PASCAL MARY : TENDRESSE, CHARME ET HUMOUR

Coup de projecteur de Henry Tilly sur Pascal Mary : assurément un chanteur qui gagne à être MIEUX connu du grand public.

Retour sur son concert de fin avril offert en piano-voix à L’Arthé Café.

Marc Usclade presente Pascal Mary
Marc Usclade présente Pascal Mary

 

 Chers extraterrestres de Planète francophone,

Je crois vous avoir déjà dit, en substance tout au moins, que j’avais, à l’instar de quelques dizaines “d’aficionados”, quelque chose comme « mon rond de serviette » à l’Arthé Café, ce merveilleux petit café-concert-auberge perché dans les Combrailles, à Sauterre à une poignée de kilomètres de Riom et Clermont-Ferrand.

L’augmentation vertigineuse du prix des carburants peut donner l’impression que cette adorable oasis de la belle chanson s’éloigne peu à peu de Montluçon où je réside mais il est des affiches auxquelles on résiste difficilement s’il se trouve que l’on est justement disponible ce jour-là.

Ainsi, en cette fin avril, y suis-je arrivé au galop, me pourléchant les oreilles à l’idée d’y retrouver Pascal Mary découvert à Prémilhat en 2011 et jamais revu depuis, même si j’ai pu utiliser ses chansons dans “La chanson dans tous es états”, l’émission hebdomadaire que j’anime depuis trois  ans sur RMB. Podcast à découvrir ICI 

Accueilli et présenté par Maï et Marc, nos hôtes dont on ne dira jamais assez l’âpreté du combat pour maintenir en vie cette oasis, Pascal Mary surgit en scène avec une sveltesse, une légèreté qui fait penser aux Elfes chères à Charles Trénet.

Le calme avant ou apres l'orage
Le calme avant ou après l’orage

 

TOUT REPOSE SUR L’EXPRESSIVITÉ DE L’ARTISTE

Manifestement, il sera seul avec son piano et le décor semble des plus sobres, pour ne pas dire austère : le fond de scène est tendu d’un rideau noir, le piano est disposé au milieu, face au public, dissimulé par un écran noir lui aussi qui en cache les pieds.

Tout repose donc sur l’expressivité de l’artiste, sa capacité à capter le public et lui offrir un voyage émotionnel ininterrompu avec les seules armes dont il dispose : son corps, plus souvent réduit à un buste, son visage et les expressions qu’il peut transmettre, sa gestuelle et bien sûr ses textes et la façon dont il les fait porter par ses mélodies mais aussi sa manière de faire parler son instrument… Enfin, sa voix.

Sa voix ! Je le savais pourtant pour l’avoir vu et entendu sur scène, comme je vous l’ai dit, en 2011 et pour avoir, entre-temps, écouté ses albums, sa voix, qui n’est pas celle d’un “chuchoteur”, loin s’en faut, est faite d’une matière limpide et délicate qui lui donne un timbre mélodieux et précis mais en même temps capable de fermeté autant que de subtilité et dans une tessiture confortable, qualités qui sont, pour une grand part, le résultat d’une parfaite maîtrise de la respiration, au service également d’une diction parfaite.

Le tout, on le sait, peut s’appeler “l’Art Vocal” dont la maîtrise ne s’improvise pas, ce que l’on devrait enseigner à nombre de perruches et autres éructeurs qui polluent régulièrement nos ondes et certains sites Internet, adoubés par des producteurs et des “experts” autoproclamés, auxquels les chèques encaissés font oublier que leurs “volailles industrielles” sont à la Musique et à la Chanson ce que peut être Mac-do à la gastronomie.

Tradition Arthé Café la soupe avant la 3ème mi-temps H
La savoureuse tradition de l’Arthe- Café : la soupe avant la 3ème mi-temps !

 IL MAÎTRISE A LA PERFECTION L’ART VOCAL

Pascal Mary maîtrise donc à la perfection l’Art Vocal, au point qu’on se surprend à penser qu’au-delà de la technique, il a peut-être des gènes de Jacques Douai. Mais sa maîtrise de l’accompagnement au piano  n’a rien à envier à sa maîtrise vocale et semble, associée à une expression corporelle sobre mais éloquente, propulser vers nous des textes qui nous pénètrent instantanément et nous font totalement oublier le dénuement de la scène.

