Après la sortie, l’an dernier, d’ “In extremis”, son 13e album, Francis Cabrel a effectué une tournée d’une centaine de dates durant plus d’un an en France, Suisse, Belgique, Québec, la Réunion et aussi l’Ile Maurice.
Retour sur cet événement avec la journaliste mauricienne Kovillina Durbarry.
En concert à Maurice pour la cinquième fois, Francis Cabrel a une fois de plus fait chavirer et chalouper plus d’un.
Lors d’un unique concert avec salle comble au Centre Swami Vivekananda à Pailles, le samedi 22 octobre dernier, le célèbre chanteur français a interprété les 10 nouvelles chansons de son album “In extremis” ainsi que nombre de ses classiques. Le temps d’une “corrida”endiablée et d’un “C’est écrit” à la sauce pimentée bien de chez nous, Francis Cabrel a livré un concert de pas moins de deux heures devant un millier de Mauriciens.
Le chanteur qui a posé ses valises … et sa guitare sur le sol mauricien le mercredi 19 octobre, est resté fidèle à lui-même : simple et authentique.
Lors d’une conférence de presse jeudi après-midi à l’hôtel Le Paradis au Morne, le chanteur s’est dit ravi d’être à Maurice. Et dans un entretien accordé au quotidien L’Express, il affirme approcher la fin de son parcours sans pour autant s’être fixé une date.
Accompagné de ses très talentueux musiciens, c’est en trempant la chemise que Francis Cabrel a repris des morceaux qui ont fait à la fois danser et sangloter toute une salle.
Une énergie folle sur scène
En effet, celui qu’on ne présente plus et dont les chansons passent en boucle sur toutes les chaines radio locales, a envouté son audience de par sa présence sur scène.
Accompagné ou seul, Francis Cabrel – qui a gardé le même timbre de voix d’il y a dix ans lors de son dernier concert sur l’île – dégage une énergie folle. Une énergie qu’il a d’ailleurs su transmettre en toute complicité à son public.
Une prestation hors-pair plébiscitée par un auditoire comblé. Le chanteur a, au cours du concert, offert un moment des plus inoubliables aux Mauriciens conquis.
Ainsi, avec son interprétation du méga tube “Je t’aimais, je t’aime et je t’aimerai” de son album “Samedi soir sur la terre”, Cabrel seul sur scène avec sa guitare et en toute simplicité est parvenu à figer un peu plus de mille personnes. Toutes figées par le talent d’un seul homme sur scène.
“Zot mari top”
De plus, Francis Cabrel s’est aussi prêté au jeu devant une foule mauricienne très taquine.
“Zot mari top” devait lancer le chanteur français, tout en répétant les quelques mots écrits en kreol morisien sur son antisèche. Et c’est en esquissant de temps à autre quelques pas de danse, que Francis Cabrel s’est dévoilé petit à petit au public mauricien … qui a dansé et chanté avec lui pendant tout le concert.
Par ailleurs, ce nouvel album “In extremis” lancé en avril 2015 regorge d’une myriade de petites perles … Avis donc aux mélomanes avisés ! Tantôt émouvantes tantôt endiablées, la douzaine de chansons engagées et à caractère politique par moment ont connu un véritable succès auprès du public.
Ainsi “Mandela, pendant ce temps” a fait vibrer de passion tous ceux présents, de par le rythme africanisant et les paroles sensées et engagées – soit un ultime hommage à Mandiba.
Autant de belles chansons dans un album complet et parfaitement réussi. Bref, un pari relevé haut la main à 63 ans et des poussières !
Vivement un autre concert à Maurice … et un 14ème album.
Certains artistes francophones d’Amérique du Nord sortent incontestablement de l’ordinaire, par leur parcours personnel, leurs choix artistiques, leur présence scénique. Et aussi par leur liberté de création qui se joue des frontières à tous les sens du terme.
Yao fait partie de ces voix qui savent émouvoir, faire réfléchir, et danser aussi. LAPSUS, son 3ème album solo sorti en six ans, met en évidence un créateur des plus inspirés. Explications.
MÉTISSAGE, UNE FORCE INCONTESTABLE
Sur la scène francophone de l’Ontario, Yaovi Hoyi alias Yao surprend à bien des égards. Ses racines, elles s’affirment multiples aussi bien dans sa vie personnelle qu’artistiques, et ce métissage, il en a fait une force qui éclate avec brio dans les 44 minutes et 49 secondes de LAPSUS.
Cet album résulte d’un double travail : d’abord l’envie et le besoin de créer. Une volonté écrire qui donne libre cours à son imagination, ses rêves et ses remises en question aussi, en utilisant un vocabulaire riche, inspiré.
Et puis il y a le travail d’équipe, mené à bien avec une demi-douzaine de compositeurs, et une poignée de musiciens (synthés, batterie, guitares, etc). D’où un album de 13 titres, offerts en solo … avec selon les titres la participation de plusieurs voix telles Julie-Kim Beaudry, Cathy Vallières, Peter O’lean, Gabriel Whiting, Céleste Lévis, F.L.O. etc.
DES TEXTES A SUIVRE A LA TRACE
Dans cette province canadienne où la langue française est minoritaire – à la différence du Québec – le choix de chanter en français est un acte tout aussi militant qu’artistique pour Yao … invité fin novembre 2016 aux célébrations du XVIe Sommet de la Francophonie, à Antananarivo, la capitale de Madagascar. De quoi – une fois de plus et dans des circonstances totalement inédites – affirmer un répertoire des plus percutants et des plus poétiques aussi.
Car il faut bien reconnaître que trois ans après son précédent album, “Perles et Paraboles”, la veine créatrice de Yao est plus performante que jamais avec LAPSUS : un opus bénéficiant d’une superbe pochette très classe, et un livret qui l’est tout aussi, à la fois sobre et raffiné. Avec en prime les textes à suivre à la trace tout en écoutant l’album … c’est du moins ce que j’ai fait après m’être passé à plusieurs reprises cet opus en voiture !
REFUS DE LA FATALITÉ ET APPELS AU BON SENS
Ah les textes de Yao …
Il faut bien en dire un mot de ces textes, souvent longs – voire très longs comme “Étrange absurdité” ! Autant d’émotions et d’observation, d’appels au bon sens et à la tolérance, au refus de la fatalité et aux dangers du mimétisme (“Comme eux”). Vous savez, quand la personnalité est enfouie, niée au profit de comportements adoptés pour “être comme les autres”…
S’y glissent aussi d’autres thèmes, tel la déchirure sentimentale évoquée ici d’une manière originale (“L’amour et la guerre”) … la séduction aux allures de coup de foudre (“Échec et mat”) … la dépendance amoureuse (“Dans le sang”) …
Et voilà comment l’on en arrive à ce drôle de paragraphe mis en évidence dans le livret de l’album : “Prisonnier des LAPSUS que j’ai DANS LE SANS, je suis devenu NOMADE. Et cela, au risque d’un ÉCHEC ET MAT dans ce jeu de L’AMOUR ET LA GUERRE. Je ZIGZAG dorénavant cette ÉTRANGE ABSURDITÉ d’une douce FOLIE A DEUX. Te cherchant au milieu des INTERFÉRENCES. S’il te plait, PARLE-MOI. Que je sois enfin K.O. en me voyant COMME-EUX, dans des éclats de nos RÊVES D’ENFANTS”.
UN ALBUM PERCUTANT ENTRE POÉSIE ET SLAM
Impossible d’enfermer ce” poète slameur” – appellation la plus courante en vigueur pour cet artiste – dans un seul registre.
Originaire du Togo, il a vécu en Côte d’Ivoire avant de trouver sa voie au Canada, depuis 17 ans. Là à vivre au rythme du monde, de ses rythmes, il n’y a qu’un pas franchi en toute décontraction dans cet album de 13 titres.
LAPSUS, réalisé comme “Perles et Paraboles” par Sonny Black, serait-il un album “plus soul, un peu plus funk, un peu plus pop” ? Oui si l’on en croit les médias canadiens mais l’essentiel se situe ailleurs à mon sens. Dans l’énergie verbale et physique dépensée en studio et sur scène par Yao apprécié à plusieurs reprises en pleine action … comme lors d’une mémorable et trop courte “vitrine musicale” à la FrancoFête à Moncton.
L’amour des mots, la passion d’une langue intensément belle, Yao ne les cultive pas seulement pour son petit plaisir. A travers ses choix artistiques il n’oublie jamais d’affirmer haut et fort les valeurs d’un métissage qui le concerne d’autant plus qu’il se définit comme “roux et métissé”.
Mention spéciale pour une diction qui met en valeur des textes dont il varie le rythme au gré des couplets comme dans “Parle-moi” également porté par la voix forte et frissonnante de Cathy Vallières … ou encore “Interférences” offert dans un efficace duo avec l’intense Julie-Kim Beaudry.
