Parler de Dominica Merola, c’est évidemment s’embarquer pour la Belle Province : cette auteure-compositrice-interprète est une des voix originales de la chanson québécoise, c’est évident.
Mais il serait incomplet et regrettable d’accoler à sa trajectoire artistique l’unique expression de « chanteuse québécoise ». Ce qualificatif ne reflète qu’une réalité à la fois partielle et partiale car Dominica jongle avec aisance entre culture québécoise et racines italiennes.
Pas étonnant que le terme de « L’Appassionata » – mot italien signifiant passionnée – soit souvent employé pour présenter cette chanteuse-pianiste dont le récent concert aux accents français, italien et anglais au Palais des Beaux-Arts – le célèbre Bozar de Bruxelles – a été synonyme de réussite.
Retour sur une inoubliable soirée mais aussi coup de projecteur sur les divers projets de cette attachante créatrice résolument sans frontières.
Inoubliable concert jeudi 19 décembre dans la superbe salle du Bozar de Bruxelles
Entre Québec et Italie, entre chanson et répertoire classique
S’il est vrai que ses fauteuils rouges contribuent encore un peu plus à vous transporter dans un univers hors du commun, que dire de l’acoustique de cette salle où la voix de Dominica Merola a pu s’envoler au gré de ses chansons, dont certaines ont été proposées a capella.
Car il faut bien le reconnaître : le Bozar est une salle vraiment hors du commun qui convient parfaitement à l’expression vocale de Dominica tant par son environnement que son acoustique. Il y a vraiment de quoi être surpris par l’atmosphère qui s’en dégage.
“Un espace vraiment magique”: une telle dénomination – hélas trop souvent galvaudée – prend ici un sens tout à fait particulier, comme le confirmeront aisément celles et ceux qui sont venus applaudir Dominica Merola en cette soirée de décembre.
Et si la salle est à la hauteur de sa réputation, une autre surprise de taille attendait le public. En effet, pour ce concert assuré en solo – à la différence du Québec où il lui arrive souvent de se produire en compagnie de plusieurs musiciens – Dominica Merola s’est accompagnée au piano ce soir-là. Un Steinway … Et pas n’importe lequel puisqu’il s’agissait de celui qui est utilisé pour le prestigieux concours de Piano Reine Elizabeth de Belgique.
D’où sa joie, son bonheur communicatif à m’en parler, peu de temps avant d’entrer sur l’imposante scène du Bozar : heureuse de se produire en jouant d’un tel instrument, et enthousiaste à l’idée de pouvoir offrir aux spectateurs un concert d’une intense qualité.
Un concert d’une heure et demie pour lequel l’artiste aura bénéficié de l’indispensable soutien d’Étienne Briclet, administrateur et gérant de Sun Production soutenu par son attachée de presse Valérie Nederlandt.
“Cette révélation est à l’origine de mon absolu désir de chanter”
Sensible à la musique classique et à ses grandes voix qui vous transportent ailleurs, Dominica ne s’aventure jamais à la légère dans le choix de ses chansons.
Qu’elle en soit l’auteure, la compositrice ou “seulement” l’interprète, elle avance avec audace et bon sens, sélectionnant avec grand soin les mélodies qui lui permettent de donner libre cours à sa voix unique.
Une voix de chanteuse évidemment, mais aussi d’ambassadrice des grands airs du répertoire qu’on a plutôt l’habitude de savourer à l’opéra que dans une salle de concert. En témoignent ces confidences en guise d’introduction de la pochette de son album Appassionata :
“Allegro, andante, moderato…
Toute petite, en étudiant le piano ces mots me faisaient rêver…
Adolescente, à l’école de musique, c’est en interprétant ma première aria italienne, que j’ai découvert ma voix.
Ces belles mélodies me transportaient, me chaviraient, allaient réveiller en moi les tumultes d’émotions nouvelles. Cette révélation est à l’origine de mon absolu désir de chanter”.
“De la Toscane au Saint-Laurent/ Et de Rome jusqu’à Montréal/ J’ai fait du passé mon présent/ Avec l’av’nir pour seule étoile”
Elle qui a étudié le piano dès l’âge de six ans, s’est vite prise de passion pour Strauss, Bach, Chopin, Mozart, Mendelssohn : autant de noms prestigieux auxquels elle a fait allusion dès le début du concert, en présentant une de ces chansons les plus connues, “Tous les pianos du monde”. Une première chanson des plus révélatrices de son cheminement
De là à continuer à s’aventurer dans sa double culture, il n’y avait qu’un pas. Et elle le franchira avec brio de divers manières, notamment avec “D’ici et de là-bas”, chanson ô combien symbolique aux expressives paroles signées Sandrine Roy et aux mélodies méditérranéennes composées par Dominica.
« Je suis d’ici et de là-bas
Pourtant, je ne suis de nulle part
Pour me comprendre, j’ai pas à pas
Refait le chemin de l’histoire
De la Toscane au Saint-Laurent
Et de Rome jusqu’à Montréal
J’ai fait du passé mon présent
Avec l’av’nir pour seule étoile”
Acrobate des mots, elle jongle avec aisance entre ses deux passions (répertoire classique et chanson) et sa double cultures, en colorant de mots français et italiens “Le petit bonheur” de Félix Leclerc ou en offrant une version bilingue de “Una donna con te”, en l’occurrence “Une femme avec toi”» rendue célèbre par Nicole Croisille.
