AZNAVOUR, BRASSENS, FERRAT, LAVILLIERS : AU COEUR DE LA CHANSON DE PROXIMITE

En juillet 2009  disparaissait la revue “Chorus les cahiers de la chanson”, laissant un grand vide auprès de celles et ceux qui depuis des années suivaient de (très) près l’actualité de la chanson francophone. Ici et là ont surgi des blogs et webmagazines lancés par d’anciens membres de la rédaction de ce trimestriel. Histoire de reprendre le flambeau d’une autre manière, via internet. D’où cet article paru le 21 décembre 2010 sur le site www.francomag.com

Et voici que trois journalistes de l’équipe créée et animée par Fred Hidalgo publient chacun un livre de référence. D’où ce coup de projecteur destiné à mettre en évidence trois ouvrages très différents tant sur la forme que le fond, et cependant unis par une passion commune : la chanson.

Embarquement immédiat avec Michel Kemper (“Les vies liées de Lavilliers”, Flammarion) ; Daniel Pantchenko, (“Jean Ferrat. Je ne chante pas pour passer le temps”, Fayard) ; Michel Trihoreau auteur de deux ouvrages : “La chanson de proximité. Caveaux, cabarets et autres petits lieux” , Editions de L’Harmattan, et “Rencontres”, Editions du Petit Véhicule, un recueil de nouvelles enracinées dans le répertoire de Georges Brassens.

 

Michel Kemper, auteur de la bio de Bernard Lavilliers

Michel Kemper, auteur de la bio de Bernard Lavilliers

Commençons par Les vies liées de Lavilliers, une décapante bio signée Michel Kemper, originaire de Saint-Etienne comme le chanteur. Avec en guise d’introduction,une question lancée à l’intéressé par la Québécoise Monique Giroux lors d’un entretien le 9 janvier 2005 au micro de Radio-Canada.

 ” Bernard Lavilliers, on a dit des tas de choses sur votre parcours, sur ce que vous aviez fait. Et j’ai envie, pendant que je vous ai devant moi, de vous demander le vrai du faux. On a dit que vous aviez été fugueur, pensionnaire d’une maison de correction, tourneur, comédien, boxeur, camionneur, patron de boites de nuit, directeur d’une école de variétés … on a dit beaucoup de choses, dites-moi tout “.

Et le chanteur d’affirmer : “C’est simple, j’ai cinquante-huit ans donc j’ai fait tout ça, successivement. Et des fois en même temps. Donc j’ai plusieurs vies à la fois, ce qui fait qu’effectivement, parfois quand je compte, j’ai l’impression d’avoir déjà deux à trois fois plus que mon âge. J’ai souvent fait deux métiers parallèles, oui. Et je trouve que c’est intéressant parce que la création se trouve justement à l’intersection des deux, souvent”.

Cet échange radiophonique en dit long sur l’incroyable aventure dans laquelle s’est lancée l’obstiné Michel Kemper.Son projet, c’était d’écrire une bio avec et sur Lavilliers, et en septembre 2004 le chanteur avait donné son accord par l’intermédiaire de son manager.

Cet accord tombera à l’eau début octobre 2006 par décision de celui qui est né en octobre 1946 à Saint-Etienne : “C’est là qu’est né aussi le mystère Lavilliers, soigneusement entretenu tant par l’artiste que par le cercle familial. Là également que réside l’auteur de ces lignes”.

“Un des personnages les plus captivants que la chanson ait jamais enfanté”

 

Une bio extrêmement fouillée de 387 pages

Une bio extrêmement fouillée de 387 pages

Ce livre, c’est l’étonnante histoire de Bernard Ouillon devenu Bernard Lavilliers. Et Michel Kemper d’expliquer ainsi la démarche qui a guidé la rédaction de cette biographie : “Toujours avec infiniment de respect envers l’artiste et l’ensemble des témoins, jamais pour le plaisir d’écorner une légende. Dans l’objectif unique de mieux comprendre une œuvre majeure que la légende a nourri à l’envie”.

Au terme de plusieurs années d’entretiens, de lectures, d’écoutes répétées de son répertoire, d’informations vérifiées à multiples reprises auprès de plusieurs interlocuteurs, Kemper brosse ici le fascinant portrait “d’un des personnages les plus captivants que la chanson ait jamais enfanté” selon son expression.

 Au fil des chapitres, on marche fidèlement dans les pas de Lavilliers, depuis l’enfance. Et on découvre notamment ses dix années de vaches enragées dans le 5ème arrondissement parisien et les petits lieux de la rue Mouffetard avant que la carrière ne décolle enfin.

Le Stéphanois ; Les poètes ; Paris, redingote de plomb ; La manche ; Arrêt sur image ; Entrée des artistes ; Etat d’urgence ; Outremer ; Mémoires particulières; Les mains d’or ; A suivre : en dix chapitres, Kemper se livre à une étonnante radiographie de la vie de Lavilliers, dont nombre de chansons témoigne justement de ce destin hors du commun. Oui, un destin assurément hors-du-commun où tout n’est pas à prendre au pied de la lettre dans la vie de l’artiste, entre France et Amérique Latine, entre affirmations et faits.

Ici tout a été vérifié, recoupé, lu et relu avec une extrême rigueur dans cette bio aux nombreuses anecdotes qui en disent long sur le chanteur doté d’une imagination débordante tant pour la présentation des étapes successives de sa vie publique et personnelle que les textes de ses chansons.

Le chapitre “Mémoires particulières” est particulièrement instructif. Et Kemper d’expliquer : “Or, si l’ensemble de sa production – qu’on peut sans mal qualifier d’œuvre – est du pur Lavilliers, force est de constater au sein de celle-ci nombre de réminiscences, de ressemblances orphelines de toutes sources, voire de reconstructions… “.

“Lavilliers est de ceux qui savent exister par eux-mêmes, sans jamais s’inscrire dans ces moules réducteurs et destructeurs, qui font quelques disques et puis s’en vont”

Michel Kemper est aussi l'auteur Mes nuits de concerts sont plus belles que vos soirées télé (2002) et Mes nuits critques (2005),

Michel Kemper est aussi l’auteur Mes nuits de concerts sont plus belles que vos soirées télé (2002) et Mes nuits critiques (2005),

“Les vies liées de Lavilliers” mérite une lecture approfondie, même si l’on n’est pas (pas encore) familier de l’œuvre de celui que l’auteur qualifie d’ »institution nationale, un grand parmi les grands” : “Lavilliers est de ceux qui savent exister par eux-mêmes, sans jamais s’inscrire dans ces moules réducteurs et destructeurs, qui font quelques disques et puis s’en vont. Il ne ressemble à nul autre qu’à lui-même.

Ce qu’il a créé est unique, certes nourri d’influences parfois revendiquées, parfois tues, d’emprunts clamés tout haut ou dissimulés sans vergogne, assuré qu’il est peut-être en son for intérieur d’en avoir été le géniteur. Mais unique, ça oui. Il s’est mis au monde lui-même, se jurant un beau jour de créer un genre de chanson qui lui soit propre – il a réussi – et de l’illustrer par une légende aussi colorée que possible – il l’a fait”.

Et cet hommage signé Michel Kemper a le mérite de resituer Lavilliers à sa vraie place, celle d’un artiste incontournable dans la chanson d’expression française : “Il a rêvé une vie qu’il s’est ensuite appliqué à traduire dans les faits, fidèlement, rejoignant en cela la fine et belle équipe d’aventuriers-artistes, de bourlingueurs-écrivains, les Rimbaud et autres Cendrars, parmi lesquels il mérite sans nul doute d’occuper une juste et belle place”.

Dans la liste des remerciements d’une page et demie l’on trouve notamment “Fred et Mauricette Hidalgo qui ont encouragé ce projet depuis le début et apporté, le moment venu, leurs regards et conseils avisés”. En somme une passionnante plongée dans les coulisses d’un artiste des plus talentueux, dont on cerne ici mieux les zones d’ombres et de lumière. Avec en prime une discographie et une bibliographie ainsi qu’un index des titres de chansons citées.

“On porte son enfance toute sa vie. Je ne suis pas un cas unique, mais cette période a été très dramatique pour ma famille, pour moi et pour la France aussi”

 Seconde bio, celle de Daniel Pantchenko, autre pilier de la rédaction de feu Chorus auteur d’une récente biographie UNIQUE EN SON GENRE et des plus détaillées sur Anne Sylvestre dont nous parlerons ultérieurement.

En attendant, place à un ouvrage de référence, de 572 pages :” Jean Ferrat Je ne chante pas pour passer le temps”. Pour comprendre la genèse de ce livre, les circonstances dans lesquelles il a vu le jour, une série de précisions s’impose. Et elles sont offertes avec force détails sur le blog du créateur de Chorus, Fred Hidalgo. Lequel avait en effet depuis des années le projet d’écrire un ouvrage de référence sur Jean Ferrat : le projet sera finalement abandonné, et le flambeau transmis à Daniel Pantchenko.

Intitulé “Jean Ferrat, “la” bio” !”, ce long texte de Fred Hidalgo est illustré d’une photo (également publiée ici) de Francis Vernhet montrant Jean Ferrat en compagnie de Fred et Mauricette Hidalgo et Daniel Pantchenko. Les confidences de Fred Hidalgo constituent un indispensable témoignage : à lire afin de mieux cerner les origines et l’histoire de cette biographie unique à bien des égards. Texte à lire sur le blog Sicavouschante

Oui une bio unique à commencer par les premières années du petit Jean Tennebaum. D’où cet aveu de l’artiste reproduit par Pantchenko : « On porte son enfance toute sa vie. Je ne suis pas un cas unique, mais cette période a été très dramatique pour ma famille, pour moi et pour la France aussi. Il y a une partie de moi qui est devenue adulte très vite. Le racisme, le nazisme, je les ai découverts à onze ans. Je ne savais pas que mon père était juif ».

 

Festival de Barjac : Daniel Pantchenko aux côtés de Jean Ferrat au milieu de la foule. (Photo Samuel Fontayne).

Festival de Barjac : Daniel Pantchenko aux côtés de Jean Ferrat au milieu de la foule. (Photo Samuel Fontayne).

“Par ses mots, sa musique, et sa voix d’humanité profonde, Jean Ferrat a toujours été le chanteur qui me touche le plus, avec lequel je me trouve en accord maximal, tant sur la forme que le fond”

 

572 pages pour mieux comprendre l'homme et l'oeuvre

572 pages pour mieux comprendre l’homme et l’oeuvre

Fouillée, méticuleuse jusqu’aux moindres détails, l’enquête de Daniel Pantchenko situe avec force références la vie et l’oeuvre de Jean Ferrat dans le contexte historique national et international.

Et il entre dans les détails du destin de Tenenbaum devenu chanteur en tant que “Jean Laroche”, pseudonyme qu’il aurait sans doute gardé si la SACEM ne l’avait prévenu qu’il existait déjà un artiste portant ces prénom et nom.

“Alors en regardant la carte de France, j’ai mis longtemps à me décider; j’avais trouv d’autres pseudonymes qui étaient aussi de vrais noms et je suis tombé par hasard sur Saint-Jean Cap Ferrat. Ca sonnait bien, c’était clair, c’était court”.

Cette bio fait aussi la part belle aux témoignages.Pas seulement celles du milieu artistique comme Dominique A, Akhenaton, ou son ami Allain Leprest, mais aussi nombre d’approches plus personnelles, voire intimes : fille, nièces, neveu, amis proches, etc. Et aussi les anciens maires d’Ivry et Antraigues, puisque “pendant un demi-siècle, Jean Ferrat aura habité, vécu, agi dans deux communes très différentes, entre lesquelles il aura servi parfois de passerelle”.

Je ne chante pas pour passer le temps”», c’est le titre d’une chanson de Ferrat, et la retrouver ainsi sur la couverture témoigne du pari dans lequel s’est lancé le journaliste-écrivain. En témoignent aussi les pages consacrées au couple formé avec Christine Sèvres, aux amitiés avec Isabelle Aubret et Francesca Soleville par exemple.