Cet artiste hors du commun m’avait, certes, marqué en 2011, à sa découverte mais le souvenir de l’homme de scène était quelque peu dilué dans la richesse du plateau proposé à ce Festival d’Automne de Prémilhat.

Ici tout me revient en bloc et je vois bien que, le mûrissement aidant, l’homme de scène a perfectionné ce qui lui permettait de faire vivre intensément ses très belles chansons avec un minimum de moyens techniques, illustrant ainsi parfaitement le titre de son album de 2010 : “Vivons d’un rien”.

Certains artistes, même très talentueux, peuvent, au long d’un concert ou d’un album, s’avérer quelque peu lassants par le manque de diversité de leurs thèmes et surtout de leurs musiques. A moins d’être d’une grande mauvaise foi, c’est un reproche qu’on ne pourra pas adresser à Pascal Mary.

Il nous emmène dans un voyage rempli d’imprévus, compensant, dans une même chanson, une mélancolie appuyée par une pirouette ironique. Le spectacle est ainsi et nous explorons les replis d’une personnalité multiple, complexe mais d’une richesse rare, à travers des chansons qui sont autant de tableaux dont il est difficile de doser la part autobiographique tout en imaginant qu’elle est importante.

Tendre poésie, mélancolie que l’on sent authentique, révolte tout aussi sincère, spleen baudelairien dont on sait qu’il n’est pas feint ou de circonstance, sensualité imprégnée de tendresse ou plus tumultueuse, tous ces sentiments exprimés avec une force généralement contenue, même quand les mots sont caustiques ou trahissent un trouble profond, sont atténués par une dominante de tendresse, de charme, d’humour, d’autodérision aussi.

Au sommet de Joyeux Noel
Au sommet de” Joyeux Noël” !

 

DES LARMES AU SOURIRE, VOIRE AU RIRE FRANC

Car l’un de ses talents est, à l’évidence, de savoir se moquer de lui-même, ce qui lui permet de toujours éviter le pathos, alors que la charge émotionnelle qui émane de lui nous fait passer des larmes au sourire, voire au rire franc puis replonger dans une sourde inquiétude, dans ce que l’on sent être un malaise ou disons plutôt, en empruntant la formule à Catherine Laugier (Nos enchanteurs) : “Sa douce blessure de vivre”.

Et que dire des genres musicaux empruntés pour porter ces textes si éloquents. On passe de la douce ballade à une chanson plus “folk”, puis une bossa ou une mélodie carrément “jazz”.

Et nous, spectateurs devenus captifs, sommes emportés par cet “homme piano”  dont la voix, les mots, les notes et les mimiques ne font plus qu’un, indissociable, indispensable puisqu’en chantant sa vie il infiltre la nôtre et éveille en nous des sentiments et des émotions tellement humaines que nous y trouvons, même confusément, des analogies avec ce que nous avons pu vivre ou ressentir.

Un des plus beaux exemples, pour faire simple, est sans doute cette chanson satirique, à la fois drôle et caustique où beaucoup d’entre nous reconnaîtront ici et là, en caricature, des bribes de leurs propres tableaux de famille :” Joyeux Noël” (extrait de l’album « Vivons d’un rien » 2010).

“Joyeux Noël” à savourer ICI

Finalement, on a beaucoup (relativement) écrit sur Pascal Mary, sur ses différents albums, sur ses prestations scéniques et ce bel artiste a fait l’unanimité, me semble-t-il, pour louer ses qualités humaines en même temps que ses talents d’auteur, de compositeur, d’interprète.

Il sait s’entourer d’amis fidèles et de grands talents, ce qui se remarque aisément au “casting” de ses albums et aux musiciens qui l’entourent dans des concerts moins intimistes. Quel serait l’intérêt que je répète comme un perroquet ce qui a déjà été dit.