“MON ANOMALIE PARADOXALE”
Ayant eu la chance de découvrir, à Ottawa, durant Contact-Ontario, des extraits de son spectacle de poésie théâtrale intitulé Négritude et Métissage, j’ai encore mieux compris l’authenticité de l’engagement de Yao.
Sa sensibilité envers des voix et des plumes telles que Léopold Sedar Senghor, Aimé Césaire ou Daniel Maximin en disent long sur un artiste qui n’est pas seulement préoccupé par l’envie de “faire carrière”.
Passionné par les musiques et les chansons, il l’est aussi par l’écriture, la littérature, la philosophie. Et évidemment le métissage dans lequel s’enracinent en permanence sa vie personnelle et son œuvre.
C’est “mon anomalie paradoxale” comme il l’explique dans un long texte où l’on croise entre autres Voltaire et Epictète, Le Petit Prince de Saint-Exupéry et Albert Camus … Sans oublier Angela Schwindt qui déclare : “Alors que nous essayons d’enseigner la vie à nos enfants, nos enfants nous montrent ce qu’est la vie” .
Ce texte des plus intéressants, on peut le retrouver à la fin du long article consacré à Yao en janvier 2014, suite à un entretien réalisé Place du Châtelet à Paris.
UN COUSIN D’ABD-AL-MALIK A FAIRE CONNAITRE EN FRANCE
En avril 2013, après avoir vu Yao pour la première fois sur scène, au Centre National des Arts à Ottawa, je l’avais qualifié de cousin d’Abd-al-Malik dans un article intitulé “Le poids des mots, le métissage des rythmes”.
“Sans se lancer dans des comparaisons teintées de flagornerie, il suffit de fermer les yeux pour marcher – avec assurance – sur les traces d’un certain Abd-al-Malik au niveau du phrasé, de l’intonation, de certains thèmes aussi.
S’y affirme entre autres références le parti-pris d’un “message positif” synonyme de respect réciproque, de tolérance mutuelle, de besoin et d’envie de mieux comprendre l’autre, surtout s’il est différent. Un message dont l’impact sans assurément amplifié de par la complicité entre le chanteur et ses musiciens qui offrent une couleur tout à fait particulière aux textes.
Pas étonnant donc que Yao évolue avec aisance dans une poésie aux accents slam, avec ici et là des escapades du côté du blues et du jazz. Ses textes ont des allures d’instantanés de la vie telle qu’elle est, sans angélisme ni misérabilisme, où rien n’est impossible … mais où le soleil l’emporte sur les zones d’ombre”.
Aujourd’hui je ne retire rien de ce premier constat, heureux de suivre l’évolution d’un créateur qui aime se jouer des frontières, comme le confirme si intensément son nouvel album.
Yao a la tête bien sur ses épaules, et c’est en toute connaissance de cause – comme évoqué un jour durant une longue conversation au Village en Chanson de Petite-Vallée à qu’il a, voici quelques années, abandonné “une belle carrière” toute tracée dans le milieu de la banque pour “devenir artiste”. Un sacré choix de vie assurément !
“J’ÉTAIS PICASSO DEVENU BAUDELAIRE”
Avec ce 3ème opus lancé en novembre à Montréal et Ottawa, Yao vient de franchir une nouvelle étape tant sur le fond que la forme de ses créations.
Alors à quand une meilleure visibilité en France ? Car il a vraiment TOUT pour retenir l’attention du grand public, et son titre “FOLIE A DEUX” est un des exemples les plus percutants, dansants aussi.
“J’étais Picasso devenu Baudelaire” lance Yao dans “Interférences”, plus ouvert que jamais à l’expression artistique sous diverses formes.
Mis en valeur dans le livret, cette affirmation résume bien une des voix majeures de la chanson francophone efficacement soutenue par l’APCM, l’association des professionnels de la chanson et de la musique : “une référence incontournable de la musique franco-canadienne”.
“LAPSUS”, un album à découvrir, c’est évident. Yao, un artiste à suivre, à encourager.
“C’est l’histoire d’un des artistes les plus humainement et définitivement respectables que j’aurai rencontrés en quarante-cinq ans de journalisme.
L’un de ceux qui, loin de vous faire regretter d’avoir dédié la plus grande partie de votre vie à défendre et illustrer cette petite chose si “futile”, justifient non pas seulement “quinze ans d’amour” – comme l’avait confié Brel, le dernier soir de ses adieux, au public de l’Olympia – mais en l’occurrence au moins le double…”
Signée Fred Hidalgo, cette affirmation en dit long sur l’esprit dans lequel a été rédigé JEAN-JACQUES GOLDMAN CONFIDENTIEL.
Coup de projecteur sur un livre UNIQUE dans l’histoire de la chanson française.
Encore une bio sur un des artistes majeurs de l’espace francophone ? Assurément oui mais … BIEN PLUS ENCORE car ce livre résulte d’une amitié aussi discrète que durable entre Fred Hidalgo et Jean-Jacques Goldman. Assurément un ouvrage de référence !
Impossible évidemment pour Fred Hidalgo de publier une de ces (trop nombreuses) biographies aux allures de puzzle compilant de manière souvent maladroite tout ce qui a été écrit sur JJG. C’est pourtant le lot de tant de livres parus ces dernières années sur le créateur de “La vie par procuration”, non ?
Avant de plonger dans ce document de 572 pages – illustré par un cahier photos de 16 pages dont la plupart signées Francis Vernhet – une mise en garde s’impose de toute urgence : oubliez donc TOUT ce que vous avez déjà lu, entendu ou vu à la télé sur JJG.
Ce couple, je lui ai consacré un (long) article intitulé “Un destin au service de la chanson francophone” à lire ICI.
Alors comment rendre compte d’un tel livre et vous donner envie d’y plonger ?
Plutôt d’écrire un article à chaud, en m’inspirant de la 4ème de couverture ou du communiqué envoyé par l’attachée de presse des Éditions L’Archipel, j’ai préféré d’abord me jeter à l’eau avec détermination. Et puis naviguer avec enthousiasme dans des eaux tantôt calmes et agités.
Car il faut bien admettre que l’histoire de de JJG et de celle de la presse musicale sont extrêmement fertiles en surprises (bonnes et mauvaises) et en multiples rebondissements. Et Fred Hidalgo évoque ici en toute franchise nombre d’aspects de JJG ET AUSSI des aventures et mésaventures des deux revues dont le grand public n’avait à ce jour jamais eu vent.
“LA PETITE HISTOIRE ET L’AIR DU TEMPS DES ANNÉES 80 A AUJOURD’HUI”
Comment résumer en quelque lignes ce livre consacré à celui qui fut un des quatre parrains de Chorus avec Alain Souchon, Francis Cabrel et Yves Simon ?
“Il ne s’agit pas là d’une “simple” biographie (même si tout y est, les faits, les dates et les chansons), c’est aussi la petite histoire de l’air du temps des années 80 à aujourd’hui qui recoupe la vie de l’artiste et s’imbrique de bout en bout dans celle de “Paroles et Musique” et de “Chorus” ; c’est une réflexion menée en commun sur la chanson, sa nature et son rôle, sur sa place dans la société contemporaine”.
Homme de terrain, Fred Hidalgo est assurément aussi un homme d’archives. En témoigne – un exemple parmi tant d’autres – le chapitre “C’est pas vrai” en partie consacré à un article du quotidien Libération “qui, non content de se montrer systématiquement odieux avec Goldman, multipliait aussi les procès d’intention à son encontre”.
Citations à l’appui, Fred Hidalgo détaille les réponses fournies par JJG à Yves Bigot dans le journal du 26 février 1991 sous le titre “Goldman : trois pour un”. S’y ajoutent les commentaires d’Yves Bigot … dont le long et impressionnant CV est publié avec force détails.
Mais alors pourquoi tant de mépris, de condescendance, voire de haine d’une partie des médias envers JJG ?
Impossible d’être “la personnalité préférée des Français pour la 6ème année consécutive (sondage Journal du Dimanche, janvier 2016″ sans susciter les réactions les plus variées, entre admiration et médisance, respect et commérages.
Raconter, montrer, expliquer … Plus fidèle que jamais à la “méthode Chorus”, Fred Hidalgo n’avance rien sans avoir recoupé ses sources.
“NI PARADIS FISCAUX NI BLANCHIMENT D’ARGENT”
TOUT ce qu’il raconte ici est argumenté.
Et sans jamais se complaire dans la presse people, son chapitre “Il part” offre également divers repère privés de JJG : premier mariage avec Catherine, “une ancienne amie d’enfance devenue psychologue” et mère de ses trois enfants …
… puis rencontre avec Nathalie, “une jolie Eurasienne aussi sportive qu’elle a la tête bien faite” et leurs trois filles : “Qui se ressemble s’assemble. Tout aussi simple et discrète, Nathalie ne fait pas mentir le dicton ; elle n’est pas du genre à se montrer dans les médias et partage volontiers le goût de son mari pour la pratique du sport”.