Comprendre l’homme au-delà de l’oeuvre d’où émergent d’inoubliables titres tels Potemkine, La Montagne, Nuit et brouillard, Ma mome, etc : oui, un sacré défi a été relevé avec brio par Daniel Pantchenko. Un défi enraciné dans le constat suivant : “Par ses mots, sa musique, et sa voix d’humanité profonde, Jean Ferrat a toujours été le chanteur qui me touche le plus, avec lequel je me trouve en accord maximal, tant sur la forme que le fond”.

Autre atout de cet ouvrage, au-delà du regard porté sur cette existence entre enregistrements et scènes, engagements politiques et vie plus discrète en Ardèche : le recul pris par l’auteur dans les pages consacrées à l’après-Ferrat.Il y est question du raz-de marée suscité par l’annonce de sa disparition le 13 mars 2010 : “Du coup, entre sentiments authentiques et calculs d’arrière-boutique, les fleurs, les pleurs, les superlatifs déferlent de la presse écrite à Internet, et les personnalités en tout genre et de tout acabit y vont de leur petite phrase. Désormais tout le monde aime Ferrat. Entre quatre planches”.

Et grâce à l’enquête menée par Daniel Pantchenko, l’on apprend que Gérard Meys, son producteur, dispose de 45 chansons en réserve : “Je ne sais pas ce que je vais en faire (…). Je n’ai pas pu malheureusement le réaliser, mais j’avais l’intention de faire un disque spécial, un album “politique”.

 

Jean Ferrat en compagnie de Daniel Pantchenko à gauche, et Fred et Mauricette Hidalgo (Photo Francis Vernhet)

Jean Ferrat en compagnie de Daniel Pantchenko à gauche, et Fred et Mauricette Hidalgo (Photo Francis Vernhet)

“Toute la presse people voire trash avait bien compris qu’il y avait du cash à faire sur la dépouille encore fumante de celui qui ne leur avait encore jamais donné d’occasions réelles de l’exploiter à la une”

Daniel Pantchenko a mené à terme une biographie de Charles Aznavour qu'avait commencé à écrire Marc Robine décédé en août 2003

Daniel Pantchenko a mené à terme une biographie de Charles Aznavour: un ouvrage qu’avait commencé à écrire Marc Robine décédé en août 2003

Autre information qui retiendra l’attention de ceux qui apprécient l’homme et l’œuvre : Gérard Meys a un projet audiovisuel, puisqu’il a filmé Ferrat durant sept ans.

On n’a donné d’image à personne car à partir du moment où on avait tellement de problème avec la télévision, on a décidé d’être complètement indépendants, dès 1981. Même pour les émissions spéciales de Drucker, toutes les chansons sont à nous, en tant que producteur”.

Et Daniel Pantchenko de constater dans l’une des ses innombrables notes en fin de chapitre que “toute la presse people voire trash avait bien compris qu’il y avait du cash à faire sur la dépouille encore fumante de celui qui ne leur avait encore jamais donné d’occasions réelles de l’exploiter à la une”.  A noter que ce sera la première fois dans l’histoire de la télévision française que seront diffusées en direct les obsèques d’un chanteur.

Quatre parties forgent ce livre, à commencer par un préambule de deux chapitres : Le crépuscule de l’aube ; Une Môme et deux enfants ». S’en suivent trois autres parties : Jean Tenenbaum, Jean Ferrat, d’Antraigues. Et à chaque fin de chapitre, l’on découvre plusieurs pages de notes : autant de coups de projecteurs sur tel ou tel détail auquel l’auteur apporte un complément d’information.

Cet ouvrage de référence bénéficie notamment d’une liste des chanteurs cités dans le texte avec mention des pages ; d’une exhaustive discographie dont le premier enregistrement remonte à 1958, et de la référence de plusieurs sites internet.

A l’instar de Michel Kemper à la fin de sa bio sur Lavilliers, Daniel Pantchenko adresse aussi des remerciements aux fondateurs de Chorus : “Enfin, pour leur confiance renouvelée, merci à Fred et Mauricette Hidalgo, qui savent combien nous partageons la même passion de la chanson depuis tant d’années”.

Le dimanche 26 décembre 2010, Jean Ferrat aurait eu 80 ans. D’où ces propos de Daniel Pantchenko transmis en ce 23 décembre 2010 : “On a eu envie de lui retourner la chanson de 1991 qu’il avait dédiée à un ami disparu : “Tu aurais pu vivre”… […] La biographie que je lui ai consacrée constitue d’ores et déjà ce que l’on appelle « un succès de librairie », puisqu’en à peine trois mois, elle va “tranquillement” vers ses 25 000 exemplaires vendus, la quasi-totalité des grands médias (en particulier les radios et télés du service public) n’ayant pas pourtant – encore ? – jugé utile d’en parler”.

“Pour y avoir rencontré des publics curieux, attentifs, interrogatifs et des artistes aguerris ou débutants, gens généreux ou sévères qui m’ont tant appris de ce métier, je suis heureux de voir un livre qui chante ces petites scènes et leurs actes”

186 pages et une préface signée Allain Leprest

186 pages pour un ouvrage de référence dont la préface est signée Allain Leprest

Venons-en à présent au 3ème ouvrage de référence paru dans la collection Cabaret aux Editions L’Harmattan. Ici pas de bio mais un voyage dans le temps et dans l’espace en compagnie d’un guide hors-pair : Michel Trihoreau.

 En 186 pages, il nous entraine dans les coulisses de la vie d’artiste. Là où les caméras et les photographes sont, la plupart temps, absents. Là où bat le cœur de tous ces talents émergents qui s’affirment dans des conditions pas toujours évidentes d’un point de vue technique. Sous le titre « La chanson de proximité. Caveaux, cabarets et autres petits lieux », Trihoreau n’y va pas quatre chemins.

La chanson il la connait depuis des années, il l’aime depuis des années, et ses articles et dossiers historiques parus dans Chorus témoignent d’une rigueur et d’une passion à toute épreuve. D’où le beau texte teinté d’amitié placé en début du livre, avant que le lecteur ne remonte les siècles jusqu’à l’époque des châteaux, des troubadours et des rois de France.

Oui, la préface signée Allain Leprest donne le ton du livre. Un ton fraternel qui donne envie de plonger avec l’auteur dans ce passé si riche en espaces de créations : “L’ami Michel vient ici vous parler avec force détails et chaleur de ces espaces qui ont vu naître, germer, croître des voix qui vous sont familières aujourd’hui. De ces creusets, ces trouées qu’il nous faut observer comme d’énormes terrains en friche. Pour y avoir rencontre des publics curieux, attentifs, interrogatifs et des artistes aguerris ou débutants, gens généreux ou sévères qui m’ont tant appris de ce métier, je suis heureux de voir un livre qui chante ces petites scènes et leurs actes”.

 

Toutes les photos de Michel Trihoreau prises le 30 septembre 2010 à l'Espace L'Harmattan, à Paris  - ici avec Claude Fonfrède et Fred Hidalgo - sont signées Martine Ladagnous

Toutes les photos de Michel Trihoreau prises le 30 septembre 2010 à l’Espace L’Harmattan, à Paris – ici avec Claude Fonfrède et Fred Hidalgo – sont signées Martine Ladagnous

“La chanson s’adresse autant à l’intellect qu’à l’émotion. Elle doit être intelligible et avoir un sens”

Traces historiques ; Origines populaires ; Les cabarets de la première génération, D’une rive à l’autre ; l’âge d’or ; Le schisme ; L’éternel retour ; La proximité et l’humanité ; La révolution tranquille : tels sont les repères, les titres des grandes parties d’un document sans doute unique en son genre. On s’y promène de Montmartre au Quartier Latin, de Saint-Germain à Mouffetard, de Barjac à Artigues, en passant par le Chat Noir, le Limonaire et Le Lapin Agile, … et la liste est évidemment très loin d’être exhaustive.

Car Trihoreau ne se contente pas de retrouver la trace de tous ces petits lieux où ont poussé tant de talents qui ont, par la suite, rencontré le grand public. Il se livre aussi à nombre de réflexions et d’analyses sur l’essence même de la chanson.

La chanson s’adresse autant à l’intellect qu’à l’émotion. Elle doit être intelligible et avoir un sens. Il ne s’agit pas de ranger les genres dans des tiroirs bien étiquetés, mais de trouver des repères, pour clarifier et tenter de définir quelques pistes de réflexion qui éviteront des querelles vaines.

De multiples passages d’un genre à un autre sont possibles, l’essentiel est de savoir quel objectif est poursuivi. Est-on dans la culture ou dans le divertissement ? Pour avoir trop souvent opposé les deux genres, on a fini de façon démagogique ou intéressée, par évincer le premier. Sans nuance”.

 

De gauche à droite Christian Stalla (directeur de la collection Cabaret), Gilles Tcherniak (fils du patron du Cheval d'Or), Marc Chevalier (co-fondateur de l'Ecluse), Michel Trihoreau, et Ginette Marty, chanteuse et auteur

De gauche à droite Christian Stalla (directeur de la collection Cabaret), Gilles Tcherniak (fils du patron du Cheval d’Or), Marc Chevalier (co-fondateur de l’Ecluse), Michel Trihoreau, et Ginette Marty, chanteuse et auteur

“Dans cette période de profondes mutations, le support papier est en péril : il ne disparaitra pas, mais risque bien de fonctionner à deux vitesses”

Mihel Trihoreau est aussi l'auteur d'un essai sur l'oeuvre et la vie de Jacques Prévert paru en février 2006

Mihel Trihoreau est aussi l’auteur d’un essai sur l’oeuvre et la vie de Jacques Prévert paru en février 2006

Autre coup de projecteur, celui braqué sur la formule Chant’ Appart, en pays de Loire et bien au-delà aussi. A noter que la photo de la couverture met précisément en valeur cette manière de chanter dans un contexte où proximité et convivialité vont de pair.Et voilà comment l’on retrouve la chanteuse québécoise Fabiola Toupin face à un auditoire assis à quelques pas d’elle, debout à son micro.

“Aujourd’hui, considérer Chant’ Appart comme un simple festival serait une erreur par omission. C’est désormais un phénomène de société qui annonce des temps nouveaux dans le monde de la chanson. C’est un pari qui repose sur ce qu’il y a de meilleur dans l’humain : la convivialité, la citoyenneté, le dynamisme, la solidarité, la curiosité, la sensibilité, toutes ces qualités que certains croient en voie de disparition et qui ne demandent qu’à s’épanouir lorsque les circonstances le permettent. Tout ce qui fait le lien social que les politiques ne savent pas maintenir et que la communication d’entreprise détruit peu à peu”.

A propos de communication, Michel Trihoreau consacre aussi plusieurs pages aux médias qualifiés d’ “outils indispensables” : radios, télés, presse écrite, internet, etc.

“La presse est un outil essentiel pour permettre à la Chanson de se faire un connaître et s’exprimer. Malheureusement les journalistes de la presse quotidienne ne peuvent être des spécialistes de tout ce qu’ils traitent et doivent se contenter la plupart du temps de clichés rapides. Certaines revues musicales s’adressent en général à un public qui sait se satisfaire de la médiocrité. D’autres s’enferment dans une spécificité catégorielle autour d’un genre ou d’un instrument.

La chanson est victime de ces deux tendances, soit peopolisée, soit disséquée entre rock, folk, punk, reggae, guitare, accordéon et autres, jusqu’à l’apparition de la revue Chanson de Lucien Nicolas, dans les années 1970″.

Et Michel Trihoreau de consacrer une page au mensuel Paroles et Musique et au trimestriel Chorus nés respectivement à l’automne 1980 et en septembre 1992 et chaque victimes d’un “prédateur” selon son expression.

“Ayant eu la chance d’être de l’aventure de Paroles et Musique / Chorus, j’ai pu mesurer la formidable compétence de Fred et Mauricette Hidalgo et de l’ensemble de la rédaction travaillant de façon rigoureuse et pointue dans un domaine où il y a tant à faire”.

