de inoubliable FrancoFête : Tibert est sans doute un des artistes français qui connait le mieux cet événement international annuel réunissant chaque année en novembre nombre de professionnels essentiellement d’Amérique. du Nord, d’Europe : diffuseurs, artistes, professionnels du secteur  .. d’où nombre de vitrines musicales qui permettent rencontres amicales et relations d’affaires durables.

Autant de souvenirs enracinés d’initiatives bien connues de Tibert qui a pris part comme artiste évidemment … et également comme créateur et directeur du Festival Les Oreiles en Pointe  Fidèle au rendez-vous annuel de la FrancoFête durant une dizaine d’années, j’y ai vécu quelques-uns des moments les plus intenses d’un “journalisme musical” entre concerts, débats, tables rondes et autres soirées musicales et fraternelles.

Sans oublier les fameuses retrouvailles de la délégation internationale (France, Suisse, Belgique, etc.) près de Moncton, localité francophone mitoyenne de Moncton. C’était dans la grande maison de l’ami Denis LaPlante, alors directeur de la SNA, la Société nationale de l’Acadie : des instants de bonheur, de fraternité, de chansons, de fous-rires aussi… Et si je vous en parle ici, ce n’est pas pour vous raconter ma vie mais pour insister sur l’importance de l’Acadie dans le répertoire et la vie de Tibert.

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“UNE CHANSON D’ACCUEIL ET D’AMITIÉ POUR CEUX QUI LAISSENT LA PORTE OUVERTE”

Pas étonnant que “Tu es chez toi” – première chanson du CD – soit dédiée à Denis La Plante dont les problèmes de santé ont été médiatisés – évidemment avec le consentement de sa famille – dans les médias acadiens et entre autres dans un émouvant reportage télévisé sur Radio Canada. 

Ce matin, il a reçu le nouveau CD de Tibert Rocher et laissez-moi vous dire, il n’a pas oublié ses meilleurs amis !” confie Sophie Mylène, la fille de Denis, le 15 octobre 2020 sur Facebook en précisant :

” Les derniers jours, j’ai réalisé beaucoup de choses au sujet de la maladie d’Alzheimer Précoce. Aussi difficile que c’est à partager, j’ai eu un sentiment d’impuissance même de honte en compagnie de mon père en public. Il est de plus en plus difficile pour lui d’être ” dans notre monde”. Je réalise maintenant, qu’il faut simplement s’adapter à sa réalité. Pis que dans l’fond, sa réalité, sa vision du monde je devrais dire, est probablement la chose la plus précieuse. Il aime la vie!”

Donc je vous dirai, en toute subjectivité, que cet album fait partie de ceux qui m’ont le plus touché de tout ce que j’ai écouté et entendu depuis pas mal de mois.
 
Car avec ses mots entre poésie et bon sens, Tibert va droit au but.  Et le clip “Tu es chez toi” mis en ligne voici quelques jours témoigne de l’amitié de Tibert pour Denis La Plante, et cette relation incitant le chanteur à préciser : “Une chanson d’accueil et d’amitié pour tous ceux qui laissent leur porte ouverte. Tourné dans les ateliers de l’entreprise Bonnavion Industrie à Firminy par Frédéric Giroudon. Personne, jamais, n’est illégal”.
 
Vous comprendrez donc que je ne peux pas être “objectif” en présentant cet album, d’autant plus que la fameuse objectivité si souvent invoquée s’enracine en fait dans l’expérience, la culture, les centres d’intérêt de celles et ceux qui donnent leur avis sur un album, un film, une pièce de théâtre, etc. Ce qui me m’empêche pas de vous dire : n’hésitez pas à vous procurer cet opus, c’est parce que le talent de Tibert s’y affirme avec une rare intensité.
 
Tibert, c’est “d’abord une voix, on aime le timbre et la chaleur de celle de Tibert que ce soit dans de bouleversantes balades folks (Sur ce caillou, Mon cœur vacarme) ou des titres enlevés et puissants (Le manège, Mais la mer”. 
 
Bien dit, mais au-delà de cet extrait d’un texte destiné à la presse, une évidence s’impose : ce globe-trotteur aussi inspiré qu’infatigable est sans conteste un drôle d’oiseau migrateur, dont les voyages et les escales en terre étrangère nourrissent son inspiration et lui ont permis de forger un répertoire aux couleurs, ambiances  accents tellement diversifiés.
 
Ne tentez surtout pas d’enfermer dans une catégorie bien précise cet artiste de Saint-Etienne , établi au Grau-du-Roi et plus que jamais en quête d’horizons lointains, de rencontres artistiques et (aussi/surtout) humaines débarrassées des aprioris et des non-dits. 
 
Prenez donc le temps de découvrir le clip de la chanson TEL LE MANÈGE et vous comprendrez un peu mieux l’univers de ce créateur aux textes subtils et aux mélodies qui vous donnent envie de taper dans les mains, de fredonner, de reprendre en chœur … d’être heureux quoi !

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TALENTUEUSE SENSUALITÉ

Et s’il vous reste encore un zeste ‘(ou plus) de curiosité, offrez vous donc le bonheur de flâner sur la chaine Youtube de Tibert.
 
Embarquement immédiat pour un étonnant et détonnant tour d’horizon d’un artiste non formaté, non sclérosé dans un plan de carrière, insensible aux modes et à la futilité musicale !
 
Alors franchement, comment voulez vous qu’il retienne l’attention des “grands médias”  et du petit écran ?
 
Et j’adhère totalement et vous partage sans hésitation l’expression “le son Tibert” employé par Michel Kempert sur son site Nos enchanteurs, le quotidien de la chanson, au sujet de “Tibert, l’élégant faiseur de chansons”, juste avant de préciser : “La mer, le vent, le voyage, la brume pacifique, la nature, l’amour, l’amitié, la fraternité, la pitié, le pardon, les batailles perdues, celles restant à mener, Tibert est parolier habille, élégant faiseur de chansons, qui ne pétrit ses textes que d’ingrédients simples « à la douce saveur des mondes que l’on rêve et la force de ceux que l’on habite ». Ça donne des chansons que ne peuvent que s’inscrire dans la durée, sans obsolescence possible. Si les mélodies bercées tantôt de celte, tantôt de bayous ou d’ailleurs, savent capter votre écoute, alors vous pouvez facilement entrer dans sa poésie, vous y lover”.
 
Alors franchement, avec autant de qualités, d’atouts, et de respect du public comment voulez vous que Tibert “passe à la télé” à une heure de grande écoute ?
Vous rêvez !
 
Alors un conseil d’ami : agissez et passez pas et plus à côté de cet auteur-compositeur-interprète.
Notamment pour son  sens de la mélodie, du mot qui fait mouche et sin aisance à jouer avec les mots et les images  comme dans  “Tranche désir”, titre éponyme de cet album assurément teinté d’une talentueuse sensualité.
 
“Tandis qu’on s’invente des mots
Tes cheveux tanguent sur ton dos
Mes jambes flanchent on roule ensemble
 
Je tiens ta taille entre mes mains
Couché dans l’ombre assassin
C’est beau et chaud, tu as un cri”
 
TEXTE ALBERT WEBER
PHOTOS EXTRAITES DU CLIP “TU ES CHEZ TOI”