Léonard Cohen, Félix Leclerc, Brel, Gershwin et les autres
Bien qu’elle soit auteure et compositrice, Dominica Merola n’hésite pas à travailler avec des paroliers et des musiciens de la chanson francophone tels Sandrine Roy, la chanteuse franco-québécoise Gaële, Roger Tabra, Marc Chabot, Mala Barbulescu, etc.
D’où ce concert au Bozar teinté de multiples influences : une intense soirée synonyme de voyage côtoyant divers univers tels que la vibrante reprise de “Hallelujah” de Léonard Cohen et un éblouissant final : deux derniers titres du concert offerts sous les applaudissements nourris du public enthousiasmé par sa version de “Summertime” de Gershwin et de “Quand on n’a que l’amour” de Brel.
D’où l’intérêt de prendre le temps de visionner et d’écouter ce montage réalisé par Jacques Van de Voorde durant le concert du 19 décembre 2013 : un judicieux choix de quelques extraits de ce concert marqué par plusieurs rappels.
De quoi ravir l’artiste qui travaille depuis plusieurs années avec un des plus importants éditeurs musicaux du Québec, Jehan V Valiquet.
Une voix intense et sensuelle, tour à tour douce et puissante
Intense et sensuelle, tour à tour douce et puissante … Pas évident de définir en quelques mots la voix de Dominica Merola : une incroyable aisance et un registre à couper le souffle avec ses trois octaves. Une voix à l’aise aussi bien dans le registre classique que la reprise de chansons inédites ou des grands titres du répertoire québécois ou italien.
“Une voix très chaude, une voix de velours qui a un petit côté intemporel” affirmait Catherine Perrin au micro de Radio Canada, en février 2006 dans l’émission “C’est bien meilleur le matin” à l’occasion de la sortie de son premier opus, “Les signes du désir” en 2006. Suivra en 2010 “Appassionata” notamment marqué par un duo avec Daniel Lavoie (“Naufragés”).
En septembre, dernier, via un CD de trois chansons en français, italien et anglais – dont elle a composé la musique et coécrit les paroles - elle a rendu public un épisode des plus inattendus de sa vie. Le titre en dit long sur cet événement d’ordre privé : “J’ai épousé le Père Noël” … en l’occurrence l’homme de sa vie ! Oui elle s’est mariée avec ce Père Noël croisé durant son enfance !
La version française a bénéficié de la collaboration de Sandrine Roy, parolière française aux efficaces participations sur tant d’albums de la chanson québécoise. Et on retrouve d’ailleurs Sandrine Roy parmi les professionnels œuvrant avec Dominica Merola en vue de son troisième album CD dont la sortie est prévue pour l’automne 2014.
“L’urgence de vivre, les déchirures, la jalousie, le temps qui passe”
“Pour le projet du nouvel album, Sylvain Michel assume la réalisation ainsi que les arrangements et je collabore avec une belle brochette d’auteurs de la francophonie : Marc Chabot, Nelson Minville, Sandrine Roy, Gaële, Mala Barbulescu et d’autres encore.
Je développe activement les chansons de mon troisième album dont je compose la musique sur des paroles d’auteurs reconnus tant au Québec qu’en Europe. Il aura une sonorité moderne aux influences musique du monde au niveau des arrangements, chanté surtout en français.
Cet album sera plus proche de ma sensibilité artistique mettant en relief mes qualités de compositeur : de nouvelles chansons aux grandes mélodies, sur des textes percutants, tout en soutenant l’étendue de mon registre vocal que de nombreuses personnes jugent exceptionnelle.
Place à la passion dans toutes ses couleurs: l’urgence de vivre, les déchirures, la jalousie, le temps qui passe, sur des rythmes envoûtant de tango, de balades sensuelles, en contraste avec des pièces piano-voix, en toute intimité”.
“Une visibilité auprès des représentants des centres culturels en Belgique et ailleurs en Europe”
2014 s’affirme sans aucun doute comme une année décisive dans le parcours de cette artiste.
“Le spectacle que j’ai présenté en décembre 2013 au prestigieux Palais des Beaux Arts (Bozar) à Bruxelles est très important pour la suite de ma carrière en Europe. Il m’a donné une visibilité auprès des représentants des centres culturels en Belgique et ailleurs en Europe.
Plusieurs nouveaux diffuseurs sont déjà intéressés à me programmer dans des festivals pour l’été 2014 et attendent avec impatience mon troisième album. Une nouvelle tournée sera organisée pour la promotion de cet album, au printemps 2015, en Europe.
Et en janvier-février 2015, des spectacles sont prévus aux États-Unis. D’ici là, au printemps 2014, plusieurs spectacles privés et publics auront lieu à Montréal et dans la région de Québec ».
Mais nous n’en sommes pas encore là. Pour le moment, au cœur de l’hiver québécois, Dominica Merola va de l’avant dans l’enregistrement de son nouvel opus. Avec passion et détermination, sans précipitation mais en sachant très bien comment orienter sa voix et son nouveau répertoire enraciné avec fierté et talent dans sa double culture.
Texte et photos Albert Weber
Après le concert, en compagnie de Dominica Merola entourée par Jacques van de Voorde et Etienne Briclet, administrateur et gérant de Sunproduction. Photo prise par l’attachée de presse Valérie Nederlandt