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Retrouvailles avec Mai, Pascal Mary et Henry Tilly

 

SOUS LE CHARME DE SA RICHESSE POÉTIQUE

Bien sûr, je pourrais ajouter que je suis encore sous le charme de sa richesse poétique, de ses métaphores judicieuses autant qu’inattendues et que les amis que j’avais emmenés à sa découverte ont encaissé un gros coup à l’estomac mais aussi, comme disait Brassens, “du côté du poumon”.

Alors, que dire d’autre ? Si !

Commandez vite ses albums, écoutez-les avec les livrets et quand vous serez convaincus qu’il vous en manque une dimension, trouvez sur son site un lieu de concert à votre portée et je doute fort que vous ne succombiez pas à votre tour.

Comme disait Tristan Bernard : “Le meilleur moyen d’échapper à la tentation, c’est d’y succomber”.

TEXTE HENRY TILLY

PHOTOS FRANÇOISE ET HENRY TILLY

SITE DE PASCAL MARY

SITE DE L’ARTHE-CAFÉ

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YVES VESSIÈRE : UN HOMME QUI CHANTE ET QUI GAGNE A ÊTRE CONNU

 Ça fait du bien de parler d’un artiste si peu mis en valeur dans les “grands médias”. Je conserve d’Yves Vessière le souvenir d’un intense concert au Festival Bernard Dimey, voici quelques années.

Henry Tilly, sensible aux talents aussi authentiques qu’ignorés du grand public, a été emballé par la soirée animée par Yves Vessière le 9 février 2018 à la “Fabrique Poïen”. Comme il n’est jamais trop tard pour évoquer un auteur-compositeur-interprète de cette qualité, voici son texte illustré par des photos prises par son épouse Françoise et par lui.

UN REFUGE POTENTIEL IDÉAL POUR “LA CHANSON DE PROXIMITÉ”

Je connais Yves Vessière depuis plusieurs années et ai eu la chance, habitant la même ville d’Auvergne, de suivre son parcours et ses albums. Et, bien entendu, ce qui est le plus intéressant chez ce genre d’artiste, l’évolution de ses textes et de ses mélodies et arrangements.

Si quelqu’un connaît bien la vie en usine, c’est lui puisqu’il y a travaillé toute sa vie, ne s’autorisant la musique et la chanson que comme des “violons d’Ingres”, alors même qu’il les pratique passionnément depuis 1975. Peut-être avait-il compris très tôt le côté hasardeux d’une vie artistique à plein temps ?

Peut-être cet esprit à la fois hardi et sage n’a-t-il pas cru en son propre talent au point de ne s’y risquer qu’en amateur, “fourbissant” patiemment sa guitare et ses chansons sans négliger, par goût et par admiration, de chanter Brassens et quelques autres Grands pour lesquels il s’est pris quelques ampoules aux doigts et quelques crampes au poignet, sur son instrument.

Ce soir, 9 Février, je fais une double découverte : le lieu du concert et la nouvelle forme d’accompagnement choisie par Yves.

Nous sommes à La Fabrique Poïein” dont je ne connaissais que le nom mais qui m’apparaît comme un refuge potentiel idéal pour la “chanson de proximité”, appellation chère à Michel Trihoreau.

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NOUVELLE FORMULE AVEC UN PIANISTE

Il s’agit d’une ancienne grange, bien restaurée,  bien proportionnée, adossée à une maison d’habitation. Le plafond est haut mais pleinement rassurant quand on voit l’échantillonnage des poutres qui le composent et qui, bien que neuves, sont assemblées à tenons et mortaises et chevillées bois. La poutre centrale, elle, n’est visiblement pas neuve mais son état impeccable, sa patine et sa section impressionnante montrent qu’elle  peut voir défiler encore beaucoup d’années …et plus….

 La Fabrique Poïein est un lieu privé, dédié à la culture mais la culture dans sa  forme ouverte, libre, créative, comme l’incarne le propriétaire de cette “oasis”, Gérald Casteras, ancien professeur de lettres classiques, chaleureux et simple mais dont on sent le large éventail des curiosités et une érudition considérable et pourtant sans ostentation. Je vous invite, pour en savoir plus, à découvrir  ICI  le site afin que je puisse vous conter notre soirée.