Ce désir de discrétion énerve évidemment les médias en quête de scoop, de révélations croustillantes, de tentative de prendre en défaut JJG. Quitte à fantasmer sur sa fortune et l’utilisation de son argent : une évidence également abordée dans ces pages consacrées au fils d’Alter Mojzesz Goldman né à Lublin en Pologne et de Ruth Ambrunn née à Munich en Allemagne.
Fred Hidalgo désamorce avec élégance et bon sens les envieux fantasmes liés au “trésor de guerre de Goldmann” … avec deux n, bien sûr, c’est plus explicite. (…) Il placerait ses économies dans des paradis fiscaux, blanchirait ses capitaux, les utiliserait à des fins illicites, à des trafics d’armes ou de drogue, ça oui, ça ferait un bon sujet ! On se régalerait. Malheureusement pour les nostalgiques d’un temps où Pétain envoyait les Juifs et les antifascistes dans les camps d’où beaucoup ne sont jamais revenus, il n’y a rien à chercher de tel chez lui”.
“L’ART D’ENCAISSER SANS BRONCHER EST UNE SECONDE NATURE”
La récente décision de JJG de s’installer du côté de Londres avec sa jeune femme Nathalie et leurs trois enfants aura une fois de plus alimenté bien des rumeurs relayées par les médias.
Pas de quoi déstabiliser déstabiliser l’artiste blindé contre les rumeurs et les médisances : “Chez Jean-Jacques Goldman, l’art d’encaisser sans broncher est une seconde nature. S’il avait choisi la boxe pour s’exprimer, il est probable qu’aucun adversaire n’aurait été capable de l’allonger pour le compte” explique Fred Hidalgo en évoquant avec force détails le malsain tapage médiatique suscitée par la chanson “Toute la vie”. (…)
Pourtant, la polémique qui va l’atteindre de plein fouet à la fin de l’hiver 2015, sous couvert de s’en prendre encore une fois aux Enfoirés, a bien failli le mettre KO. Et s’il s’en est relevé intelligemment de ce coup bas, celui-ci a sans doute scellé son départ définitif annoncé un an plus tard”.
Prenez le temps de lire CONFIDENTIEL sans sauter de page, et en laissant de côté vos préjugés… Et laissez vous guider par Fred Hidalgo au cœur d’un étonnant et attachant voyage … De l’enfance à Montrouge au groupe Taï Phong … de la chanson des Restos du Cœur reprise chaque année aux célèbres concerts débutés le 31 janvier 1987 par “La Boum du Cœur” à la Villette … de l’enchainement des tubes aux tournées internationales … avec en guise de conclusion le chapitre “Retour à Madagascar” : un compte-rendu du concert donné le 6 avril 1998 à Madagascar et signé Marine Dusigne, envoyée spéciale du Journal de l’Ile de la Réunion !
Oui, c’est une immersion totale dans la vie de JJG qui vous est proposée … avec également l’évocation d’artistes disparus tels Daniel Balavoine et Michel Berger … Et aussi Sirima poignardée le 7 décembre 1989 par son compagnon musicien … et Carole Frédéricks victime d’une crise cardiaque le 7 juin 2001 …
S’il est vrai que j’ai appris beaucoup de choses sur JJG, c’est grâce à l’incontestable complicité unissant depuis tant d’années le chanteur et l’auteur-journaliste : et cette authentique amitié dépasse évidemment le statut social de JJG et de Fred Hidalgo. En témoignent tant d’exemples développés au fil des chapitres reprenant chaque fois un titre de chanson ….
… et aussi nombre de reproductions de messages échangés entre les deux hommes avec reproduction de certaines réponses manuscrites de JJG.
NOMBREUSES ANECDOTES PERSONNELLES ET FAMILIALES
Car ce livre, c’est aussi pour Fred Hidalgo une manière de se raconter. Non, pas d’autobiographie au sens propre du terme mais de nombreuses anecdotes personnelles et familiales disséminées ici et là.
Comme l’évocation du décès de la mère de JJG avec allusion de l’auteur à sa propre maman : “Elle a fêté en 2016 ses 94 ans … et connaît encore par cœur toutes les chansons qu’elle avait apprises durant son enfance en Catalogne” …
Le sens de la famille ? Assurément une valeur partagée par les deux hommes.et enracinée dans nombre de souvenirs relatés au fil des pages …. comme les circonstances dans lesquelles le chanteur a offert son médiator au gendre de Fred Hidalgo.
Et au fait, qui est donc la belle inconnue secourue un jour par JJG et Fred Hidalgo au bord d’une rue qu’ils empruntaient à moto ? Se reconnaitra-elle dans ce livre où dans un autre chapitre, est mis en évidence la célèbre citation de Félix Leclerc ?
“Il y a des maisons où la chanson aime entrer” : cette phrase si bien mise en valeur au Village en Chanson de Petite-Vallée en Gaspésie sert de clin d’oeil à une des nombreuses allusions à la vie personnelle de l’auteur.
En l’occurrence “la maison d’amour et d’amitié” qui a traversé la vie de JJG “une quinzaine d’années avant que je n’y écrive ces lignes“. Une maison qui aura aussi accueilli Daniel Balavoine et Thierry Sabine … Hasard ? Destin ? Serait-ce la fameuse “synchronicité” ?
“CHORUS ABATTU EN PLEIN VOL ET EN PLEINE TRÊVE ESTIVALE”
Les nombreuses passerelles entre Paroles et musique/Chorus et JJG font partie des raisons qui m’ont incité à plonger avec bonheur dans la lecture de CONFIDENTIEL.
Quel plaisir de retrouver sous la plume de Fred Hidalgo divers épisodes de l’histoire de ces deux revues …. deux des repères d’une amitié née suite à notre première rencontre à l’Ile de la Réunion chez le chanteur Jacques Poustis en 1984.
Alors pas étonnant que certaines anecdotes, certains souvenirs me touchent de près. Tel le chapitre “Je commence demain” quand il est question du “jeune éditeur qui avait tout du cadre dynamique et performant” … oui celui qui a décidé unilatéralement en 2009 de déposer le bilan, “sans prévenir la rédaction, occupée à boucler le numéro 69 de l’automne” ….
La fin de Chorus “abattu en plein vol et en pleine trêve estivale”, j’en ai eu connaissance alors que je me trouvais au Festival d’Eté de Québec…
Plaisir aussi de retrouver ici le souvenir séance de travail du 20 juin 1992 avec arrivée d’un invité-surprise : Pierre Barouh “l’homme de Saravah se retrouvait caméra au poing en train de filmer notre première réunion de rédaction”… Hé oui, les premiers pas de Chorus !
Assurément un formidable document dont personne n’a hélas jamais vu une seule image à ce jour. Un constat d’autant plus regrettable que cette vidéo montre un moment unique dans l’histoire de la presse musicale … avec entre autres l’active participation de Marc Robine et Jean Théfaine, deux des signatures majeures de Chorus emportées par le cancer.
Alors cher Pierre Barouh ?
On pourra les visionner un jour, ces images inédites ?
“JAMAIS ON N’AVAIT CONNU DE TEL RASSEMBLEMENT DE CHANTEURS FRANCOPHONES A L’ANTENNE”
A l’heure d’internet, de l’actualité omniprésente avec ses infos qui en chassent sans cesse d’autres, il me semble important d’offrir aux lecteurs un appréciable temps d’arrêt. De se souvenir de certains événements de l’histoire de Chorus.
De se rappeler que l’inattendue cessation de parution de Chorus aura suscité quatre heures d’émission enregistrées dans les conditions en direct par Thierry Lecamp sur Europe 1 !
“Ce mardi 6 octobre, de mémoires d’artistes et de journalistes, on n’avait jamais connu pareil rassemblement de chanteurs francophones à l’antenne” se souvient Fred Hidalgo. Et de publier une liste non exhaustive de celles et ceux intervenus ce soir-là à l’antenne : au micro, par téléphone ou message enregistré. Une émission des plus mémorable que Thierry Lecamp a du réduire à deux heures de témoignages et de chansons, dont l’intervention de JJG “qui n’avait plus donné l’interview depuis notre rencontre de juillet 2005 et cela faisait des années qu’on ne l’avait pas entendu parler à la radio”.
Un tel ouvrage aurait évidemment été incomplet sans qu’il y soit question du demi-frère de JJG. Oui, le journaliste et écrivain Pierre Goldman : inoubliable figure de l’extrême-gauche française assassinée le 20 septembre 1979 par un commando de trois ou quatre hommes armés de pistolet.