La disparition de ces revues et la création de divers blogs et webmagazines à l’initiative d’anciens journalistes de Chorus est-elle “une solution de rechange” ?” Selon l’auteur, “dans cette période de profondes mutations, le support papier est en péril : il ne disparaitra pas, mais risque bien de fonctionner à deux vitesses : ici, le jetable plus ou moins gratuit qui va à l’essentiel et s’adresse aux regards brefs par l’abondance d’images, et là le pavé, analytique et pointu, condamné malgré li à un élitisme marginal. Entre les deux pas de passerelle”.

“Remplacer le concert par une écoute devant l’écran relève de la plus pure consommation contradictoire avec l’approche active de l’artiste”

Marc Chevalier, co-fondateur de l'Ecluse et Michel Trihoreau

Marc Chevalier, co-fondateur de l’Ecluse et Michel Trihoreau

Certes – et Michel Trihoreau le reconnait volontiers – Internet bénéficie de nombreux atouts, à commencer par l’instantanéité et la proximité.

Comme si tout le monde se retrouvait sur le même plan d’égalité avec son site et ses infos mis en ligne et renouvelée en permanence : “C’est très démocratique : la star internationale côtoie sur la toile l’amateur passionné et lorsqu’on débarrasse l’essentiel des scories mégalomanes ou commerciales, on peut se faire une assez juste idée du travail de nombreux artistes”.

Tout cela est bien beau mais … virtuel ! “Remplacer le concert par une écoute devant l’écran relève de la plus pure consommation contradictoire avec l’approche active de l’artiste” souligne l’auteur.

D’où son appel lancé en fin de texte en faveur d’une chanson vraiment vivante, “ouverte à toutes les inclinaisons que l’imagination peut inventer. Il y a toujours un bistrot avec un type et une guitare ; un coin de fête avec des paroles et de la musique audibles à l’écart du vacarme ; ou une affiche avec un inconnu dans une petite salle, ce soir ou demain. Vous ne connaissez pas ?

Prenez le risque, ça ne peut pas être pire que ce qu’on vous oblige à entendre et puis c’est vivant, c’est un être humain qui vous donne un peu de son âme. Et quand c’est bon, c’est un moment de magie qui vous fait penser au bonheur”.

“C’est l’art subtil de Trihoreau de redonner vie et conscience à ces inconnus qui ont traversé un jour un poème en forme de chanson”

Un recueil de 25 nouvelles et une photo de Brassens du Sétois Jimmy Rague.

Un recueil de 25 nouvelles et une photo de Brassens prise par le Sétois Jimmy Rague.

A noter enfin que Michel Trihoreau est aussi l’auteur de « renCONTrES » paru dans la collection « le Carré de l’imaginaire » aux Editions du Petit Véhicule. En l’occurrence un recueil – vraiment original – de 25 nouvelles dont tous les personnages sont authentiques.

Et l’auteur de préciser : “Seuls les noms, les lieux, les dates et les faits ont été changés. Tous se sont échappés des chansons de Georges Brassens. Celui-ci aimait trop la liberté pour ne pas autoriser ses personnages à s’évader (…) Je vous les confie. Apprenez à les reconnaître. Retrouvez dans leurs récits les chansons où ils sont nés.

Prenez garde, ils ne sont pas tous beaux, pauvres et sympathiques, ils sont comme vous et moi, ni meilleurs ni pires, la vie leur a donné leur lot de joies et de misères, inégales et injustes. Nourrissez-les de votre imagination afin qu’ils vivent longtemps et qu’ils aient encore beaucoup à raconter”.

En 87 pages, Michel Trihoreau donne libre cours à son imagination, chacune de ses nouvelles prenant des allures de passerelle vers une chanson de Tonton Georges : Brave Margot ; La maitresse d’école ; La fille à cent sous ; L’orage; Je suis un voyou; Hécatombe, La chasse aux papillons, etc.

C’est l’art subtil de Trihoreau de redonner vie et conscience à ces inconnus qui ont traversé un jour un poème en forme de chanson, le petit joueur de flûte, Tonton Nestor, le pauvre Martin, Pénélope et bien d’autres… L’émotion nous assaille mais l’humour n’est pas loin ; C’est dans l’un de ces récits que l’on retrouve les amoureux des bancs publics devenu un vieux couple désuni “.

Cet extrait de la préface de Paul-René Di Nitto donne le ton de ce beau livre illustré par des dessins de Cathy Beauvallet, fondatrice d’une “Ecole de Communication Visuelle”.

 Laissez tenter par les livres de Michel Kemper, Daniel Pantchenko et Michel Trihoreau !

Nous voici parvenus au terme de ce voyage au cœur d’une chanson mise en évidence par trois anciennes plumes de Chorus. L’esprit Chorus – entre information et commentaire, rigueur et précision – n’est pas mort ; ces quatre livres auraient sans aucun doute mérité un article spécifique pour chacun d’entre eux. Espérons que les coups de projecteurs braqués à tour de rôle sur chaque ouvrage vous donnera envie d’en savoir plus.

Et surtout n’hésitez pas à vous faire plaisir. A vous laisser tenter par les livres de Michel Kemper, Daniel Pantchenko et Michel Trihoreau.

Autant de p’tits trésors qui méritent d’être découverts, appréciés à leur juste valeur. En prenant tout votre temps pour flaner dans les coulisses du monde de la chanson : un univers fascinant et paradoxal qui ne se résume pas – loin s’en faut – aux émissions de variétés télévisées et aux tubes entendus (écoutés?) sur la bande FM. D’où le talent de ces trois auteurs qui ne se sont pas contentés des apparences, se lancant dans des aventures éditoriales de longue haleine.

Pour chacun d’entre eux, il aura fallu plusieurs années pour arriver au terme de son enquête. Voir de sa quête car consacrer autant de temps à un manuscrit, c’est évidemment signe d’obstination et de passion. Et cela mérite le respect.

Michel Kemper, Les vies liées de Lavilliers, Flammarion, 387 pages, 20 euros
Daniel Pantchenko, Jean Ferrat. Je ne chante pas pour passer le temps, Fayard, 568 pages, 20,90 euros
Michel Trihoreau, La chanson de proximité. Caveaux, cabarets et autres petits lieux, L’Harmattan, 186 pages, 18 euros
Michel Trihoreau et Cathy Beauvallet, Rencontres, Editions du Petit Véhicule, 88 pages, 18 euros.
A découvrir aussi les trois auteurs sur internetb[Sites Internet ou blogs à visiter :

- Michel Kemper : Nos Enchanteurs
- Daniel Pantchenko :Pantchenko
et son blog chansonsquetoutcela
- Michel Trihoreau : Chanson de Proximité et Rencontres avec Brassens

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QUEBEC/ STEPHANE COTE : “Ballon d’héliHomme”, un album MAJEUR de la chanson québécoise

Soyons francs, la question mérite d’être posée sans détours : pour quelles raisons Stéphane Côté n’est-il pas plus connu du grand public, aussi bien au Québec qu’en France ? Textes ciselées, mélodies douces-amères et cependant accrocheuses mais sans effets spéciaux, univers à la hauteur des exigences de cet attachant auteur-compositeur-interprète. Autant d’incontestables atouts mis en évidence via ses trois premiers opus : Rue des Balivernes (2001), Le cirque du temps (2006) et Des nouvelles (2009).

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Un incomparable  homme-orchestre nommé Eric Goulet

Et voici Ballon d’héliHomme, 4ème album de cet auteur-compositeur-interprète québécois de 42 ans : 12 nouvelles chansons plus que jamais à la mesure d’un talent affirmé avec constance tant en studio que sur scène. Sans doute l’album de la maturité.

Travail d’orfèvre ? Assurément tant sur le fond que la forme grâce à une complicité sans failles entre le chanteur-guitariste et cet incomparable  homme-orchestre nommé Eric Goulet : guitare, basse, claviers, harmonica, banjo, percussions … et choriste ! Lequel assure aussi – avec brio – réalisation, arrangements et direction musicale de cet album synonyme de réussite au sens fort du terme.  Sans oublier l’efficace et discret Vincent Carré à la batterie.

C’est dire l’importance de la poignée de talents réunis pour cet opus dont la direction artistique et la coordination sont signées Marie Bujold. Cette production de François-José Brouillette (Bleu Plume) est à découvrir de toute urgence, et je pèse mes mots.  Tous deux  sont longuement remerciés – parmi nombre d’autres professionnels – sur la pochette intérieure de l’album avec en guise de conclusion “une pensée pour Bruno”…

La chanson québécoise s’exprime ici avec une intensité qui devrait retenir l’attention de tout (authentique) passionné de chanson francophone. Car au-delà des textes et des refrains signés Stéphane Côté, une évidence s’impose : l’incontestable qualité apportée à cet album dont les guitares acoustiques offrent un incontestable plus comme dans le réaliste “En attendant l’hécatombe” :

“Le désert s’allonge un peu dans tous les sens

Avec du recul on songe qu’on avance

Quand le sable doux nous conduit à l’errance

On cherche un caillou pour s’accrocher la chance “

En duo avec Brigitte Saint-Aubin et Linda Lemay

S’y glissent deux duos où les choses de la vie sont évoquées avec lucidité. Comme si le temps était le maître absolu de toute destin, qu’on le subisse ou qu’on tente de le maîtriser. Le duo avec Linda Lemay, “Au large de nous”, nous entraîne dans une ambiance teintée de tendresse et de réalisme : histoire d’une relation qui se délite inexorablement :

“Que se lève la tempête un immense ouragan

Qu’il emporte ce qu’il reste de nous

Pour un ultime naufrage pour trouver le courage

De revivre  enfin seuls libre et debout”

L’autre duo enregistré avec Brigitte Saint-Aubin souligne avec justesse la difficulté de s’apprivoiser, de franchir le pas, de maîtriser le temps qu’exige une vraie relation à deux :

“C’est vrai qu’il y  a de l’attraction

Entre nous deux

Que même à la télévision

Ils ne font pas mieux

Que même sans se voir on se perd

Dans le labyrinthe de nos yeux

On a peut-être ce qu’il faut pour se plaire”

PF STEPHANE COTE NEIGE stephane_cote-283-329

Un chanteur québécois aux chansons de portée internationale par ses sources d’inspiration

Sensibilité, bon sens et clairvoyance

Difficile d’extraire “une chanson préférée” parmi la douzaine qui compose cet opus. Osons tout de même le défi en mettons en relief “Couleur de mélodie”, qui symbolise avec justesse le pari relevé tout au long de cet album par cet ACI québécois.

Chaque chanson de cet album permet à Stéphane Côté d’exprimer une sensibilité, un bon sens et une clairvoyance sur les êtres et la société qui n’a rien de superficiel ou de mièvre. Un album – reflet d’un répertoire qui ne cesse de ne bonifier au fil des ans, au gré des concerts au Québec, en France … et aussi en Suisse aussi où “Ballon d’héliHomme” a bénéficié d’un lancement à l’instar de celui de Montréal et de Québec (Espace Félix Leclerc,  Ile d’Orléans).

Ballon d’héliHomme résulte de la complicité d’une poignée de professionnels mobilisés pour un album dont l’écoute répétée permet – à chaque fois – d’en découvrir de nouveaux aspects. Un de ces enregistrements qui vous donnent assurément envie d’y revenir, par exemple en se déplaçant en voiture. Histoire de se laisser embarquer dans un univers où rien n’est figé d’avance, où la ligne entre lumière et obscurité n’est pas toujours perceptible. Où les paroles affirmées avec conviction sont, parfois, moins importantes que les non-dits, les émotions suggérées à mots couverts.

Une chanson d’expression  française évidemment, teintée ici et là d’accents folk et country qui en rehaussent l’impact

Cet album n’a rien à voir avec celui d’un chansonnier québécois des fameuses boîtes à chanson d’antan s’accompagnant seul à la guitare. Il s’inscrit dans une double dynamique, tant au niveau des paroles, avec des textes sans doute encore plus personnels que sur les trois précédents opus. Mais aussi au niveau de ses couleurs musicales : une chanson d’expression  française évidemment, teintée ici et là d’accents folk et country qui en rehaussent l’impact.