L’accueil est, à l’image du maître de céans, sympathique et amical et l’on se sent tout de suite à l’aise en apportant son écot au casse-croûte qui suivra le concert (façon “Chantappart”). La météo qui trahit tant de gens en ce moment, a causé beaucoup de défections par rapport aux réservations mais chacun reste stoïque et détendu.

En Auvergne, l’hiver est souvent significatif, même si nous ne sommes pas au Canada et ce soir, la menace de neige et de verglas n’est pas à prendre à la légère. A l’intérieur, le poêle à bois dispense déjà généreusement sa chaleur et les flammes qui dansent derrière la vitre, ajoutent au charme du lieu.

Je découvre donc Yves Vessiere “nouvelle formule”, c’est-à-dire accompagné d’un pianiste. Jusque là, Yves était le plus souvent accompagné par son “vieux” complice Marc Bargero, guitariste exceptionnel dont on peut mesurer le talent sur les 2 derniers albums.

Yves, guitariste lui-même, utilise souvent son instrument en chantant mais il a toujours su s’entourer de musiciens de haute qualité, que ce soit pour les enregistrements ou les concerts importants, ce qui ne l’empêche pas d’apporter un soin jaloux au choix de son accompagnant pour des manifestations plus conviviales.

Marc Bargero
Marc Bargero

 

“ON SE DEMANDE” : UN ALBUM A DÉCOUVRIR

Et c’est, outre sa fidèle guitare, en piano-voix que nous retrouvons notre ami et le pianiste ne nous est pas d’avantage inconnu.

C’est Alain Régerat que nous connaissons surtout comme pianiste de jazz. Mais s’il excelle dans cette discipline, on sait qu’il a plus d’une corde à sa harpe et comme les chansons d’Yves sont souvent “jazzy”, ça devrait “le faire”, comme on dit.

Et “ça le fait” ! En commençant par une bossa de sa composition, “On aime la musique”, parfait échantillon des chansons de cet  artiste qui sait si bien allier poésie, fraîcheur et humour. La seconde, “Lui plaire encore”», est une “chanson d’amour ” si on met de côté l’autodérision et l’ironie dont elle est cousue tout du long.  Une chanson à retrouver également ICI sur youtube.

 C’est celle qui débute l’album “Patchwork”sorti en 2010. J’avoue bien volontiers que je “l’attendais au virage”, la guitare Manouche de Marc Bargero m’ayant semblé inséparable de cette chanson, par la couleur qu’elle lui apportait. Mission accomplie pour le nouvel arrangement d’Yves et pour Alain Régerat. Le piano d’Alain a su prendre sa place, comme d’ailleurs dans la bossa qui précédait.

Dans l’annonce que j’ai reçue et qui m’a attiré jusqu’ici, en dépit des injonctions alarmantes de M. Météo, le spectacle s’intitulait : « On se demande », titre du dernier album d’Yves, sorti en 2016 et salué, à sa sortie par un bel article de l’ami Michel Kemper sur le site NOSENCHANTEURS à lire ICI .

De G. a D. Yves Vessiere(g), Ludovic Legros (cb), Marc bargero(g) au Pianocktail
De gauche à droite Yves-Vessière, Ludovic Legros et Marc Bargero au Pianocktail

 

AVEC IRONIE, HUMOUR ET DÉRISION

Je dis un bel article car il résume à peu près tout ce que je pense de l’artiste Yves Vessière. Et de ses chansons et de la place qu’elles devraient occuper, avec bien d’autres, si l’espace médiatique qui permet d’accéder à un public plus large n’était confisqué par les promoteurs de choses insignifiantes quand ce ne sont pas des insanités ordurières empilées en vrac dans un emballage bruyant, baptisées rapidement “rap” pour décrocher trois “victoires de la musique” le même soir : ce qui a, quand même déclenché une pétition pour réclamer leur retrait .A suivre…

Donc notre soirée s’intitule “On se Demande” et, si à notre grand plaisir, elle est majoritairement tournée vers les chansons de cet excellent album (écoutable et achetable sur son site . Yves, comme à l’accoutumée, ne s’interdit pas de nous emmener en promenade dans ses précédents albums  tels “Patchwork” en 2010 ou ” Chansons d’autres étés” en 2000, par exemple

 Yves Vessière n’est pas tombé de la dernière averse. Et l’on a plaisir à visiter ou revisiter ses œuvres antérieures, d’autant que sa maturité d’auteur est constamment consolidée par une fréquentation régulière et gourmande de la littérature, poétique entre autres.