Plusieurs pages sont consacrées à l’auteur de “Souvenirs obscurs d’un juif polonais né en France” qui inspira à Maxime Leforestier la chanson “La Vie d’un homme” sur l’album Saltimbanque illustré par Cabu.
Vous l’avez compris dès les premières lignes de ce (long) article : “CONFIDENTIEL” est une publication unique en son genre. A l’instar du livre de Fred Hidalgo consacré à Jacques Brel aux Marquises !
“UN PROJET QUE JE NOURRISSAIS DEPUIS 1991″
Alors si j’ai pu vous donner envie de le lire, j’en serai très heureux.
D’autant plus que “ce livre est le fruit de trente ans de complicité personnelle et professionnelle : un chemin semé d’interviews exclusives (dont celle où Jean-Jacques m’annonçait qu’il arrêtait les disques et la scène et retraçait l’ensemble de sa carrière), mais aussi d’anecdotes et de confidences…
C’est un projet que je nourrissais depuis 1991 et dont les médias ont annoncé prématurément la sortie en 2005. Sa gestation aura demandé dix ans de plus : c’est en 2015 que j’ai décidé d’aller au bout de mon rêve, un an avant que JJG ne choisisse de son côté de tourner aussi la page des Enfoirés…“.
A aucun moment de sa (longue) rédaction, JJG n’a cherché à intervenir sur le contenu : “GOLDMAN CONFIDENTIEL est donc un livre “autorisé” par l’intéressé – parce que c’est lui, parce que c’est moi… – qu’il n’a pourtant pas souhaité car il n’aspire plus qu’à l’anonymat et au silence des médias. Mais je n’avais d’autre choix, et Jean-Jacques le sait, que d’aller au bout de mon rêve…”.
TABLE RONDE AVEC JJG, SOUCHON, CABREL ET YVES SIMON
Ce livre consacré à un des auteurs-compositeurs-interprètes les plus importants de l’espace francophone fait évidemment la part belle aux nombreuses chansons (connues ou non) de JJG. Nombre d’entre elles distillent des références de la vie de l’artiste et/ou de sa famille…
Et s’il est évident que la chanson est au cœur de cet ouvrage, il n’y est pas uniquement question des titres ayant contribué à la population de JJG.
Dans le chapitre “Juste quelques hommes”, Alain Souchon, Francis Cabrel, Yves Simon et JJG – les quatre parrains de Chorus- s’expriment à bâtons rompus sur divers sujets liés à la chanson, au rôle des médias, à “la composition du public et à l’incidence des salles sur la conception du spectacle”, etc.
Et aussi le rôle de la critique.
Ce qu’en attend JJG ? ” C’est d’apprendre ce qu’il y a dans ce disque, s’il y a des chansons lentes, des rapides, comment est faite l’orchestration, de quoi parlent les textes, qui a fait quoi, etc. Ensuite si le critique veut ajouter quatre lignes de son propre goût, libre à lui si ça le défoule, il peut dire qu’il aime ou qu’il n’aime pas, qu’il adore ou qu’il exècre, mais ça ce n’est pas très important.
Ce dont on a besoin, c’est essentiellement d’informations, ensuite on achètera le disque et on est assez grand pour avoir notre propre opinion sans chercher à l’imposer aux autres… (…) Or la critique d’aujourd’hui ce n’est que ça : des billets d’humeur, et pas d’information”.
“OUI, TON PARCOURS MÉRITAIT BIEN “TANT DE PAPIER, DE TEMPS”
CONFIDENTIEL bénéficie aussi de sept pages de repères bibliographiques et autant pour la “discographie originale” … ainsi qu’un “index qui se limite aux seules personnes ayant un lien direct ou indirect avec la vie personnelle ou professionnelle de Jean-Jacques Goldman, ainsi qu’aux artistes, aux groupes artistiques ou personnages cités par lui”.
De quoi vous clarifier bien des détails du parcours de cet artiste dont Fred Hidalgo cite une des phrases les plus connues : “Les chansons sont souvent plus belles que ceux qui les chantent”. Une évidence PLUS QUE JAMAIS d’actualité chez bien des artistes …
Précisons enfin qu’il a un mois a paru un autre livre de Fred Hidalgo dont la sortie a failli ne jamais avoir lieu !
“Trop important, trop gros, trop cher à la fabrication, avec un lectorat impossible à cerner, nous ne saurons pas vendre un tel livre, ni dans le commerce ni auprès des médias… » : telle avait été la réponse de l’éditeur auquel Fred Hidalgo avait proposé en 2015 le manuscrit de “La mémoire du chante – Journal d’un échanson”.
Assurément deux livres de poids, à tous les sens du terme, pour nourrir votre passion de la chanson … si tel est votre souhait !
En guise de conclusion, laissons le dernier mot à Fred Hidalgo. Son livre-événement s’achève par une série de remerciements. Avec au final un mot adressé à JJG en ces termes :
“Merci enfin à toi, Jean-Jacques … et surtout pardon pour m’être montré, au moins sur un point (!), en total désaccord avec toi : oui, ton parcours méritait bien “tant de papier, de temps” ! Et non, je ne regrette rien.”
Site des Éditions L’Archipel … où l’on peut découvrir le prologue et le premier chapitre de l’ouvrage pour se mettre en appétit en cliquant sur TÉLÉCHARGER UN EXTRAIT.
C’est fait ! “Sous mon chapeau”, le nouvel album de l’auteur-compositeur-interprète Eric Frasiak vient (enfin) de sortir en ce mois de novembre 2016.
Une quinzaine de musiciens et choristes a participé à ce nouvel opus de 15 chansons, dont une en duo avec Jérémie Bossone, enregistré au Crocodile Studio de Bar le Duc. Et comme dans les deux derniers albums, Frasiak reprend, dans un arrangement original, une chanson emblématique de Léo Ferré : “La solitude”.
En attendant de vous présenter cet album, voici un article de Henry Tilly consacré à un des récents concerts frasiakiens”, celui du 6 novembre 2016.
Dans les Montagnes d’Auvergne, au lieu-dit Sauterre, à une poignée de kilomètres de Riom, sur la D 50, se niche un gîte chaleureux doublé d’un café-concert, “Le Soleil” alias « l’Arthé-Café » dont le renom grossit d’année en année.
Rien d’étonnant quand on voit la collection impressionnante d’affiches dédicacées des artistes invités qui y passent et, pour certains, repassent au fil du temps. Le moins que l’on puisse en dire, c’est qu’il y a “du beau linge.
Un couple exceptionnel, connu et reconnu dans les festivals comme Barjac et quelques autres, règne sur les lieux. Il a tricoté une ambiance d’accueil et de complicité chaleureuse, tant avec le public, souvent constitué de « connaisseurs » fidélisés, qu’avec les artistes qui, de leur côté, retrouvent ici certains de leurs fans que les kilomètres n’effraient pas et rencontrent aussi un public nouveau.
DÉMARCHE MILITANTE AU SERVICE DE LA “CHANSON FRANCOPHONE”
Maï et Marc Usclade (en photo ci-dessus avec Frasiak) sont manifestement dans une démarche militante au service de la “chanson francophone”. Et ils portent à bout de bras, avec une compétence et une énergie remarquables, ce “temple” de la “chanson de proximité”, comme dirait notre ami Michel Trihoreau.
Ce soir, dimanche 6 novembre, l’invité c’est Frasiak. LE Eric Frasiak, cet auteur-compositeur-interprète Lorrain que j’ai découvert à St-Pierre et Miquelon, en 2011, aux “Déferlantes Atlantiques.
Il m’y a tout bonnement “estomaqué” d’emblée par la qualité de ses textes et de ses compositions mais aussi par sa présence scénique et l’homogénéité donc l’authenticité qui émane de l’homme et de ses chansons. Chacune raconte une histoire et, à l’instar de ceux qui ont été ses Maîtres, François Béranger ou Léo Ferré, chaque histoire peut être un coup de cœur ou un coup de dent.
Rien qui éructe ou vocifère mais bien au contraire, tout témoigne d’un esprit éclairé qui porte sur le monde et les hommes un regard parfois moqueur, ironique, voire satirique, au besoin mordant parce que lucide mais aussi et souvent tendre, fraternel, ce regard qui se traduit dans ses textes par un humanisme sincère, authentique mais sans ostentation, sans surcharges, ce qui le rend hautement crédible et potentiellement contagieux.
UNE PRÉSENCE SCÉNIQUE EXCEPTIONNELLE
Hé oui ! C’est tout cela Eric Frasiak, F.R.A.S.I.A.K. donc avec un S et “surtout pas de Z à mon nom !… sinon je vous frite”.
Je l’ai donc découvert en concerts à St-Pierre puis à Miquelon, en solo guitare où j’ai pu remarquer, à l’occasion, (cf. chroniques “Déferlantes Atlantiques” sur www.francomag.com), que derrière l’auteur de talent se cachait un musicien solide. Doté, de surcroît, d’une présence scénique exceptionnelle qui n’est sans doute pas pour rien dans la contagiosité de son humanisme.