Que de chemin parcouru avec obstination et talent par Stéphane Côté 1996, lorsqu’il se retrouve en demi-finale au Festival international de la chanson de Granby ! Et oui, il est plus que temps qu’il trouve enfin sa place parmi les créateurs majeurs d’une chanson québécoise à la fois grand public et de qualité. Une chanson qui refuse à la fois l’élitisme pour intellos heureux de (sur) vivre dans leur ghetto branché … mais aussi une certaine facilité dans les paroles et la musique à l’instar de ces voix que la foule adore le temps d’une mode. Des voix souvent synonymes d’étoiles filantes certes fascinantes et attirantes mais si éphémères, dans la plupart des cas.

Par ailleurs auteur de trois chansons sur “Si fragile univers”,  le nouvel album de Lina Boudreau, Stéphane Côté dispose de tout ce qu’un artiste de son expérience a besoin pour ENFIN franchir une nouvelle étape. En l’occurrence celle qui le fera connaître d’un plus grand nombre de personnes, des deux côtés de l’Atlantique.

Mais encore faut-il que les « grands médias » et les radios-télévisions offrent une réelle visibilité à cet album enraciné dans un vécu québécois (“Il neige”) et cependant de portée internationale de par son inspiration à multiples facettes.

PF STEPHANE COTE steph_banc_750dpi

Un album enraciné dans un vécu québécois (“Il neige”) et cependant de portée internationale de par son inspiration à multiples facettes

Des mots simples qui font tilt et interpellent tant le coeur que la raison

Le talent de Côté, c’est de raconter les choses de la vie avec des mots simples qui font tilt et interpellent tant le coeur que la raison.  Avec en prime une diction sans failles qui permet de savourer chaque mot de chaque chanson et une voix qui fait parfois – au gré de diverses intonations et d’un certain phrasé – penser à celle du chanteur du groupe québécois Les cowboys Fringants … et vice-versa.

Peintre d’un quotidien entre réalisme et  espoirs, avec des envies d’utopies et de rêves, Stéphane Côté cultive aussi des élans de fraternité, tout en affichant le droit à conserver la faculté de s’émerveiller …  comme dans la superbe chanson “Une lettre” :

“J’écrirai une lettre  à ceux qui grandiront

Qui suivront les courants

Pour leur dire en cachette que l’enfance a raison

Qu’après on désapprend”

PF STEPHANE COTE SONGEUR stephane_cote-28729

Les photos de cet article ainsi que du nouvel opus de Stéphane Côté sont signées Karolanne Roy

Stéphane Côté, Ballon d’héliHomme, 12 titres, 38 minutes et 25 secondes. Productions Bleu Plume


 

TRIBUNE LIBRE/ NORBERT GABRIEL : CHANTER LA LANGUE DE CHEZ NOUS ..

Bienvenue à NORBERT GABRIEL pour cette tribune Libre intitulée “CHANTER LA LANGUE DE CHEZ NOUS”.

Norbert Gabriel est un des co-fondateurs du blog du Doigt dans l’Oeil et membre de la rédaction du site de Michel Kemper, Nos enchanteurs, L’Autre Chanson : deux des sites mentionnés dans notre rubrique “En lien avec ..”

“La chanson est l’expression la plus authentiquement populaire. Le seul art qui soit resté près de ses sources. Un des rares où toutes les valeurs Qulturelles (avec un Q soit mises échec).

(…) Piaf et Brassens étaient aussi des parias de l’éducation. Tout comme Gershwin et Django Reinhardt. La pauvreté du bagage scolaire n’a jamais empêché qui que ce soit de chanter.

Un aphone inculte, par sa seule sensibilité, peut émouvoir. Mieux que la voix ou le cerveau les plus cultivés”.

PF MOUSTAKI  recadré

Ces lignes sont de Georges Moustaki, “Questions à la chanson 1973″. Elles sont d’une pertinence éternelle. Dans le débat qui revient régulièrement à la une des interrogations existentielles sur la chanson à texte, ou la chanson « pas à texte », on ergote sur le fait que la bonne chanson se doit d’être forcément dans la langue de chez nous. Qu’on soit bantou, auvergnat, alsacien, patagon ou brésilien, hors du langage natal, pas de salut. Peut-être. Ou peut-être pas.

Il y a parfois des mystères qui nous dépassent. Je connais assez bien quelqu’un qui a été élevé au bel canto, l’opéra à la TSF, ou dans l’atelier de mon grand-père, Luis Mariano ou Caruso dans la cuisine-salon-salle à manger, et qui un jour, vers 13-14 ans a découvert “Fleuve profond” une émission qui racontait le negro-spiritual, un choc émotionnel d’une intensité inouïe, c’était quelque chose que je ressentais comme si c’était en moi depuis toujours. Sans comprendre le sens des mots, je percevais bien le sens de la musique, et la force du propos.

Ce n’est pas pour autant que j’ai balancé à la poubelle Bécaud et “mes mains qui dessinent dans le soir la forme d’un espoir qui ressemble à ton corps” ou Brassens, Marie-Josée Neuville, ou Brel, ou Félix Leclerc, eux qui me parlaient avec

“cette langue belle à qui sait la défendre.
Elle offre les trésors de richesses infinies
Les mots qui nous manquaient pour pouvoir nous comprendre
Et la force qu’il faut pour vivre en harmonie”.

Il n’était plus question d’ergoter sur le bien-fondé de l’imparfait du subjonctif et des beautés de Ronsard ou Malherbe dans leur écriture, la chanson était devenue un formidable générateur d’émotions, portées par des voix, des voix venues de partout

C’est pas seulement ma voix qui chante
C’est l’autre voix, une foule de voix
Voix d’aujourd’hui ou d’autrefois
Des voix marrantes, ensoleillées
Désespérées, émerveillées
Voix déchirantes et brisées
Voix souriantes et affolées
Folles de douleur et de gaieté

et qu’elles chantent en slang, en argot, en russe ou en patois javanais, quand il y a une émotion qui passe, pas besoin de sous-titres.

C’est pourquoi, avec ma pile en vrac jamais rangée, à côté de la chaîne, avec Ferrat, Jacques Yvart, Elisabeth Wiener, Higelin, Pagani, Pauline Julien et Anne Sylvestre, Pierre Barouh, une partie de ceux qui sont là depuis plus de 20 ans, il y a aussi Melody Gardot, Madeleine Peyroux, Alela Diane, Vissotski, qui ne sont pas tout à fait francophones, mais qui me racontent des histoires. Comme Serge Utgé-Royo, dont tout le répertoire est inspiré d’une histoire, celle des exilés.

Et de tous les exilés finalement. Utgé-Royo m’a fait comprendre une chose que je n’avais pas vraiment cernée, c’est la qualité de son écriture dans une langue parfaitement maîtrisée qui crée cette addiction à cette forme de chanson qui raconte. Elle est “à texte”, bien sûr, mais ce n’est pas toujours suffisant. Il faut le fond et la perfection de la forme pour ne pas casser la magie par une rime hasardeuse, qui me ferait décrocher.

Il y a des interprètes ou auteurs qui essaient de me raconter des histoires, mais quand j’entends “le soleil-le dans le ciel-le, sur le port-re…” je peux pas. Et il y aussi “un mirador-re” pour achever le tableau. Bien que la voix soit belle, la mélodie réussie, ça ne passe…

Et je suis beaucoup plus touché par la voix de Léonard Cohen, celle de Billie Holiday, ou celle de Lou Doillon récemment, entendue en aveugle à la radio. Sans pré annonce, ni quoi que ce soit. Sans image glamour, la voix, l’expression vocale, quelque chose qui émeut, c’est tout. Le fait que ce soit en français, n’est pas une garantie d’extase textuelle. Sinon les rappeurs seraient en orgasme perpétuel avec leurs rimes appuyées et scandées en mode marteau piqueur.

Durant des années, “My gypsy wife” de Léonard Cohen m’a bouleversé sans que je n’aie jamais eu envie de chercher la traduction. Une fêlure dans la voix, un écho de violon.

Il est sûr que je suis souvent devant les scènes françaises, celles de Louis Ville, Agnès Debord, Valérie Mischler, Bernard Joyet, et celles et ceux des Lundis de la chanson, n’empêche que Chappel Hill m’a envoyé dans les nuages un peu comme The Doors ou Johnny Cash. Mais pas Presley … Sorry Elvis, t’as une belle voix mais ça ne me raconte pas grand chose.

Le travers qui se répand chez les néo french rockers babillant en anglais canada dry, est en effet préoccupant, c’est vide, c’est creux, c’est sans intérêt. Mais ça peut faire gigoter en buvant une bière, et en discutant avec les copains.

Aujourd’hui, tout le monde se fait un point d’honneur de reprendre les chansons de Leprest… Pourquoi pas ? Il n’y a pas tant de maîtres dans ce domaine, mais combien savent vraiment apporter quelque chose de neuf, de mieux que l’original ? Ce qui vaut aussi pour les adaptations qui émigrent, mais c’est un autre débat.

J’aime assez le parcours de Louis Ville, qui a fait du rock en anglais, et qui s’est mis à écrire en français pour être plus précis et riche dans ce qu’il voulait partager. “Cinémas, cinémas” c’est de la chanson qui raconte, qui a du sens et du son. Une chanson dont Pierre Dac aurait dit: “Pour bien comprendre les gens, le mieux est d’écouter ce qu’ils disent”. Bien sûr qu’on comprend mieux quand c’est la langue de chez nous.

Que ce soit une langue belle et riche, personne ne devrait contester ce fait Que la chanson soit un art populaire, c’est aussi une évidence. Mais la musique est aussi un langage universel, sans frontières, qui s’enrichit de métissages heureux, et qui s’appauvrit quand des néo-rockers babillent des insignifiances en anglais, parce que c’est tendance, et que ça se “dance”… Comme “La danse des canards”, c’est dansant, et français.

Mais il ne suffit pas non plus que ce soit en français pour avoir un label de qualité systématique. Genre vu dans “Nos Enchanteurs” qui ne serait qu’Only French, mais si on y chante plus souvent dans la trace de Jehan Rictus ou Gaston Couté, et leurs descendants que dans celle d’Eric Morena ou de Chantal Goya, ce serait dommage de se priver d’Elisabeth Caumont, cervantesque princesse Micomiconne qui explore avec bonheur les espaces ellingtoniens ou ceux de Chet Baker.

Et irait-on se priver aussi de Paco Ibanez ou Angélique Ionatos parce qu’ils ne chantent pas qu’en français ?

Peut-être que ça se discute, c’est un point de vue qu’on peut ne pas partager. Peut-être que c’est un crime de lèse majesté de saluer un album qui ne parle pas français.

Mais j’ai du mal à limiter mes enchantements au format hexagonal quand je peux avoir le monde entier à découvrir.

“Le monde ouvert à ma fenêtre… ” a toujours des airs balladins à découvrir, on n’est jamais à l’abri d’une bonne nouvelle.

Norbert Gabriel

Tu me diras que j’ai tort ou raison,
Ça ne me fera pas changer de chanson,
Je te la donne comme elle est,
Tu pourras en faire ce qu’il te plaît.
Et pourtant dans le monde
D’autres voix me répondent
Et pourtant dans le monde…

Bande son

Pour le langage universel de la chanson, voici l’archétype de la réussite, avec images si on veut, ce serait dommage de se priver d’Elisabeth Masse, mais la première fois, c’était sans autres images que celle générées par la voix de Louis Ville …

http://video.mytaratata.com/video/iLyROoafzmlS.html

“The gypsy wife” avec commentaire de Leonard Cohen (From the record: Field Commander Cohen. Tour of 1979 (Sony Music ent. Columbia. 501225 2)

 Et la version studio, la première…

 Merci à Yves Duteil et Jacques Prévert pour “La langue de chez nous” et “Cri du coeur” et Georges Moustaki, “Et pourtant dans le monde”

 

ABITIBI-TEMISCAMINGUE/MATHIEU JOANISSE : D’OTTAWA A ROUYN-NORANDA

C’est confirmé. Mathieu Joanisse quitte l’Ontario pour l’Abitibi-Témiscamingue ! Oui, après la tenue du plus grand et plus important Gala des prix Trille Or à Ottawa, Ontario, l’Association des professionnels de la chanson et de la musique a annoncé le départ de son directeur des événements artistiques. Rencontre avec ce professionnel de 35 ans prêt à relever de nouveaux défis en qualité de directeur général du Festival de Musique Émergente (FME) à Rouyn-Noranda, en Abitibi-Témiscamingue.