Son regard lucide et attentif sur le monde et la société, ajouté au soin qu’il apporte à chacune de ses chansons (texte, équilibre, mélodie, arrangements) en fait, depuis longtemps des sortes de madeleines qu’on aime à retrouver périodiquement et savourer.

On n’est jamais menacé de monotonie ou d’ennui, avec cet homme. L’ironie, l’humour, la dérision peuvent tout à fait venir “dédramatiser ” une histoire qui pourrait paraître un peu sombre,  telle cette chanson qui pourrait  évoquer des parfums de Chelon et de Brel, sans ce sourire en coin … dans “Rue des soubrettes” à retrouver ICI sur youtube.  

 

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CHAQUE ALBUM PLUS RICHE QUE LE PRÉCÉDENT

Chaque chanson est une entité complètement différente de la précédente, avec ce que Jean Anglade appelle “une grande variété d’inspiration, qui passe de l’humour à la poésie, de la gravité à la tendresse, jonglant avec les mots, métissant les musiques (Jazz, tango, bossa, valse)”.

Il y a toujours un brin de sérieux dans les chansons d’Yves Vessière, même si elles sont délibérément drôles. A chacun d’aller le chercher et d’en tirer la substantifique moelle, au milieu de propos malicieux et sur une musique qui peut sembler primesautière … comme dans “La pomme de terre” à savourer ICI sur youtube.

En 2000, à la sortie de son album “Chansons d’autres étés”, la revue “Chorus, Les cahiers de la chanson” saluait l’artiste et ses musiciens par un beau coup de chapeau. Et on peut dire qu’à Chorus, ils en connaissaient un rayon en matière de chanson francophone.

Pour ma part, bien qu’amateur des chansons d’Yves Vessière depuis longtemps, je ne puis m’empêcher de trouver chaque album plus riche que le précédent, impression dont je ne saurais, bien sûr, certifier la totale objectivité. Et le dernier né des albums d’Yves n’échappe pas à cette “règle” toute personnelle.

Au total, les chansons ne sont ni plus graves ni plus drôles que dans “Patchwork”, par exemple mais peut-être certains sujets abordés sont-ils devenus plus préoccupants qu’ils ne l’étaient déjà et l’art déployé à nous permettre malgré tout d’en sourire (même jaune), me semble-t-il encore plus habile. En somme plus abouti, qu’il s’agisse des propres textes d’Yves ou de ceux  empruntés à des auteurs amis (Bernard Martin, “Vrai fils de la nation”) ou à des auteurs ou écrivains connus tels Jean Richepin, René Fallet, Raymond Devos.

Mais si la première chanson de l’album donne le ton de la dégradation des problèmes sociaux, elle est compensée par une instillation d’espoir dans les refrains .. avec “On se demande”. A découvrir ICI sur youtube.

Yves Vessiere avec Alain Regerat au piano

 

DES CHANSONS AUSSI RÉCRÉATIVES QU’INTERROGATIVES

Dès que l’on sort de la chanson purement bucolique ou de la chansonnette d’amour, certains ne peuvent retenir la question récurrente qu’on a entendue un nombre incalculable de fois pour bien d’autres artistes : Yves Vessière est-il un “chanteur engagé” ?

Certains artistes ayant usé et abusé de cette appellation, il a été plus facile pour une génération plus timorée de la “ringardiser”, au point que l’adjectif “engagé” puisse paraître ridicule, voire handicapant aujourd’hui.

Personnellement, je ne vois aucun inconvénient à considérer comme tel un artiste qui donne à tout ou partie de ses chansons un contenu “signifiant” : au sens où ce mot est le contraire “d’insignifiant” et qu’aujourd’hui les problèmes du monde ou simplement du pays, qu’ils soient sociaux ou sociétaux méritent bien quelques chansons … forme sous laquelle, résumés et condensés, ils s’impriment plus facilement dans les consciences, ce qui est un début.