Dans le même temps, j’ai découvert l’album “Parlons-nous” sorti en 2009, album où Eric est entouré d’une formation très étoffée de solides musiciens travaillant sur ses arrangements.
Les superbes chansons de cet album, rehaussées, de plus, par cette orchestration, présentaient, chacune, toutes les qualités pour devenir des “tubes” comme on dit dans le monde du “show bizz”.
Mais ce monde-là précisément n’aime pas que le grand public accède à autre chose que ce qui sort de ses “élevages en batterie”. Et c’est bien pour cela qu’il se protège en “phagocytant” toute la télévision et toutes les radios, ne concédant, non sans réticence, quelques molécules de liberté de programmation qu’à quelques radios locales FM.
Philippe Meyer, sur France Inter, dans la seule vraie émission subsistant encore, dédiée à la vraie chanson francophone, a bien programmé deux chansons de Frasiak. Mais ça ne se reproduira plus ; son émission est supprimée. Ah mais !…
Donc, place aux “play-lists” concoctées par des programmateurs, beaucoup plus soucieux des intérêts des “poulaillers d’acajou” que de la valeur artistique des “œufs” pondus par les volailles de l’élevage, fabriquant de toutes pièces des “hits parades”, comme autant de référendums pipés, trichant effrontément avec la loi sur les quotas en considérant comme francophone une chanson en anglais pourvu qu’elle soit chantée par un français.
Ainsi, par cette acrobatie, David Guetta entre tranquillement dans le quota de la chanson francophone !!!!….et ce n’est qu’un exemple…
CETTE CHANSON-LÀ S’EXPRIMERA TOUJOURS, AU BESOIN, DANS DES LIEUX CONFIDENTIELS VOIRE CLANDESTINS
Mais ne nous laissons pas emporter par la colère au risque de nous éloigner du sujet de ce soir.
De toute façon, comme l’explique fort bien Michel Trihoreau dans son ouvrage “La Chanson de Proximité” (Éditions l’Harmattan), cette vraie, cette belle chanson que nous aimons tant, à toutes époques, celle qui dit notre vie, nos joies, nos peines, nos révoltes, qui défie les “pouvoirs”, les raille, les fustige, crie à tous instants notre soif de liberté, à commencer par la liberté de pensée et d’expression, cette chanson-là s’exprimera toujours, au besoin dans des lieux confidentiels, voire clandestins.
L’histoire, fort bien exposée par M. Trihoreau, le prouve et, pour ainsi dire chassée des grands médias audio-visuels pour faire place à des “spécialistes” autoproclamés et à leurs protégés-obligés, cette chanson, cette poésie, chantée ou non, se retrouve dans des lieux plus modestes …
Mais beaucoup plus chaleureux que la télé ou les grandes salles, des lieux, aussi, beaucoup plus propices aux rencontres et échanges entre artistes et public, des lieux où, presqu’immanquablement, après le spectacle, on va, comme à l’Arthé-Café, comme dans un “Chant’Appart », casser la croûte ensemble et amorcer une “3ème mi-temps”.
Mais n’allons pas trop vite.
Ce soir, Eric, en plus de quelques chansons issues des opus précédents, nous présente un florilège de ses nouveaux titres que nous pourrons réentendre dans le prochain album, “Sous mon Chapeau”.
Encore un chapelet de perles rares que l’on n’est pas prêts d’oublier. Des textes ciselés, précis, saisissants, pénétrants, et toujours portés par un écrin mélodique joliment cousu main.
Certains artistes, même parmi les meilleurs, peuvent donner un vague sentiment de monotonie tant reviennent trop régulièrement les mêmes thèmes ou des mélodies trop semblables.
Chez Frasiak, pas de risque. Chaque chanson dessine un tableau complètement différent et les mélodies sont toutes originales et colorées de genres musicaux très variés et d’arrangements superbes.
Eric ne se jette jamais sur l’actualité pour surfer sur le “buzz”.
Même quand celle-ci l’émeut au plus haut point, il prend du recul et elle n’apparaît dans son œuvre qu’avec un certain décalage.
Chez lui pas de débordements, de hurlements, de pathos. Il n’est pas dans la “posture” et son message, car c’en est un, n’est jamais une proclamation ou un mot d’ordre.
Eric pourrait légitimement se revendiquer “héritier” de son “Maître à chanter” François Béranger, tout comme ce dernier était naturellement un héritier de son si cher Félix Leclerc.
Et quand il entonne cet hommage à ce maître qui a nourri toute son adolescence, l’émotion nous serre irrésistiblement la gorge car, comme dans toutes ses chansons et dans celle-ci plus encore, on ne peut plus douter de l’authenticité de l’homme et de la force des sentiments qui l’habitent.
AVEC LA COMPLICITÉ DE l’EXCELLENT GUITARISTE JEAN-PIERRE FARA
Vous l’aurez compris, avec cet artiste-là, si la “dégustation” d’un album est un moment de plaisir intense, un concert est nécessairement un énorme moment de bonheur.
Frasiak, outre la qualité et la profondeur de ses chansons, est aussi , sans exubérance, un véritable homme de scène, rempli d’humour et jouant admirablement, dans ce registre aussi, avec la complicité de son excellent guitariste, le fidèle Jean-Pierre Fara qu’Eric, guitariste lui-même, présente comme son “bras droit”. C’est bien ainsi qu’on peut le voir mais pour le régal de tous, un bras droit équipé d’une fabuleuse main gauche.
Ces artiste-là sont généreux et nous ont gratifiés d’un concert de deux heures (hors entracte). Deux heures que nous n’avons pas vu passer, faut-il le dire et pendant ce temps, la montagne d’Auvergne nous tricotait la surprise de saison.
A la sortie, on se serait cru dans les Laurentides, au Canada. Tout était blanc, bien blanc et l’Arthé-Café avait l’air d’une “cabane à sucre” dans ce décor.
Ceux qui n’habitaient pas trop loin sont partis après la “soupe”.
Les plus éloignés, dont nous, sont restés dîner et dormir au gîte, non sans avoir, avec Eric et Jean-Pierre, sacrifié jusque bien tard, à la ” 3ème mi-temps” en chansons.
TEXTE HENRY TILLY
PHOTOS FRANÇOISE TILLY
A DÉCOUVRIR LES ÉMISSIONS “LA CHANSON DANS TOUS SES ÉTATS”
Coup de projecteur sur deux concerts de Jofroi et Claude Vallières accueillis les 4 et 5 novembre 2016 par le Petit Théâtre de Québec, dans la ville de Québec.
Mis sur pied par Manon Gagnon sous l’égide de Notre Sentier Production, ce double événement a suscité un article de Richard Baillargeon.
Un programme double, qu’est-ce qu’on en dit ? – Claude Vallières et Jofroi à Québec -
C’est un peu pour répondre à cette interrogation de Sylvain Lelièvre que je suis allé à la rencontre de deux «hommes qui chantent» en fin de semaine dernière.
Le Petit théâtre de Québec, sympathique salle nouvellement ouverte rue St-Vallier ouest, à l’entrée du quartier St-Sauveur de notre Capitale, accueillait Claude Vallières – un gars du voisinage – et Jofroi, de Cabiac un petit village occitan du Gard.
Ces deux artisans des mots composent et livrent leurs propos un peu à la façon des troubadours, sans décor, armés d’une simple guitare, comme on le faisait encore il y a quelques décennies.
Pour les gens du Québec, l’image évoquée est celle de la boîte à chanson typique. Pas qu’on y soit nostalgique: les relations humaines, le travail, la paternité, les recettes de cuisine… sont toujours d’actualité. Il est simplement relaxant d’en parler, et d’en entendre parler directement, sans les artifices qui accompagnent souvent les rimeurs contemporains.
Du reste chacun des personnages invités a sa façon propre et distincte de présenter ses observations et ses réflexions à la ronde.
Claude Vallières a le profil de l’artiste polyvalent qui revient toujours à la chanson, et de plus en plus sérieusement depuis le début du siècle alors qu’il s’est joint au groupe a capella La Bande magnétik, puis grave un premier album solo “Souffle” en 2011.
De son expérience ‘akapelliste’ il a gardé le goût des sonorités libres, pour la simple beauté des sons. Pensons à «…Célakifaukalaye» ou à “Rosa rosit”.
C’est aussi un tendre qui se demande “Combien d’enfants s’ennuient” et n’a que de bons mots pour sa “Grande chum”.
Jofroi n’est pas inconnu à Québec, par les bons soins notamment du vieux routier Pierre Jobin ou de la jeune maison de production Notre Sentier qui a justement initié les deux soirées des 4 et 5 novembre au Petit théâtre.