C’est après avoir durant 5 ans assuré la réalisation des événements majeurs de la francophonie tels le Festival “Quand ça nous chante” (six éditions), Ontario POP (cinq éditions) et le Gala des prix Trille Or (trois éditions) que Mathieu retourne finalement à ses “premiers amours” !

En l’occurrence “l’heureux mariage de la musique émergente et la diffusion” selon Natalie Bernardin, directrice générale de l’APCM. “Nous sommes heureux d’avoir pu être un tremplin et une structure apportant de l’expérience pour nos artisans de l’industrie leur permettant de voler vers de nouveaux défis”.

Comme il l’explique avec conviction, c’est un vrai rêve qui se réalise pour Mathieu fortement influencé par ce festival de grande envergure : “Le FME a toujours été une inspiration pour moi et a fortement contribué à mon évolution en tant que directeur des événements artistiques au courant de mes cinq dernières années au sein de l’APCM.

J’ai participé aux 5 dernières éditions du FME. Je suis fier et surtout honoré de faire maintenant partie de cette équipe dynamique et pouvoir ainsi redonner au FME de mon expérience acquise depuis 10 ans dans le milieu de la scène culturelle canadienne”.

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Mathieu Joanisse en compagnie d’un des pionniers de la chanson franco-ontarienne, Robert Paquette

“En chef de fil de l’industrie musicale, Mathieu apportera son positivisme, son expertise et sa main de maître à son nouveau poste”

Nul doute que Mathieu Joanisse apportera son expertise à un festival qui ne cesse de grandir et qui connaît d’année en année “un succès resplendissant”.

Avant d’arriver à l’APCM, Mathieu œuvrait au sein du Centre culturel Frontenac. Selon l’APCM, “il a su laisser son emprunt sur non seulement la communauté de Kingston mais la communauté franco-ontarienne entière par son leadership et son implication au sein de Réseau Ontario. En chef de fil de l’industrie musicale, Mathieu apportera son positivisme, son expertise et sa main de maître à son nouveau poste.

Pas surprenant donc que Natalie Bernardin affirme que « l’APCM sera désormais changée pour le meilleur après le passage de Mathieu au sein de l’équipe. Sa vision artistique et sa passion ont su rehausser les activités artistiques de l’association.

Sa personnalité et son dévouement laisseront un vide au sein de l’équipe et au sein de la communauté. L’équipe de l’APCM, son conseil d’administration et tous ses artistes membres souhaitent beaucoup de succès à Mathieu dans ses nouvelles fonctions. Mathieu quitte l’APCM la tête haute avec une grande fierté des accomplissements réalisés et passe le flambeau pour la continuité de l’évolution de la scène franco-canadienne”.

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Samedi 23 mars, Auditorium Fraser, Université Laurentienne. Final de la 40ème Nuit sur l’Etang avec l’ensemble des artistes de la soirée

“Est-ce que les coupures, les abolitions de programmes et le contexte d’austérité économico-culturel diminuent notre soif pour l’art ? Non”

Directeur général des événements artistiques au sein de l’APCM, Mathieu Joanisse s’est exprimé sur la signification des Prix Trille Or, et plus globalement sur la chanson franco-ontarienne, dans un texte paru dans le programme de cette manifestation.

Ce texte cosigné avec Caroline Yergeau, la metteure en scène du 7ème Gala, en dit long sur les talents fleurissant en Ontario, et les défis auxquels ils sont confrontés. Avec pour commencer cette rafale de questions : “Est-ce que les coupures, les abolitions de programmes et le contexte d’austérité économico-culturel diminuent notre soif pour l’art ? Non. Est-ce que ca diminue notre enthousiasme créatif ? Encore moins”.

Selon Mathieu Joanisse et Caroline Yergeau, “le Gala des Prix Trille Or, c’est l’une des plus belles occasions de partage : partage entre l’Ontario et l’Ouest francophone, partage entre les artistes et leur public, partage d’une grande passion, partage d’une même scène par des talents musicaux…

Du talent, il y en a. de nouveaux noms émergent sur la scène musicale francophone et cheminent tranquillement. Les noms que l’on aime déjà continuent à offrir des albums et des spectacles de plus en plus riches et à rayonner ici et ailleurs. Nos artistes créent, se renouvellent et voyagent. Ils s’investissent afin que leurs œuvres, empreintes de toute leur unicité, deviennent des représentantes de notre culture.

Et c’est à nous de souligner aujourd’hui, de leur montrer notre appréciation et de souligner la place de choix qu’ils occupent dans nos vies.  Célébrons l’excellence de ceux qui accompagnent musicalement, en français, nos joies, nos peines, nos expériences extrêmes et notre petit train-train quotidien”.

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Un outil de travail indispensable pour tout passionné de chanson francophone d’Amérique du Nord : réalisé par Mathieu Joanisse avec un assemblage numérique signé Denis Paquette, cette compilation met en évidence 19 chansons figurant autant d’albums enregistrés par des  artistes, duos ou groupes francophones hors Québec.

“APCM et Réseau Ontario : des structures indispensables”

Réalisé dans la foulée du fameux Gala des prix Trille Or à Ottawa et de la 40ème Nuit sur l’Etang avec un concert de 4h30 à Sudbury, notre conversation avec Mathieu a évidemment débuté sur le bilan de ces deux événements majeurs pour la communauté franco-ontarienne.

Certes, il y a la satisfaction d’avoir revu et applaudi des artistes bénéficiant d’une incroyable carrière depuis plus de 40 ans : Marcel Aymar, François Lemieux, Robert Paquette, Paul Demers, etc.

Pour Mathieu s’y ajoute aussi l’impact d’une formation telle que Cano dont la reformation, voici trois ans, lors des 20 ans de l’APCM, à l’occasion d’ “une année complète d’anniversaire marquée par de nombreux événements musicaux”. Avec entre autres la satisfaction de voir comment “la nouvelle génération franco-ontarienne tripait sur les chansons de ce groupe mythique, notamment sur des titres de neuf minutes plutôt rares sur les ondes radiophoniques” !

Pour Mathieu, l’évocation de la 40ème Nuit sur l’Etang, c’est comme si on tournait les pages d’un album photos qui comprend encore nombre d’espaces vierges à remplir avec plein de pages qui restent encore à écrire ! Evidemment, la chanson franco-ontarienne est différente de la chanson québécoise : une question de langue, de méthode d’écriture, de références à la vie quotidienne, etc.

“Ici on n’a pas le stress de l’industrie musicale. Nous avons des projets neufs, des projets qui viennent du cœur. Le jeune artiste ou le nouveau groupe savent que ce ne sera pas évident. Nous ne sommes pas à Montréal, avec un milieu artistique bien organisé qui n’existe pas ici. A ce jour en Ontario il y a encore peu de professionnels, comme Michel Benac avec LaFab”.

Et d’insister aussitôt sur le rôle de structures telles que l’APCM et Réseau Ontario : des repères incontournables pour ce militant d’une chanson française quo bénéficie désormais d’une réelle variété d’expression : “On a tant de diversité, tellement de produits à faire connaître avec les moyens qu’on a ! Nous avons aussi des ambitions pancanadiennes pour montrer ailleurs ce qui se fait en Ontario”.

Mathieu se lance alors dans une énumération de talents tels que les groupes Pandaléon et Mastik, la chanteuse Marie-Claire (“Super rafraîchissante”) et les Hula-Hoops, etc.

PF BOREAL MASTIK

Le groupe Mastik face au public, lors de la Nuit Emergente au Collège Boréal, Sudbury

“Nos groupes ont réussi à faire leur rock à eux”

“Les artistes prennent enfin leur place ici sans gêne comme on l’a vu avec AkoufèN à L’Autre Gala de l’APCM : il n’y a pas vraiment ce style de musique avant dans l’Ontario français. Oui, il y a de l’influence des bands de Montréal, mais nos groupes ont réussi à faire leur rock à eux avec une saveur métal comme AkoufèN par exemple. Les jeunes du secondaire reprennent des chansons de ces groupes ! Ca fait plaisir à voir et à entendre !”

Mathieu insiste aussi sur le travail d’artistes sans doute moins connus mais tout aussi importants … comme l’auront confirmé à de multiples reprises aussi bien les deux galas de l’APCM que la 40ème Nuit sur l’Etang. Et de parler entre autres du pianiste Nic Carey, directeur musical des deux galas. Avec lui pas de reprise de standards mais «”des créations, des duos, des surprises musicales” : un créateur efficacement entouré par des pointures nommées Kevin Daoust (guitare), Shawn Sayniuk (batterie), Marc-André Drouin) et des musiciens invités comme Bobby Lalonde et François Gravel … et aussi du trio a capella de la Nuit sur l’Etang : Leila Reguigui, Darquise Poulin et Chelsea Rooney.

Se glissent aussi dans notre conversation l’évocation du travail mené à bien par l’orchestre ayant accompagné les artistes sur la scène de l’Auditorium Fraser de l’Université Laurentienne à Sudbury : une formation composée de Daniel Bédard, Guy Coutu, Cory Lalonde, Dayv Poulin, et Don Reed.

Autant de noms qui représentent pour Mathieu Joanisse une des clés de l’impact de ces événements d’Ottawa et Sudbury. Avec un constat qui en dit long sur la manière de créer des artistes franco-ontariens : ici pas de musique sous cloche, pas de ghetto mais une façon de composer en lien direct avec d’autres influences musicales, comme le confirment par exemple les parcours de Tricia Foster ou Mehdi Hamdad. Des artistes à la fois audacieux musicalement et extravertis dans leurs relations humaines. “Ils vont devenir des références pour les nouveaux groupes, pour les nouveaux artistes, c’est sûr”.

PF BOREAL MEDHI OURS

Vendredi 22 mars, Collège Boréal, Sudbury; Mehdi Hamdad quelques minutes avant de monter sur scène pour la Nuit Emergente. 

L’importance pour la chanson franco-ontarienne d’avoir des têtes d’affiches dont la notoriété dépasse le cadre provincial

Alors qu’en est-il de l’importance pour la chanson franco-ontarienne d’avoir des têtes d’affiches dont la notoriété dépasse le cadre provincial ?

C’est évidemment indispensable selon Mathieu qui cite entre autres le parcours d’Andrea Lindsay assuré tant en solo qu’en compagnie de l’auteur-compositeur-interprète québécois Luc De Larochellière, ou encore Damien Robitaille. Lequel, après avoir participé à L’Autre Gala de l’APCM eu au Cercle des auteurs-compositeurs SOCAN à Ottawa remplissait quelques jours plus tard le Métropolis à Montréal (nous y reviendrons dans un autre article).

Mais, comme le reconnaît volontiers Mathieu, l’impact populaire de ces artistes connus hors de l’Ontario ne doit surtout pas faire oublier les autres talents. Eux aussi, entament – doucement mais sûrement – un parcours qui devrait les fait connaître hors de leur terre d’origine : “Tricia Foster, Konflit, Mehdi Cayenne Club, Pandaléon, Mastik et d’autres encore“.

En somme des parcours synonymes d’obstination, d’albums auto-produits, de recherches de bailleurs de fond, de débouchés commerciaux pour vendre les CD, de concerts à trouver, etc. “Il y a des shows un peu partout en Ontario. C’est le fun, on assume la musique franco, on n’en parle pas, on en joue tout simplement”.

Et si les artistes et groupes remportent un succès croissant en Ontario, la question de la gestion de la carrière fait partie de ces défis dont on parle peu en public. Et pourtant il s’agit de priorités selon Mathieu, qui a souvent donné des cours de gérance d’artiste en Ontario. Avec à la clé “des exemples concrets, des anecdotes précises, des histoires à ne pas faire. Et pour un groupe c’est encore plus compliqué quand il faut prendre des décisions, trouver de nouvelles orientations à accepter ensemble. Pas toujours facile de mettre en pratique la théorie… En plus en Ontario rares sont les artistes qui font ce métier à temps plein ! Il leur faut trouver un job … sauf quelques rares exceptions comme Damien Robitaille”.