Les chansons d’Yves Vessière, de ce point de vue, récréatives autant qu’interrogatives, s’inscrivent dans la ligne de Frasiak, Bobin, Lavilliers, Utgé-Royo, Chelon, Tachan, Jamait, Leprest, Boutet et bien d’autres, sans parler de leurs grands aînés.

La seule exigence qui leur est alors imposée, hormis de demeurer intéressants, ce qui est un minimum, est de rester cohérents avec eux-mêmes, ce qui n’est pas forcément évident, surtout si le succès survient.

En conclusion, nous avons passé une belle soirée à La Fabrique Poïein, retrouvé avec grand plaisir un Yves Vessière toujours aussi attachant et qui, de surcroît a gagné son pari : adapter ses mélodies à l’accompagnement piano grâce à la complicité d’Alain Régerat.

Nous avons découvert un nouveau lieu de rendez-vous artistique fort accueillant qui n’aurait besoin que d’un petit “habillage mural” pour être parfait et complètement “photogénique”.

TEXTE Henry TILLY

PHOTOS FRANÇOISE ET HENRY TILLY

SITE D’ YVES VESSIÈRE, un homme qui chante

 

 

 

 

 

 

 

 

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ARTHÉ-CAFÉ : ERIC FRASIAK FAIT MONTER LA TEMPÉRATURE DU “SOLEIL” EN AUVERGNE

C’est fait !  “Sous mon chapeau”, le nouvel album de l’auteur-compositeur-interprète Eric Frasiak vient (enfin) de sortir en ce mois de novembre 2016.

Une quinzaine de musiciens et choristes a participé à ce nouvel opus de 15 chansons, dont une en duo avec Jérémie Bossone, enregistré au Crocodile Studio de Bar le Duc. Et comme dans les deux derniers albums, Frasiak reprend, dans un arrangement original, une chanson emblématique de Léo Ferré : “La solitude”.

En attendant de vous présenter cet album, voici un article de Henry Tilly consacré à un des récents concerts frasiakiens”, celui du 6 novembre 2016.

 

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 Dans les Montagnes d’Auvergne, au lieu-dit Sauterre, à une poignée de kilomètres de Riom, sur la D 50, se niche un gîte chaleureux doublé d’un café-concert, “Le Soleil” alias « l’Arthé-Café » dont le renom grossit d’année en année.

Rien d’étonnant quand on voit la collection impressionnante d’affiches dédicacées  des artistes invités qui y passent et, pour certains, repassent au fil du temps. Le moins que l’on puisse en dire, c’est qu’il y a “du beau linge.

Un couple exceptionnel, connu et reconnu dans les festivals comme Barjac et quelques autres, règne sur les lieux. Il a tricoté une ambiance d’accueil et de complicité chaleureuse, tant avec le public, souvent constitué de « connaisseurs » fidélisés, qu’avec les artistes qui, de leur côté, retrouvent ici certains de leurs fans que les kilomètres n’effraient pas et rencontrent aussi un public nouveau.

DÉMARCHE MILITANTE AU SERVICE DE LA “CHANSON FRANCOPHONE”

Maï et Marc Usclade (en photo ci-dessus avec Frasiak) sont manifestement dans une démarche militante au service de la “chanson francophone”. Et ils portent à bout de bras, avec une compétence et une énergie remarquables, ce “temple” de la “chanson de proximité”, comme dirait notre ami Michel Trihoreau.

Ce soir, dimanche 6 novembre, l’invité c’est Frasiak. LE Eric Frasiak, cet auteur-compositeur-interprète Lorrain que j’ai découvert à St-Pierre et Miquelon, en 2011, aux “Déferlantes Atlantiques.

Il m’y a tout bonnement “estomaqué” d’emblée par la qualité de ses textes et de ses compositions mais aussi par sa présence scénique et l’homogénéité donc l’authenticité qui émane de l’homme et de ses chansons. Chacune raconte une histoire et, à l’instar de ceux qui ont été ses Maîtres, François Béranger ou Léo Ferré, chaque histoire peut être un coup de cœur ou un coup de dent.