Dès son entrée sur scène, on ressent la douce assurance du gars qui en a vu beaucoup et qui n’en apprécie pas moins la nature humaine. Son récital intitulé «Bonjour les humains!» a quelque chose de stimulant malgré certains constats plutôt pénibles.
Comment expliquer en effet qu’après l’écoute de “Si ce n’était manque d’amour”, “Petit père” ou “Dire qu’on a marché sur la lune” on ait tout de même envie de répandre un peu de beauté alentour. À la veille d’un scrutin étrange, on se remémore soudain un «Yes, we can».
Il y a un mot pour ça: le charisme. Et Jofroi n’en manque pas !
Texte Richard Baillargeon
Photos Isabelle Howard
“MERCI AU PETIT THÉÂTRE DE QUÉBEC D’AVOIR REÇU
DANS CE LIEU MAGNIFIQUE LA CHANSON D’AUTEUR”
Suite à ces deux concerts, voici la réaction de Manon Gagnon parue sur sa page Facebook et reproduite ici dans son intégralité.
« …La chanson dite marginale, car les sentiers de buissons et d’épines ont des cheminements profonds que l’autoroute ignore. »
(Extrait d’une dédicace de Claude Nougaro à Fred Hidalgo pour les 10 ans de Paroles & Musique en 1991.)
L’industrie musicale est difficilement accessible aux artistes de la chanson vivante. Celle-ci mérite pourtant d’être reconnue à sa juste valeur, ayant un rôle primordial à jouer dans la préservation et le développement de la langue française.
Je suis d’une grande reconnaissance envers les artistes Claude Vallières et Jofroi qui ont offert des prestations de grande qualité. Ils ont coloré de poésie et réchauffé notre mois de novembre.
Je remercie Stéphane-Antoine Comtois et Isabelle Howard du Petit Théâtre de Québec d’avoir reçu dans ce lieu magnifique la chanson d’auteur. Merci à votre soutien et accueil chaleureux. Les lieux accueillants la chanson d’auteur étant si rares.
Je remercie Paulette Dufour Communications, Denys Lelièvre de CKRL, Tanya Beaumont de CKRL, Christine Borello de CKIA, Richard Baillargeon de Québec Info Musique, Albert Weber de Planète Francophone, Klody Tremblay, Martin Lavoie & Ginette Dulac d’Espace Martin-Lavoie, Michel Leclerc de la Maison des Leclerc…
Je remercie les amoureux de la Chanson, les curieux, les esprits ouverts, les amoureux de la langue française, les passionnés de la poésie, les artistes soutenant leurs collègues artistes, mes amies et amis, etc”.
Une vingtaine de titres offerts en près d’une heure et demie à près d’une quarantaine de personnes, quelques anecdotes de papa-chanteur, une exceptionnelle qualité d’écoute, un de ces rappels qui vous donnent la chair de poule …
Et puis après le concert de quoi boire et manger salé-sucré à volonté ! Les spectateurs si attentifs sont aussi de gros pourvoyeurs de boissons alcoolisées ou non, de gâteaux, de cannelés, de charcuterie, de fromages, de tartes, et la liste est loin d’être exhaustive !
Retour sur la dernière édition de “Chansons en chaussons” : ma 3ème soirée québécoise sous la véranda de Luc et Sylvie Renaud à Beaucourt.
Oui, quel privilège de vivre cette nouvelle édition de “Chansons en chaussons” !
Après les concerts de Geneviève Morissette et puis Moran accompagné par Thomas Carbou, place à un autre univers québécois.
Stéphane Côté ? Un de mes artistes québécois préférés, comme déjà dit et répété ici et là tant pour son répertoire que ses qualités humaines, son bon sens, un certain art de vivre et puis aussi des valeurs qui surgissent ici et là au gré des refrains.
Plantons d’abord de l’ambiance.
Nous sommes mardi 18 octobre au domicile des Renaud. Il est presque 19h45 et on attend les inévitables retardataires.
Mais tout va bien, personne n’est stressé.
On prend le temps de bavarder, de faire connaissance, de découvrir “La mémoire qui chante”, le nouveau livre de Fred Hidalgo dédicacé par l’auteur aux hôtes de ce soir … de feuilleter Hexagone, la nouvelle revue lancée par David Desremaux et une poignée de passionnés aussi talentueux qu’audacieux vu la situation de la presse écrite et notamment de la presse spécialisée.
Bon, ça y est, tout le monde est en place.
Luc Renaud s’avance, avec en main le 1er numéro de Hexagone, qu’il va présenter à l’auditoire en évoquant aussi le souvenir du trimestriel Chorus, ajoutant avant que des bulletins d’abonnements sont à disposition.
Le temps d’indiquer que ce nouveau trimestriel publie entre autres un article sur Melissmell programmé le 4 novembre novembre à la Maison pour Tous/ Foyer Georges Brassens à Beaucourt. Assurément un haut-lieu de la chanson qui vient d’entamer sa 40ème saison, sous la présidence de Luc Renaud.
“JE NE M’ATTENDAIS PAS A UN ENDROIT AUSSI CHOUETTE”
Un mot encore de Luc de saluer la présence l’artiste peintre suisse Roland Schaller venu à Beaucourt comme ami … et chauffeur de Stéphane Côté.
Et c’est parti pour un voyage signé Stéphane Côté qui entame le concert avec “Semaine”, un des titres de l’album “Le cirque du temps”.
Le temps de saluer l’assistance : “Je suis content d’être ici à travers cette petite tournée en Suisse et de faire une incursion en France. Ça me fait beaucoup plaisir … je ne m’attendais pas à un endroit aussi chouette, à voir une si belle gang aussi remplie que ça ici ce soir “.
… et c’est reparti avec “Ballon d’héliHomme”puis “Des nouvelles”! Soit en tout près d’une vingtaine de chansons extraites de ses quatre albums parus en un coffret de 48 titres sorti en 2014.
TORCHONS, GUENILLES ET NOMS PERDUS
Seul à la guitare, à la fois très concentré et en même temps très décontracté, l’auteur-compositeur-interprète québécois colore Beaucourt avec des couleurs aux diverses facettes : parfois gris-clair, jamais tout à fait rose ni entièrement noir.
Chansons teintées d’amour et de bonheur, de souvenirs aussi (“Les noms perdus”) … de remises en question aussi, parfois inspirés d’expressions québécoises pleine de bon sens comme “Fais toi en pas mon p’tit gars, chaque torchon finit toujours pas trouver sa guenille”. De quoi inspirer son célèbre “Torchon” extrait du 1er album sorti en 2001 “Rue des balivernes”
Ici chaque mot est ciselé avec soin. Pas de verbiage ni de laconisme exacerbé non plus. Juste des mots simples et intenses, qui racontent nos vies entre errances et espoirs, mélancolie et coups de soleil. Des textes sans effets larmoyants pour susciter une artificielle émotion.
PAPA-CHANTEUR AUX ANECDOTES DRÔLES ET ÉMOUVANTES
Cette simplicité, elle jaillit ici et là on ne s’y attend pas, notamment dans l’évocation d’anecdotes familiale qui suscitent sourire et rire. Et aussi émotion : “Papa je ne pleure pas parce que j’ai de la peine, je pleure parce que j’ai de la joie” : réaction de sa fille un soir après lui avoir chanté, à sa demande, “Rouge, Rose”, chanson inspirée par les couleurs préférées de son enfant.
Changement de style pour “Tu dis”, la chanson inspirée par son fils aux surprenantes expressions : “”Il faudrait déchauffer la soupe”, J’ai failli dérouler l’escalier”, “Je te trouve très photo-hygiénique, ” “Regarde, papa, le monsieur se fait pleurer les yeux”.
PAS ASSEZ CONNU AU QUÉBEC, DE PLUS EN PLUS APPRÉCIÉ EN EUROPE
Évidemment, les chansons de Stéphane Côté ne vous entraîneront pas sur les pistes de danse à grands coups de synthétiseurs et autres rythmiques débridées.
Alors, bien sûr, quand on revendique d’être un artisan à tous les sens du terme, on n’est pas certain de retenir l’attention des grands médias de son pays.
Car il faut bien le reconnaître, artisan dans l’écriture de ses chansons, il l’est aussi dans la réalisation de ses albums introuvables dans les grands circuits de distribution.
Et si ce concert à domicile a lieu en ce mois d’octobre Beaucourt, c’est grâce à une série de passerelles tant amicales qu’artistiques tissées au-delà des continents entre Manon Gagnon, créatrice de Notre Sentier Production et Gestion Evénementielle, et Luc et Sylvie Renaud.