PF ROBITAILLE FOULE DEBOUT

Montréal, Métropolis, 4 avril. Plus d’un millier de spectateurs enthousiastes pour Damien Robitaille accompagné par sept musiciens et Carolina, sa choriste et compagne colombienne

Un millier de vinyles et sept tables tournantes

Au fil de notre entretien, Mathieu Joanisse apparaît comme un professionnel totalement tourné vers la mise en valeur des talents individuels et collectifs… et en même temps cela ne l’empêche pas de cultiver se propres passions.

A commencer par celle du vinyle et aussi des tables tournantes à laquelle n’est pas étrangère Eric Auclair rencontré “voici six ou sept ans”. Aujourd’hui, avec un bon millier de vinyles et sept tables tournantes, Mathieu cultive une passion qu’il ne garde pas pour lui. Et pour cause puisqu’il devient, au gré des événements, un des deux Dj masqués qui font danser jusqu’au bout de la nuit tant de monde. Cette complicité partagée avec Christian Pelletier, elle éclate dans les soirées dansantes animée par le duo des DJ masqués !

“Le fun des soirées c’est qu’il n’y ait pas de demande spéciales et que gens dansent comme des fous sur ce qu’on leur passe ! On peut très bien s’amuser en dansant sur de la chanson et de la musique française et francophone … entre funk, yéyé, electro, rock et j’en passe ! La musique est bonne partout … mais on est capable de s’amuser en français … on aime ça … et on fait même danser des gens qui ne comprennent pas le français !”.

 

PF BOREAL DJ MASQUES

Mathieu Joanisse et Christian Pelletier, alias les DJ Masqués

De Led Zeppelin à André Gagnon via Chopin et Beethoven

Le temps est bien révolu où le jeune Mathieu tripait – “en fin de primaire et début de secondaire” – sur les musiques des années 70 signées Led Zeppelin, Pink Floyd, Janis Joplin, etc. Et à cette époque, comme il le dit si bien, “c’était moins le fun en français. Mes parents écoutaient juste de la variété française comme Michel Sardou. Et j’étais alors rebelle”.

Arrivé en secondaire 3, un sacré virage s’opère dans la vie de Mathieu. Place au classique, au piano ! Le voici qui compose, qui a le projet d’enregistrer aussi. “J’ai étudié l’opéra, j’ai été beaucoup touché par le grégorien. André Gagnon, je ne peux pas défendre tous les albums… mais je l’adore”.

Et d’évoquer son admiration envers la complicité musicale développée entre André Gagnon et Claude Leveillée mais aussi les œuvres de Chopin et Beethoven, autres compositeurs importants pour ce pianiste désormais tout aussi sensible aux “pianistes avec une touche, un support électro aujourd’hui”.

PF BOREAL MARIE CLAIRE

Marie-Claire Claire Cronier, une des voix majeures de la relève de la chanson franco-ontarienne évoquée par Mathieu Joanisse

 Après l’Ecole du Show-Busines, sur les routes avec Transakadie

Au terme d’études à l’Ecole du show business à Montréal – une période synonyme de tant d’échanges musicaux, de rencontres amicales et nouvelles découvertes artistiques – Mathieu Joanisse s’est lancé à 22 ans dans une aventure qui lui aura beaucoup appris. Une expérience qui lui aura bien ouvert les yeux sur la vraie vie d’artiste.

Il décroche un contrat de directeur de tournée pancanadienne dans la série “Rendez-vous de la francophonie” en se déplaçant de l’Ouest jusqu’au Nouveau-Brunswick le groupe Transakadie.

“J’ai dirigé la tournée, et monter en une semaine un cahier de tournée. Il n’y avait alors pas encore d’iphone. Ca a été une expérience formidable et tant de souvenirs ! Quand tu arrives à Régina, en Saskatchewan, et que 150 Francos dansent toute la soirée ça laisse des souvenirs : Surtout si la moitié ne connaissent pas le groupe … ca donne un coup dans la face … on ne nous avait pas tout expliqué à l’école ! Là j’ai vraiment mieux compris comment fonctionne le marché québécois mais aussi le marché d’ailleurs !”.

11ème Festival de musique émergente du 29 août au 1er septembre en Abitibi-Témiscamingue.

En attendant de vivre trois de ses rêves – voir sur scène les groupes Muse, Matmos, et Gros Méné – Mathieu est sur le point de franchir une nouvelle étape dans sa vie personnelle et professionnelle. Il va quitter l’Ontario pour une autre province du Canada et prendre début mai la direction du FME : le Festival de musique émergente organisé du 29 août au 1er septembre en Abitibi-Témiscamingue.

Composer des mélodies pour des artistes ? A ce jour le pianiste Mathieu Joanisse n’a pas encore franchi ce cap. «”Le timing sera la clé, j’y avais déjà pensé !”. Et on le croit bien volontiers quand on songe aux nouvelles responsabilités qui l’attendent du côté de Rouyn-Noranda, en Abitibi-Témiscamingue.

PF MATHIEU JOANISSEMathieu Joanisse, nouveau directeur général du Festival de Musique Émergente (FME) à Rouyn-Noranda, en Abitibi-Témiscamingue (Photo APCM)

ONTARIO/ CHANSON FRANCOPHONE : INNOVER, RESISTER, CELEBRER

Folk, hip-hop, rap, jazz, blues, rock, métal, pop, traditionnel, instrumental, alternatif, chanson, instrumental, etc. Si vous réduisez l’expression musicale franco-ontarienne à une seule facette, vous serez (agréablement) surpris par la diversité qui s’affiche avec de plus en plus d’audace dans cette province du Canada.

Cette étonnante diversité s’enraciné dans la création des pionniers historiques mis à l’honneur lors d’un concert de près de 4 heures et demie, samedi 23 mars, à l’occasion de la 40ème Nuit sur l’Etang organisé à l’Auditorium Fraser de l’Université Laurentienne à Sudbury : Robert Paquette, Marcel Aymar, François Lemieux, Jean-Marc Dalpé, Paul Demers, Jean-Marc Lalonde, Yves Doyon, etc.

PF OTTAWA PLACE FRANCOPHONIE

Ottawa, place de la Francophonie, à deux pas des locaux de l’APCM, l’association des professionnels de la chanson et de la musique

Le symbole d’une dynamique génération de créateurs émergents ou confirmés

Nous reviendrons dans un autre article avec force photos sur cette inoubliable soirée de 4 heures et demie à laquelle un public de tous âges a répondu présent : un auditoire fier de proclamer son identité franco-ontarienne; applaudissant à tout rompre ceux qui ont osé s’aventurer sur des voies artistiques différentes de celles de la chanson québécoise. Et cela même si nombre de passerelles artistiques existent évidemment entre l’Ontario et le Québec, comme l’aura rappelé l’animateur Eric Robitaille, chaleureux militant d’une francophonie nourrie de ses jeunes années au Québec et désormais enracinée à la cause franco-ontarienne.

Mais avant de nous attarder sur cet événement historique au sens  fort du terme – tant cette soirée aura été synonyme  de “véritable audio-encyclopédie vivante de la chanson franco-ontarienne – arrêtons-un à présent sur cette fameuse relève qui éclabousse avec brio les genres musicaux en Ontario : le symbole d’une dynamique  génération de créateurs émergents ou confirmés qui ne demandent qu’à affirmer, aussi bien face à des publics franco-ontariens qu’au-delà de la province natale.

D’où l’intérêt d’événements tels que le Gala des Prix Trille Or et l’Autre Gala organisés les 20 et 21 mars 2013 au Centre des Arts Shenkman, à Orléans, localité située non loin d’Ottawa : des événements mis en relief dans d’autres articles de ce site.

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Près du Centre nationale des arts, clin d’oeil au pianiste de jazz Oscar Peterson né à Montréal et décédé  à Mississauga , Ontario.

D’autres coups de projecteurs ont été donnés au cours de ces journées artistiques en faveur d’une chanson franco-ontarienne des plus efficaces, dans des registres qui dépassent bien souvent le contexte identitaire pour célébrer sans hésitation des thèmes plus généraux, plus universels.

Ce constat, il aura éclaté avec vigueur au cours des vitrines musicales d’artistes membres de l’APCM, l’Association des professionnels de la chanson et de la musique : une initiative bénéficiant de l’appui financier de Musication et du programme vitrines musicales.

“Des nouveaux projets musicaux qui n’ont pas encore été vus en vitrine à Contact Ontarois mais qui pourraient être en vitrines aux événements contacts de 2013-2014″ selon la directrice de l’APCM, Nathalie Bernardin. Place en l’occurrence à une artiste du Saskatchewan (Alexis Normand) et trois de l’Ontario (YAO ; Louis-Philippe Robillard et Konflit).

Ces quatre vitrines ont confirmé de surprenantes sources d’inspiration tant sur le fond que la forme chez les artistes et groupes qui se sont produits au Centre National des Arts, un des haut-lieux de l’expression artistique et culturelle d’Ottawa. Une bâtisse impressionnante tant par sa programmation que la multiplicité de ses équipements avec, en guise de clin d’œil aux promeneurs, une statue d’Oscar Peterson située à quelques pas de l’entrée principale de l’édifice, à quelques enjambées du Parlement du Canada.

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Ottawa, le Centre national des arts avec annonce d’un concert de la chanteuse québécoise Ariane Moffatt

Sans nous embarquer dans de longues considérations sur le répertoire des quatre vitrines, quelques précisions s’imposent sur l’esprit dans lequel se sont déroulées ces vitrines.

INNOVER, RESISTER, CELEBRER sont sans doute les termes qui définissent le mieux ces quatre talents : en l’occurrence innover dans de nouvelles voies artistiques ; résister à l’environnement anglophone omniprésent mais aussi célébrer une identité francophone sans se replier dans un ghetto culturel.

Alexis Normand : attachante nouvelle voix du Saskatchewan

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Un premier album de dix titres à découvrir, reflet d’une nouvelle voix francophone du Saskatchewan

Entre innovation, résistance et célébration : c’est ainsi que s’affirme la jeune Alexis Normand, auteure-compositrice-interprète originaire du Saskatchewan. Elle s’aventure dans un registre francophone tout en nuances, à l’instar de Mirador, album de dix titres lancé en début d’année.

Cet opus représente en fait une des facettes d’une efficace collaboration menée à bien avec Fortier, une artiste visuelle fransaskoise : une complicité également déclinée en une série de tableaux et un spectacle. D’où cet album intéressant à plus d’un titre. Ici pas d’effets spéciaux ou spectaculaires pour retenir l’attention de l’auditeur, mais une ambiance toute en nuances dès la première chanson “Quand il pleut”.

“Un folk chaleureux et atmosphérique dans lequel un groove entraînant et une voix suave s’installent. Sa poésie simple et sincère, empreinte d’émotions discrètes nous révèle une sensibilité touchante” …  Au-delà de cette auto-présentation, une évidence s’impose : sous une apparente timidité, cette jeune artiste s’affirme avec brio dès que l’occasion se présente, face à un public qui ne demande qu’à se laisser séduire par l’ambiance jazz-folk distillée par cette artiste attachante et déterminée sous ses airs réservées. Une détermination que le public aura pu apprécier au cours de sa vitrine musicale.

YAO : le poids des mots, le métissage des rythmes

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Yao, cousin d’Abd-al-Malik : un album en vue pour l’automne 2013

Autre registre avec l’extraverti YAO. Sans se lancer dans des comparaisons teintées de flagornerie, il suffit de fermer les yeux pour marcher – avec assurance – sur les traces d’un certain Abd-al-Malik au niveau du phrasé, de l’intonation, de certains thèmes aussi.