Rien qui éructe ou vocifère mais bien au contraire, tout témoigne d’un esprit éclairé qui porte sur le monde et les hommes un regard parfois moqueur, ironique, voire satirique, au besoin mordant parce que lucide mais aussi et souvent tendre, fraternel, ce regard qui se traduit dans ses textes par un humanisme sincère, authentique mais sans ostentation, sans surcharges, ce qui le rend hautement crédible et potentiellement contagieux.

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La jeune génération gagnée par chanson française ?

 

UNE PRÉSENCE SCÉNIQUE EXCEPTIONNELLE

Hé oui ! C’est tout cela Eric Frasiak, F.R.A.S.I.A.K. donc avec un S et “surtout pas de Z à mon nom !… sinon je vous frite”.

Je l’ai donc découvert en concerts à St-Pierre puis à Miquelon, en solo guitare où j’ai pu remarquer, à l’occasion, (cf. chroniques “Déferlantes Atlantiques” sur www.francomag.com), que derrière l’auteur de talent se cachait un musicien solide. Doté, de surcroît, d’une présence scénique exceptionnelle qui n’est sans doute pas pour rien dans la contagiosité de son humanisme.

Dans le même temps, j’ai découvert l’album “Parlons-nous” sorti en 2009, album où Eric est entouré d’une formation très étoffée de solides musiciens travaillant sur ses arrangements.

Les superbes chansons de cet album, rehaussées, de plus, par cette orchestration, présentaient, chacune, toutes les qualités pour devenir des “tubes” comme on dit dans le monde du “show bizz”.

Mais ce monde-là précisément n’aime pas que le grand public accède à autre chose que ce qui sort de ses “élevages en batterie”. Et c’est bien pour cela qu’il se protège en “phagocytant” toute la télévision et toutes les radios, ne concédant, non sans réticence, quelques molécules de liberté de programmation qu’à quelques radios locales FM.

Philippe Meyer, sur France Inter, dans la seule vraie émission subsistant encore, dédiée à la vraie chanson francophone, a bien programmé deux chansons de Frasiak. Mais ça ne se reproduira plus ; son émission est supprimée. Ah mais !…

Donc, place aux “play-lists” concoctées par des programmateurs, beaucoup plus soucieux des intérêts des “poulaillers d’acajou” que de la valeur artistique des “œufs” pondus par les volailles de l’élevage, fabriquant de toutes pièces des “hits parades”, comme autant de référendums pipés, trichant effrontément avec la loi sur les quotas en considérant comme francophone une chanson en anglais pourvu qu’elle soit chantée par un français.

Ainsi, par cette acrobatie, David Guetta entre tranquillement dans le quota de la chanson francophone !!!!….et ce n’est qu’un exemple…

 CETTE CHANSON-LÀ S’EXPRIMERA TOUJOURS, AU BESOIN, DANS DES LIEUX CONFIDENTIELS VOIRE CLANDESTINS

Mais ne nous laissons pas emporter par la colère au risque de nous éloigner du sujet de ce soir.

De toute façon, comme l’explique fort bien Michel Trihoreau dans son ouvrage “La Chanson de Proximité” (Éditions l’Harmattan), cette vraie, cette belle chanson que nous aimons tant, à toutes époques, celle qui dit notre vie, nos joies, nos peines, nos révoltes, qui défie les “pouvoirs”, les raille, les fustige, crie à tous instants notre soif de liberté, à commencer par la liberté de pensée et d’expression, cette chanson-là s’exprimera toujours, au besoin dans des lieux confidentiels, voire clandestins.

L’histoire, fort bien exposée par M. Trihoreau, le prouve et, pour ainsi dire chassée des grands médias audio-visuels pour faire place à des “spécialistes” autoproclamés et à leurs protégés-obligés, cette chanson, cette poésie, chantée ou non, se retrouve dans des lieux plus modestes …

Mais beaucoup plus chaleureux que la télé ou les grandes salles, des lieux, aussi, beaucoup plus propices aux rencontres et échanges entre artistes et public, des lieux où, presqu’immanquablement, après le spectacle, on va, comme à l’Arthé-Café, comme dans un “Chant’Appart », casser la croûte ensemble et amorcer une “3ème mi-temps”.