UN DERNIER “RENDEZ-VOUS” ET “LONGUE VIE A CHACUN DE VOUS”
Voici une quinzaine d’années que Stéphane Côté chante régulièrement en France, Suisse et Belgique comme il l’a rappelé entre deux titres de ce concert également marqué par “Il neige”, juste avant un éclatant rappel …. pour un dernier “Rendez-vous” achevé en beauté dans un remarquable silence du public enthousiaste par la dernière chanson de la soirée, “Longue vie”.
Tonnerre d’applaudissements avant que les chaises ne soient pas rangées pour partager le verre de l’amitié.
Le temps aussi pour Stéphane Côté de dédicacer des albums, de discuter à bâtons rompus avec plusieurs personnes, de poser guitare à main en compagnie de telle ou telle personne.
Retrouver Stéphane Côté et Roland Schaller aura été une grande joie. Une belle occasion également d’évoquer hier, aujourd’hui et SURTOUT demain, entre projet discographique de l’un et prochaines expositions de l’autre.
De prendre le temps de parler en toute franchise de l’alarmante situation d’une certaine chanson québécoise de plus en plus oubliée, ignorée, méprisée des “grands médias”.
Mais pas question de baisser les bras, Stéphane Côté est du genre artisan déterminé. Sans aucun doute un obstiné coureur de fond dans ce monde de la chanson au fonctionnement humain et financier de plus en plus déroutant, inquiétant.
D’où l’importance plus vitale que jamais de ce que j’appelle ces indispensables lieux de résistance face à la mondialisation et la con-sommation… comme ces concerts sous la véranda de Beaucourt qui a jusqu’à présent également accueilli le groupe Yules, les Soeurs Boulay et Eric Frasiak.
Prochaine date, lundi 13 mars avec un autre talent québécois: Benoît Paradis Trio, “entre chanson, jazz et humour” comme indiqué avec enthousiasme par Luc Renaud.
En attendant de finir de lire et de vous parler de “Rock Sakay”, premier roman d’Emmanuel Genvrin revu en juillet dernier à l’île de la Réunion, voici un efficace coup de projecteur de Geoffroy Géraud Legros et Nathalie Valentine Legros.
Leur texte abondamment illustré est mis en valeur sur 7LAMESLAMER , site partenaire de planetefrancophone.fr que ces deux amis journalistes réunionnais ont lancé pour parler des “réalités émergentes de la Réunion, de l’Océan Indien et du Monde”.
« Rock Sakay », c’est une course aux allures initiatiques, sur les traces d’une chimère appelée Janis.
« Rock Sakay », c’est le premier roman d’Emmanuel Genvrin, déglingué et poétique. « 7 Lames la Mer » aime !
Ensorcelante et monstrueuse. Telle est Janis, femme sortie tout droit de « Rock Sakay ».
Premier roman d’Emmanuel Genvrin — créateur du théâtre Vollard, auteur de nombreuses pièces et d’opéras —, « Rock Sakay », publié chez Gallimard, a partagé la fameuse « rentrée littéraire » française [1] avec 559 autres nouveautés [2].
Avant de plonger dans le chaudron romanesque, Emmanuel Genvrin s’est essayé à l’exercice exigeant de la nouvelle, publiant régulièrement dans la revue littéraire « Kanyar », éditée par le regretté André Pangrani. Autant de récits où « Rock Sakay » pointe déjà — peut-être, d’ailleurs, à l’insu de l’auteur.
Jean-Luc Trulès (debout), musicien, compositeur, chanteur, acteur… et Emmanuel Genvrin, auteur du roman “Rock Sakay”, créateur du théâtre Vollard.
Jalon de la re-naissance de Genvrin qui, pas moins « gazé » que ses personnages, s’est mis en tête de donner à La Réunion un complet répertoire d’Opéra, « Rock Sakay » accouche de l’héroïne qui manquait au Panthéon, singulièrement dépeuplé, des figures de notre littérature : Janis.
De la beauté truculente à la silhouette diaphane, « Janis-femme » incarne l’hybris, la jubilation, la superficialité, la déraison ; l’affirmation de sa réalité et la « régression-résignation » animale et vertigineuse ; le Maître et l’Esclave, dirait un hégélien, dans la même personne.
« Il franchirent la porte de derrière. Il y avait une petite cour et un boucan — la cuisine en plein air des créoles — et, au fond, un parc cochon. L’homme sortit de sa poche un trousseau qu’il tendit à Jimi »…
(Page 122)
Fantasque, tumultueuse. Envahissante, évanescente ; absente. Dévoreuse, amante : Janis hante ce roman de son urgence haletante.
Dès les premières pages et jusqu’à la dernière, elle est là, partout, même et surtout lorsqu’elle n’est pas là…
Le lecteur, dans sa nuit, tourne les pages du livre pour retrouver sa trace dans le dédale de la capitale malgache ou à travers la brumeuse campagne française.
Démerde, dérives, gangs… « Rock Sakay » n’est pas un lagon pacifique. Les Tropiques de Genvrin sont aux antipodes des tristes topiques de l’imagerie touristique ; « Rock Sakay », éclaire le versant hardcore et « Kung Fu » et révèle les subtils et invisibles transferts d’exotisme entre les trottoirs de Paris, le foyer Sonacotra et les châteaux provinciaux…
Le rythme est vif ; il n’en délivre pas moins le spleen qui accompagne l’œuvre de l’auteur de la pièce de théâtre « Baudelaire au Paradis ».
« Pas de temps à perdre »… L’écrivain est pressé, comme son personnage Jimi : vite, vite, vivre et retrouver Janis. Vite, l’aimer. Encore. Et s’en défaire. Vite, s’enfuir. Vivre pour la retrouver. Pour la sauver. Vite, vivre et l’oublier.
« Il était 15 heures. Pas de temps à perdre. Une grosse averse avait provoqué des inondations. Le ciel était encore lourd de nuages et les trottoirs étaient boueux. Inutile de héler un taxi, les tarifs de Tana étaient prohibitifs. Avec la pénurie d’essence, on payait d’avance et les chauffeurs remplissaient des petites bouteilles aux stations ».
(Page 47)
Cimetière des pirates sur l’île Sainte-Marie (Madagascar). Photo : Antony.
L’écriture d’Emmanuel Genvrin, savamment dépouillée, affutée, projette des images directes et entêtantes, souvent empreintes d’une forte charge poétique.
Comme dans cette scène…
« En quittant les lieux, Jimi se retourna : Janis se tenait debout sur les marches, immobile, les bras ballants, les cheveux rouges au vent. Son front était plissé, son regard était d’une tristesse infinie ».
(Page 173)
Avant cette description, Janis était le feu, la pluie, la boue, l’amour.
Ainsi tombe-t-on sous l’emprise de cette héroïne, fêlée, qui nous convie à contempler sa chute, irrésistible.
Emmanuel Genvrin à la Sakay
Signe d’un roman d’aventures réussi : on voudrait protéger Janis, l’arracher à ses turpitudes, la sauver d’elle même. La ramener à son commencement, à son innocence, alors même qu’on acquiert la certitude de sa déchéance.
On souffle lorsque Janis disparaît du champ de lecture.… Mais déjà, elle nous manque ; déjà on est en manque.
Et l’on voudrait que les permanents aller-retours de Jimi qui rythment ce roman entre La Réunion, La France et Madagascar, la remettent sur notre chemin de lecture.
Source : vollard.com
Le personnage de Janis confirme l’attrait de l’auteur pour les caractères féminins hors orbite sociale ; et son talent à les mettre en scène, à les sublimer. Pour finalement les ramener à leur condition initiale.
On se souvient par exemple de cette cantatrice extravagante et si émouvante, figure centrale — et cataclysmique — de la nouvelle « Tropic Salomé » [3], écrite en 2015 par Emmanuel Genvrin et publiée dans la renue « Kanyar ».
« Rock Sakay », c’est une histoire d’amour, une histoire actuelle et déglinguée qui nous renvoie aux grandes tragédies classiques.
« Rock Sakay », c’est un road-book comme il y a des road-movies : poussière rouge, rencontres, errances, galères, drames… Départs et éternels retours.
Mais Janis n’est pas le personnage principal de « Rock Sakay ». Non. Le héros avec sa guitare, c’est Jimi (enfin… Francius). On ne vous en dira pas plus : prenez, et lisez.
« Jimi retourna en stop à la Pointe-au-Sel. De loin, il vit que la villa était fermée, volets clos, terrasse abandonnée. la petite plage était déserte, à part un chien jaune endormi et la silhouette d’un pêcheur sur un rocher ».
(Page 143)
Nathalie Valentine Legros et Geoffroy Géraud Legros
[1] La « rentrée littéraire », au mois de septembre est une spécificité française.
[2] En 2010, 711 livres ont été publiés à l’occasion de la rentrée littéraire.
[3] « Tropic Salomé » est une nouvelle écrite par Emmanuel Genvrin et publiée dans la revue littéraire « Kanyar » N°4, page 7, février 2015. La revue « Kanyar » a été créée par André Pangrani, mort le 31 juillet 2016 à Moscou.