S’y affirme entre autres références le parti-pris d’un “message positif” synonyme de respect réciproque, de tolérance mutuelle, de besoin et d’envie de mieux comprendre l’autre, surtout s’il est différent. Un message dont l’impact sans assurément amplifié de par la complicité entre le chanteur et ses musiciens qui offrent une couleur tout à fait particulière aux textes : Olivier Philippe-Auguste (violon), Manon Gaudreau-Fess (flûte traversière), Ammayas Khidas (djembe, derbouka) et Peterson Altimo (guitare acoustique, basse).

Pas étonnant donc que Yao évolue avec aisance dans une poésie aux accents slam, avec ici et là des escapades du côté du blues et du jazz. Ses textes ont des allures d’instantanés de la vie ie telle qu’elle est, sans angélisme ni misérabilisme, où rien n’est impossible … mais où le soleil l’emporte sur les zones d’ombre. Autant de repères qui devraient être mis en évidence d’ici l’automne 2013 avec un deuxième album réalisé sous la houlette du producteur canadien Sonny Black.

Louis-Philippe Robillard : une voix, une guitare et de l’émotion

PF VIT CERCLE ROBILLARD

Un des artistes majeurs de la relève franco-ontarienne

Troisième vitrine musicale au Centre national des arts avec Louis-Philippe Robillard, autre artiste majeur de la nouvelle génération franco-ontarienne.

Ses  chansons à fleur de peau distillent une émotion perceptible avec cette volonté de retenir l’attention de l’auditoire avec juste une guitare et une voix. Un sacré défi aux accents minimalistes, surtout lorsqu’on chante juste après Yao et ses talentueux complices !

Dans la foulée de son fameux opus “Le café des oiseaux”, cet artiste se sera, une fois de plus, envolé dans un univers tantôt réaliste, tantôt onirique, où la forme est peut-être aussi importante que le fond. Un peu à l’image du Québécois Alexandre Desilets dont la voix devient instrument de musique.

L’ambiance distillée par ses chansons semble ici toute aussi importante que ses thèmes. Pourtant, au cours de cette vitrine assurée en solo par Louis-Philippe Robillard, le public est sans doute resté sur sa faim : précisément à cause des conditions minimales dans lesquelles l’artiste s’est produit avec conviction. Difficile de recréer tout seul sur scène l’atmosphère tant appréciée par le public découvrant son premier album : un opus récompensé par de nombreux prix de l’industrie musicale tant en Ontario qu’au Québec, avec ( conséquence logique – nombre de commentaires élogieux dans la presse francophone d’Amérique du Nord.

KONFLIT : efficaces pionniers aux accents rock

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Sacrée complicité scénique entre les membres de Konflit

Dernière vitrine proposée au Centre national des Arts avec l’énergique groupe franco-ontarien Konflit. Une formation résolument située à des années-lumière des chansons de Louis-Philippe Robillard.

Place donc à un groupe formé de sacrés musiciens. Pionnier est assurément le terme qui définit le mieux cette fougueuse formation qui a marqué une génération de jeunes (et pourquoi pas moins jeunes aussi !) Franco-ontariens en quête de sons qui bougent. De refrains percutants et de rythmes qui vous donnent des fourmis dans les jambes.

Et quand on apprend qu’il s’agit d’un des uniques groupes francophones de l’Ontario dont les clips sont diffusés sur la station québécoise MusiquePlus, on peut se dire – sans hésitation – que ces talentueux fous de rock représentent une des composantes incontournables de la nouvelle vie musicale de cette province du Canada.

Difficile d’évoquer Konflit sans insister sur l’évidente complicité entre les musiciens/chanteurs très à l’aise sur scène, emportés avec enthousiasme par l’évident plaisir à jouer. A se faire plaisir aussi avec sans doute le regret – fort compréhensible par ailleurs – que le temps était décidément trop compté pour donner totalement libre cours à leurs capacités scéniques au cours de cette vitrine musicale.

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Quatre talents si différents pour le premier Cercle de la SOCAN en Ontario

1er Cercle de la SOCAN pour le 15eme anniversaire de Réseau Ontario

Reste au final le souvenir d’une série de vitrines musicales aux accents les plus diversifiés, à tous les sens du terme. Avec en guise de “dessert”, une soirée qui devrait laisser un sacré souvenir à celles et ceux qui ont eu la chance de la vivre ! . Et pour cause puisqu’il s’agissait d’un Cercle d’auteurs-compositeurs SOCAN : une grande première en terre francophone en Ontario !

Cet événement était présenté dans le cadre de son 15ème anniversaire par Réseau Ontario dirigé par Josée Vaillancourt en collaboration avec l’APCM, la SOCAN et le Centre national des Arts.

Au fait pourquoi un Cercle d’auteurs-compositeurs SOCAN ? Selon Réseau Ontario, “cette soirée a pour objectif de créer un moment de rencontres et d’échanges uniques entre les artistes qui, à tour de rôle, présenteront quelques compositions de leur cru. Ensemble ils échangeront sur leurs compositions et sur l’instant du moment, ils y contribueront artistiquement en joignant à l’interprétation des chansons.  Une soirée inusitée lors de laquelle le public assistera à un moment unique en étant témoin de la chimie qui unira les artistes sur scène”.

Derrière cette présentation que les esprits grincheux qualifieront d’idyllique, il est tout à fait évident que ce premier cercle d’auteurs-compositeurs SOCAN aura marqué le public à la fois silencieux durant les chansons et prises de paroles, et en même temps enthousiaste avec force applaudissements.

Ici par d’artiste tirant la couverture à lui mais une réelle complicité entre les quatre créateurs aux parcours pourtant si différents : Damien Robitaille, le Paysagiste (Davy Poulin), Yves Doyon, et Le R (pseudo d’un artiste né au Bénin, en Afrique de l’Ouest et désormais établi en Ontario.

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Geneviève Toupin, Damien Robitaille, Yves Doyon, Le R et le Paysagiste (Davy Poulin)

Une animation signée Geneviève Toupin, Franco-Manitobaine

Il faut reconnaître que le bon sen pragmatique et la faculté d’adaptation de l’animatrice Geneviève Toupin auront  été des atouts majeurs dans la préparation et le bon déroulement de cette rencontre à quatre talents. Oi plutôt à cinq puisque la Franco-Manitobaine s’est transformée en pianiste au gré des chansons. De quoi surprendre agréablement le public, en attendant la sortie de son nouvel album francophone pour 2014.

Certes – et cela est tout à fait normal – le site de la SOCAN propose de cette soirée un compte-rendu des plus élogieux : “Une grande complicité régnait entre les auteurs-compositeurs-interprètes qui ont chacun interprété trois de leurs compositions, accompagnant aussi les autres avec un instrument ou en chantant. L’ambiance était décontractée et l’accent mis sur la création et l’origine des chansons. Le public a même eu droit à des primeurs. Ce premier Cercle organisé en Ontario fut donc un franc succès”.

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Damien Robitaille et Yves Doyon, aussi décontractés sur scène que dans la vie

Le contenu de ce texte  de la SOCAN correspond vraiment à ce qui s’est passé ce soir là dans cet événement saluant le 15ème anniversaire de Réseau Ontario. Cette évidence, elle repose aussi bien sur les réactions de l’assistance que celles des cinq artistes.

Assurément une grande première qui ne demande qu’à être renouvelée au gré d’autres rendez-vous artistiques en Ontario : histoire de mettre en valeur d’autres talents. Non pas pour les confronter entre eux, mais pour susciter des passerelles musicales, voire de vraies complicités amicales entre des créateurs qui n’auraient peut-être jamais eu la (bonne) idée de se retrouver ensemble pour vivre des moments privilégiés en paroles et en musique.

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Les membres de la SOCAN ayant participé au premier Cercle des auteurs produit en Ontario. De gauche à droite Yves Doyon, Geneviève Toupin, Damien Robitaille, Le Paysagiste (alias Dayv Poulin) et Le R. (Photo Réseau Ontario)

FRANCE/ SNA : NANTES A L’HEURE ACADIENNE

Mars 2013 est sans aucun doute synonyme de nouvel élan pour les relations France-Acadie. En effet, les représentants de la Société Nationale de l’Acadie (SNA) sont rentrés en Acadie satisfaits et motivés des nombreux évènements et rencontres tenus lors de leur récente mission en France qui marquait le 45e anniversaire des relations entre la France et l’Acadie. Explications.

Les 21 et 22 mars derniers, une importante délégation acadienne, composée d’intervenants des secteurs de l’éducation post-secondaire, de l’économie, du développement culturel et du tourisme, a participé aux Rencontres France-Acadie à Nantes, un événement officiel pré-Congrès mondial acadien, dans le but d’échanger et de développer des partenariats avec leurs homologues français.

“Mission doublement accomplie” selon René Légère, président de la SNA

Le travail effectué au cours de ces rencontres a donné un nouvel élan aux relations France-Acadie en permettant aux nombreux acteurs de discuter de divers nouveaux projets de collaboration.

Une des grandes forces de cette première édition des Rencontres France-Acadie a très certainement été la diversité et la qualité des intervenants, un fait qui a été souligné autant par les délégués Français qu’Acadiens.

“Nous voulions que les Rencontres France-Acadie partent du bon pied, qu’elles soient l’occasion de rencontres et d’échanges significatifs. Mission accomplie ! Et je dirais même, mission doublement accomplie” a lancé le président de la SNA, René Légère, lors des cérémonies de clôture de l’événement à la Cité des congrès de Nantes.

Abdou Diouf a annoncé sa présence au Congrès mondial acadien de 2014

Lors des l’évènement, le Secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie, M. Abdou Diouf à profité pour annoncer sa présence au prochain Congrès mondial acadien (CMA) en 2014 en plus de partager son admiration pour le peuple acadien.

“Je suis tout aussi heureux de retrouver, à Nantes, l’âme de l’Acadie qui a su conjuguer, au passé et au présent, le droit à la différence dans la tolérance, qui a toujours fait rimer résistance et persévérance, identité et universalité, dynamisme et modernisme” a souligné M. Abdou Diouf, Secrétaire général de la Francophonie.

Par la suite, les dirigeants de la SNA et du Congrès mondial acadien 2014 (CMA 2014) ont profité de leur passage en France pour se rendre à Paris afin d’y tenir nombreuses rencontres de travail de haut niveau au ministère des Affaires étrangères.

Liens économiques, mobilité des jeunes, développement d’ententes entre institutions post-secondaires et mobilité des artistes acadiens

“Nous avons tenu à Paris pas moins d’une dizaine de rencontres avec des personnes clés au sein du ministère des Affaires étrangères de la France. Notre but était de redonner un nouveau souffle et une nouvelle orientation aux relations entre l’Acadie et la France” a expliqué le président de la SNA.

“Dans ses débuts, l’Acadie était presque uniquement un récepteur de l’aide de la France ; maintenant, nous sommes davantage en mesure d’assurer la réciprocité dans nos relations. À Nantes comme à Paris, l’ensemble des discussions a porté sur l’implantation de mécanismes de partage d’expertise, sur le développement de liens économiques, sur la mobilité des jeunes, sur le développement d’ententes entre institutions post-secondaires et sur la mobilité de nos artistes. Notre plus grand souhait est donc de développer et d’officialiser au cours des prochains mois une nouvelle Entente France-Acadie sur la base de la réciprocité », a affirmé René Légère.

Les discussions de cette mission furent aussi profitables pour les représentants du CMA 2014, qui en ont profité pour discuter de la participation de la France au CMA 2014 par l’entremise d’une journée thématique dédiée à la France et par un pavillon de la France au sein de l’Expo-Monde qui sera installée à Edmundston, au Nouveau-Brunswick.

La SNA assurera désormais un suivi en collaboration avec les nombreux intervenants ayant identifié des partenariats possibles lors de cette mission afin de meubler une nouvelle entente entre la France et l’Acadie.

Les Rencontres France-Acadie ont été organisées grâce à une collaboration entre la Société Nationale de l’Acadie (SNA), le Congrès mondial acadien 2014 (CMA 2014), la Ville de Nantes et la Cité des congrès de Nantes, avec la participation financière de l’Agence de promotion économique du Canada atlantique et des gouvernements du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Écosse.