Mais n’allons pas trop vite.

Ce soir, Eric, en plus de quelques chansons issues des opus précédents, nous présente un florilège de ses nouveaux titres  que nous pourrons réentendre dans le prochain album, “Sous mon Chapeau”.

Encore un chapelet de perles rares que l’on n’est pas prêts d’oublier. Des textes ciselés, précis, saisissants, pénétrants, et toujours portés par un écrin mélodique joliment cousu main.

 

Certains artistes, même parmi les meilleurs, peuvent donner un vague sentiment de monotonie tant reviennent trop régulièrement les mêmes thèmes ou des mélodies trop semblables.

Chez Frasiak, pas de risque. Chaque chanson dessine un tableau complètement différent et les mélodies sont toutes originales et colorées de genres musicaux très variés et d’arrangements superbes.

Eric ne se jette jamais sur l’actualité pour surfer sur le “buzz”.

Même quand celle-ci l’émeut au plus haut point, il prend du recul et elle n’apparaît dans son œuvre qu’avec un certain décalage.

Chez lui pas de débordements, de hurlements, de pathos. Il n’est pas dans la “posture” et son message, car c’en est un, n’est jamais une proclamation ou un mot d’ordre.

 Eric pourrait légitimement se revendiquer “héritier” de son “Maître à chanter” François Béranger, tout comme ce dernier était naturellement un héritier de son si cher Félix Leclerc.

Et quand il entonne cet hommage à ce maître qui a nourri toute son adolescence, l’émotion nous serre irrésistiblement la gorge car, comme dans toutes ses chansons et dans celle-ci plus encore, on ne peut plus douter de l’authenticité de l’homme et de la force des sentiments qui l’habitent.

 

 AVEC LA COMPLICITÉ DE l’EXCELLENT GUITARISTE JEAN-PIERRE FARA

Vous l’aurez compris, avec cet artiste-là, si la “dégustation” d’un album est un moment de plaisir intense, un concert est nécessairement un énorme moment de bonheur.

Frasiak, outre la qualité et la profondeur de ses chansons, est aussi , sans exubérance, un véritable homme de scène, rempli d’humour et jouant admirablement, dans ce registre aussi, avec la complicité de son excellent guitariste, le fidèle Jean-Pierre Fara qu’Eric, guitariste lui-même, présente comme son “bras droit”. C’est bien ainsi qu’on peut le voir mais pour le régal de tous, un bras droit équipé d’une fabuleuse main gauche.

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Le bras droit et sa superbe main gauche

 

A ce stade, une visite s’impose ICI SUR SON SITE.

Ces artiste-là sont généreux et nous ont gratifiés d’un concert de deux heures (hors entracte). Deux heures que nous n’avons pas vu passer, faut-il le dire et pendant ce temps, la montagne d’Auvergne nous tricotait la surprise de saison.

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Arthe-Cafe ou cabane à sucre ? Eric Frasiak ou bucheron canadien ?

 

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Puisqu’on vous dit que c’est “Le Soleil” !

 A la sortie, on se serait cru dans les Laurentides, au Canada. Tout était blanc, bien blanc et l’Arthé-Café avait l’air d’une “cabane à sucre” dans ce décor.

Ceux qui n’habitaient pas trop loin sont partis après la “soupe”.

Les plus éloignés, dont nous, sont restés dîner et dormir au gîte, non sans avoir, avec Eric et Jean-Pierre, sacrifié jusque bien tard, à la ” 3ème mi-temps” en chansons.

 TEXTE HENRY TILLY

PHOTOS FRANÇOISE TILLY

A DÉCOUVRIR LES ÉMISSIONS “LA CHANSON DANS TOUS SES ÉTATS”

ANIMÉES PAR HENRY TILLY SUR RMB À MONTLUÇON

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3ème mi-temps. De gauche à droite Henry Tilly, Jean-Pierre Fara, Eric Frasiak et des amis naufragés de la neige