Question du jour : comment endormir les enfants ? Vaste interrogation sans aucun doute que nous avons tous connue, vécue, subie … en tant qu’anciens enfants ou comme parents !
Et si le remède-miracle venait d’un CD de 55 minutes et d’un livre aux expressifs dessins signés Soufie et au titre des plus encourageants : “Tous au lit !’ ‘
Vous souriez ? Alors laissez-moi vous expliquer.
Le déclic de cette aventure artistique est né d’un constat, d’une évidence. “Dans 99,99 % des foyers, l’heure du coucher qui souvent vire au cauchemar”.
Hé oui, comme elle sait (très) bien de quoi elle parle, Valérie Bour a fait travailler autant son imagination que ses souvenirs.
D’où cette histoire écrite avec la complicité de Marianne James … oui la chanteuse-musicienne-comédienne-humoriste-animatrice de télé … et notamment inoubliable créatrice de personnages hauts en couleurs tels Ulrika von Glott, la diva allemande plutôt déjantée ou bien Miss Carpenter, l’actrice hollywoodienne en quête de rôle.
Et la voici dans un autre rôle, celui de Tatie Jambon qui doit user et abuser de force stratagèmes pour endormir les enfants interprétés par Léonie et Adrien Buffet. Pas facile d’arriver à ses fins malgré les interventions tour à tour rassurantes et drôles, douces et exaspérées de cette tatie qui ne manque ni de bagout ni de suggestions : des histoires de princesses au yoga, en passant par le défilé de moutons voire l’hypnose !
11 CHANSONS POUR TROUVER LE SOMMEIL
Tatie Jambon; Douce lumière; Il était une fois; Le yoga du rire; Le chant des baleines; Les Hommes; Cher Mouton; Tout coton; Viens dans la voiture; Le temps des grands; Le musée amusé …
L’invitation au sommeil est déclinée en une douzaine de titres aux accents slow, rock, bossa, avec un zeste d’ambiance tropicale et des clins d’oeil aux sixties … entrecoupés par les interventions de Tatie Jambon Figure de proue médiatique de cette aventure, Marianne James y est entourée d’une joyeuse bande de musiciens unie par des liens amicaux et familiaux.
Les textes de Valérie Bour sont mis en musique par Sébastien Buffet et Philippe Bégin, réalisateurs et arrangeurs du CD …. Et également en studio pour interpréter un gardien de la paix (“Viens dans la voiture”) et le “gardien du musée amusé”.
Les deux compères participent aussi à l’album comme musiciens, en compagnie de Stéphane Chausse, Didier Havet, Didier Perrin … sans oublier Valérie Bour pour “les sabots de cheval” !
Certes, ce “conte musical à dormir debout” bénéficie de l’extravertie personnalité d’une Marianne James, très convaincante comme Tatie Jambon à la fois idéale et farfelue. Mais il résulte aussi d’une sacrée complicité dans laquelle s’est glissée l’auteur-compositeur-interprète Romain Lemire dans le surprenant personnage de “Charles-François Tremblay du Badelaine” !
Marianne James et Sébastien Buffet
EFFICACE ALCHIMIE AVEC ENTRAIN ET HUMOUR
Plusieurs créateurs-auteurs-musiciens-artistes mobilisés autour de “Tous au lit” se sont retrouvés l’an dernier pour une autre aventure également destinée au jeune public : “un conte musical au coeur des océans” réunissant Marianne James, Jacques Gamblin, Kent, Agnès Jaoui, etc. Voir article sur Les symphonies subaquatiques.
“Tous au lit !”, c’est le symbole d’une efficace alchimie entre imagination et talent, avec beaucoup d’entrain et d’humour aussi, le tout saupoudré de bon sens.
Mention spéciale au livret de 36 pages qui ne se contente pas de reproduire les paroles des chansons illustrées par l’imaginative Soufie.
S’y glissent en fin d’ouvrage quelques questions à lancer aux enfants qui ne dorment pas : pourquoi ronfle-t-on ? Pourquoi baille-t-on ? Combien de temps peut-on tenir sans dormir ? Qu’est-ce que le somnambulisme ? A quoi servent les rêves ?
Et si jamais vous n’avez toujours pas réussi à endormir vos enfants, rendez-vous sur la page voisine avec diverses expressions sur le sommeil à associer à une liste de huit mots ou expressions à compléter du genre : Tomber dans les bras de ? Ou bien “Comme on fait son lit” …
Bref vous l’aurez compris. Avec “Tous au lit!” paru aux Éditions des Braques il y a de quoi écouter et lire, chanter aussi … et même se creuser un peu les méninges avant de trouver ENFIN le sommeil. Assurément une authentique réussite artistique à partager avec des enfants .. de tous âges si le cœur vous en dit.
Créateur du Musée de la Photographie de l’Ile Maurice , Tristan Bréville ne se contente pas de rester dans le bâtiment du 18ème siècle qui abrite les incroyables collections.
Des collections sur lesquelles il veille avec sa femme Marie-Noëlle et leurs deux enfants, Marie-Julie et Frederick, tous mobilisés en ce mercredi 5 octobre pour l’inauguration d’une exposition de photos célébrant les 50 ans du musée.
Que d’obstacles surmontés depuis le musée installé dans le petit appartement à Quatre-Bornes !
ENVIRONNEMENT, PATRIMOINE, CULTURE …
Tristan et Marie-Noëlle Bréville, citoyens engagés ? Assurément et la 3ème partie de ce (très long) dossier consacré au musée en témoigne avec force.
OUI, Engagés sans retenue et avec énergie en faveur de l’Environnement, du Patrimoine, de la Culture d’une Ile Maurice authentique et fière de ses racines, de son identité.
Autant de repères que j’ai eu la chance de découvrir en sa compagnie depuis plusieurs décennies, grâce à une amitié de 39 ans née durant nos reportages effectués ensemble à travers l’ile Maurice dès l’automne 1977.
Je débutais alors dans le journalisme, en tant que coopérant sur cette île de l’océan Indien, à l’hebdomadaire La Vie Catholique. Et je découvrais une terre d’autant plus attachante que je m’aventurais dans sa vie quotidien e en compagnie d’un photographe mauricien des plus passionnés.
A cette époque, le musée de la photo aujourd’hui installé rue du Vieux Conseil se trouvait alors dans un petit appartement de Quatre-Bornes !
BESOIN ET ENVIE DE TÉMOIGNER
Voici quelques photos parmi d’autres prises ici et là à l’île Maurice. Appareil en bandoulière ou au poing, Tristan Bréville continue plus que jamais à prendre des photos. En toutes circonstances publiques et privées.
Histoire d’immortaliser l’instant présent, de laisser des traces.
Toujours le besoin et l’envie de sauver de l’indifférence et de l’oubli. De TÉMOIGNER simplement.
ENTRE COUPS DE CŒUR ET COUPS DE GUEULE
Ce 3ème et dernier volet du dossier comportent aussi quelques unes des tribunes libres signés Tristan Bréville dans la presse mauricienne au gré de divers événements.
Quelques coups de cœur et coups de gueule textes publiés en qualité d’attentif observateur d’une société mauricienne qui l’interpelle. D’où son envie et son besoin de réagir, de critiquer ou de féliciter.
Surtout pas pour donner des leçons mais tout simplement pour être un citoyen engagé.
Après un premier article sur l’histoire du musée créé par Tristan et Marie-Noëlle Bréville, coup de projecteur sur une (petite) sélection d’articles parus dans la presse mauricienne, réunionnaise et ailleurs.
Entretiens, comptes-rendus, articles de fond … De quoi mieux connaitre l’Histoire de ce musée familial unique dans l’océan Indien qui célèbre ses 50 ans d’existence en ce mois d’octobre 2016.
Et cette revue de presse débute avec “LE PANACHE ET LES GANACHES”, un des articles les plus marquants de tous ceux qui j’ai lu sur Tristan et Marie-Noëlle Brévile.
Un long texte signé G. Michel Ducasse dans Week-End (dimanche 18 mai 1997) et paru à l’occasion du “Cafouillage autour d’une contestation” à propos du “Comité pour la préservation du Musée de la Photographie”.
“Il était une fois un homme qui croyait que la mémoire photographique de son pays était aussi importante que l’Histoire. Aidé de sa femme, , il avait, des années durant, fouillé les coins et recoins de vieilles maisons, à la recherche de photos du temps lontan, demandant aux gens qui voulaient se débarrasser de leurs vieux clichés de ne pas jeter à la poubelle tout un pan de notre mémoire collective
Bonne promenade à travers ces articles qui témoignent d’une Histoire souvent mouvementée d’un Musée qui mérite sans aucun doute à être encore mieux connu, mieux respecté par les autorités. Et aussi mieux soutenu par les Mauriciens.