Il s’agissait du premier évènement officiel pré Congrès mondial acadien 2014. La prochaine édition des Rencontres France-Acadie aura lieu lors du Congrès mondial acadien 2014.

PF NANTES ACADIE

Patrick Rimbert, Maire de Nantes ; Son Excellence, M. Abdou Diouf, Secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie ; Mme. Yamina Benguigui, ministre déléguée à la Francophonie dans le gouvernement Français ; René Légère, président de la SNA ; Ina SY, Secrétaire de la commission Europe – international – interrégional au Conseil Régional. (Photo SNA)

SOURCE SOCIETE NATIONALE DE L’ACADIE

JOHANNE RONDEAU : PERCER LE MUR DU SILENCE

Imaginez visiter un musée ou 95 % des œuvres seraient voilées. Imaginez assister à une pièce de théâtre ou neuf comédiens sur dix ne diraient pas leurs répliques. Comme public, ne pousserions-nous pas les hauts cris?

Imaginez maintenant une culture qui occulte la vaste majorité de ses créateurs.

Nous ne sommes pas des enfants pour qui il faut filtrer les émissions qu’ils regardent, la musique qu’ils écoutent, les images qu’ils visionnent. Pourtant, nous acceptons, sans même nous interroger, qu’une poignée de bien-pensants nous dictent nos options – bien limitées, de surcroît – en matière de culture. Nous leur accordons le pouvoir de nous dire “Vous pouvez entendre ceci” et “Vous ne pouvez pas voir cela”.

Il nous arrive parfois de tomber par hasard sur une artiste, sur un créateur qui tente de s’exprimer, de vivre selon sa nature et de faire son métier malgré tout, en dehors du réseau agréé. Elle nous touche, il nous émerveille, nous en redemandons. Mais entre eux et nous, il y a une muraille, un mur blindé, percé de rares portes dont l’accès est sévèrement gardé et réservé à quelques happy few.

Comme public, nous devons nous demander combien d’artistes semblables demeurent cachés à nos yeux, à nos oreilles, à notre cœur. Combien sont-ils d’occupants de ce no man’s land, de prisonniers de ces limbes dont ils ne sortiront – selon la justification d’usage – que si et quand “il y aura un public pour eux”?

“Ne sanctionnons-nous pas les choix exclusivement mercantiles des gros producteurs qui nous imposent les plus rentables de leurs “petits trésors”?

Comme public, nous devons prendre conscience de notre responsabilité comme bailleurs de fonds. Ne finançons-nous pas directement les médias par notre consommation chez leurs annonceurs? Ne sanctionnons-nous pas les choix exclusivement mercantiles des gros producteurs qui nous imposent les plus rentables de leurs “petits trésors”?

N’avons-nous pas tous cru aux mensongères largesses de Star Academy et, plus récemment, de The Voice?

Nous sommes toutes et tous un peu artistes au fond de l’âme. La plupart d’entre nous ont choisi des existences plus “sécuritaires”, et c’est bien ainsi.

Cependant, nous ne pouvons pas moralement tourner le dos à celles et à ceux qui parfument nos justes existences. Faisons-nous entendre pour que nos artistes le puissent aussi à leur tour.

pf johanne

Johanne RondeauQuébécoise passionnée de chanson francophone
Membre du public

ILE MAURICE / SIVEN CHINIEN : LA MUSIQUE COMME A(R)ME

Une vieille K7 audio retrouvée au fond d’un tiroir. Touche « PLAY ». La voix de Siven Chinien s’élève en un chant révolutionnaire : « Solda Lalit Militan ». Maloya et sonorités indiennes. « Kant mèm kanon pou dansé, kant mèm fizi pou shanté, konbien siklone pou vini, pa lèss nou la tèt alé baissé, solda Lalit militan, sèr nou les reins nou marshé »… Evènement : un double CD du regretté Siven Chinien, « Solda Lalit – Paradi Lanfer », a été réédité fin septembre 2012 à Maurice.

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Siven Chinien et l’un de ses fils. Jaquette de la K7 audio, éditée à La Réunion au début des années 80, par Alain Gili, label « Médiatèk Océan Indien ».

Ile Maurice. Nitin Chinien, animateur radio et chanteur engagé, suit les traces d’un père charismatique. En 2012, à 31 ans, Nitin collectionne les dates anniversaire : 33 ans de séga angazé à Lil Moris, 23 ans de carrière (il démarre à 8 ans) et, surtout, la commémoration de la mort de son père, Siven, il y a 18 ans.

Pour marquer ces rendez-vous avec l’histoire, la sortie d’un double CD de Siven Chinien, « Solda Lalit – Paradi Lanfer », est prévue fin septembre. Un album inédit de Nitin Chinien (Maloya-malogae, Séga AngazE, Dancehall, Reggae n Slam) pour fin octobre. Et en décembre à Maurice : Mega Concert Live « avek tou ban ansyen é nouvo santèr Séga AngazE de Lil Moris é La Réunyon ».

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En restituant le mythique « Solda Lalit Militan » de son regretté père, Nitin Chinien — à qui l’on doit une version très dansante du « Tine Blouz » de Danyèl Waro — ravive, à notre mémoire, les luttes d’une île Maurice qui accède à l’indépendance en 1968. Mais surtout, il remet au goût du jour un texte fondateur de la résistance au cœur de l’océan Indien.

Hymne révolutionnaire

Les « années de braise », décennies 60 et 70. Profondes mutations à Lil Moris : indépendance, violences politiques, grèves, répression, tensions interraciales, chômage… Des étudiants, dont Paul Bérenger, créent le Mouvement Militant Mauricien (MMM), selon les principes d’unité nationale et de justice sociale. Le concept de « mauricianisme » voit le jour. Les militants culturels se mobilisent autour d’un genre inédit : le « Santé angazé » (chanson engagée) et considèrent la musique comme un outil de combat. Solèy Ruz, Grup Kiltirel Morisien, Fangurin, Kler de linn, Fler kanne, Grup Latanier… Les groupes fleurissent dans ce grand mouvement. Siven Chinien est de ceux-là.

Le 1er juin 1994, l’océan Indien perd un de ses grands artistes engagés, auteur-compositeur, chanteur, activiste militant : Siven Chinien, père du mythique « Solda Lalit Militan », hymne révolutionnaire entonné lors des meetings. Son engagement lui vaut 11 mois de prison…

18 ans après sa mort, il nous revient enfin à l’occasion de la sortie de ce double CD attendu par bien des connaisseurs et qui mérite la plus large audience.

Militantisme, solidarité, revendication identitaire, hommage aux anciens… Autant de thèmes déclinés avec force dans les paroles de « Solda Lalit Militan ».

Nathalie Valentine Legros

Article paru sur le site partenaire www.7lameslamer.net/

 

ILE DE LA REUNION : NATHALIE NATIEMBE, CROQUEUSE D’ETOILES

Elle fait partie de ces personnalités qui se méritent. De ces grandes personnes dont l’âme d’enfant se livre, parfois. Elle en confie beaucoup, Nathalie Natiembé, sur son nouvel album, « Bonbon zétwal ». Et sur un bout de galet, dans un jardin de la Possession, elle en livre un peu plus. Rencontre étoilée.

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Nathalie Natiembé, Bonbon Zétwal, Sakifo records, sortie Octobre 2013. En concert au théâtre sous les arbres, au Port, le 10 février (un concert Kabardock).
Photo © Fanny VIDAL.

Lunettes roses et tenue de sport. Un brin d’impatience vite balayé par un grand sourire. Elle t’attend. Pour de vrai. Elle a accepté la rencontre et c’est pas du chiqué. Parce qu’elle fait partie de ces trop rares personnes qui ne s’embarrassent pas de futilités, Nathalie Natiembé. C’est oui ou c’est non. Et là, c’était oui. « J’ai pas beaucoup d’amitiés féminines ». La phrase t’ouvre le cœur. Tu la suivrais loin, sur ce sentier galets, entre les cabris, les sourires et les bonjours aux bougs croisés. « A la Possession, les gens ont du respect pour moi. Les vieux, les jeunes, les SDF. Eux aussi, je vais les embrasser, parce que je sais que j’ai ce côté-là en moi aussi », confie-t-elle. La Possession, c’est son lieu de vie, d’amour, de création, depuis des années. Et c’est dans un jardin, à deux pas de chez elle, qu’elle se pose sur un galet. L’imaginaire déjà aux aguets.

« Tu trouves pas qu’on dirait un dinosaure, là-bas ? ». Il était une fois Nathalie Natiembé. Tu verrais surgir des lutins que tu ne serais pas surprise. Et tu les reçois toutes, les belles ondes de sa forêt enchantée, consciente de vivre un petit moment d’exception. Parce qu’elle est prête à raconter le processus de création. Cette transe des mots qui lui vient, souvent ici, au milieu des arbres. « Quand les mots arrivent dans la tête et que la musique ne s’y installe pas tout de suite, je sais que ça va rester un texte. Et tant que le travail n’est pas fini dans la tête, je ne mets rien sur papier ».

Et la voilà partie à chanter a capella l’émouvant « Bonbon zétwal », titre phare de son prochain album.

« Quand des fois la vie coule en l’eau claire / dans un grand roulement rouler / ou un ciel miel vert./ Quand des fois la vie coule doux amer / Pou un grand mariage sacré / gravé dans un bois de fer / reste clouté dans out vie/ pour cent ans/ la doulèr vide out vie/ pou flotte su d’l’eau ».

Bénie des dieux de la poésie ? Faut croire. Quand une chanson s’impose, elle ne la quitte plus. Le petit vélo pédale à grande vitesse, dans la tête et dans l’âme. Jusqu’à l’accouchement libérateur. « Les enfants savent que dans ses moments-là, il ne faut pas me déranger ». Tellement habitée, en phase créative, qu’elle peut aller marcher, seule, la nuit, dans les rues de la Possession. « Au début Robert (ndlr : son compagnon) ne comprenait pas. Maintenant, il me demande juste d’essayer de ne pas rentrer trop tard ».

L’œil de zénitude au milieu du cyclone punk-rock

Ah, Robert ! son « boug en or », son « tregor ». Il a su la mériter, l’artiste indomptable, la femme insoumise. « Robert, c’est ma muse », sourit-elle. On la sent apaisée, épanouie. En phase avec ses contradictions. Confiante.
Et c’est sûrement à cette confiance, aussi, qu’on doit ce très bel album. Parce que si elle s’est trouvée aussi, musicalement, si elle a posé les armes de la lutte entre le rock, le punk, la pop et son maloya transe des mots — seconde peau, c’est parce qu’elle a trouvé sa famille musicale. « Yann (ndlr : Costa, claviers) me suivait depuis le début. Il sentait qu’il y avait en moi cette artiste rock/punk. Là, il sentait que le moment était venu de jouer avec moi », raconte-t-elle. Autour d’eux, Cyril Fever Faivre à la batterie et Boris Kulenovic à la basse, ont aussi trouvé la clé de Natiembé.

Celle qui ouvre les vannes. Celle qui réveille l’œil de zénitude au milieu du cyclone punk-rock. « Moi je marche à l’affect. Et avec eux, j’ai vraiment trouvé la bonne enveloppe. Avant de monter sur scène, il y a une espèce de zénitude, parce qu’on est en osmose », raconte-t-elle. Un rapport presque intime, affectif, affectueux, que les musiciens ont ressenti, eux aussi. « On a tous mis beaucoup dans ce disque, Yann, Boris et moi. C’est difficile en peu de mots de dire ce qu’elle nous inspire… J’espère que ça s’entend dans le disque, confie Cyril Fever Faivre. En ce qui me concerne, je crois n’avoir jamais aussi bien joué. Il me semble atteindre là quelque chose qui dépasse le simple fait de jouer de la batterie. On s’est tous dépassés pendant l’enregistrement. On voulait bien faire pour porter au mieux, le plus loin possible, les belles chansons de notre Nathalie ».

Et oui, Cyril, il s’entend sur l’album, tout cet amour. Il coule, pétille, chamboule. Elle nous enveloppe, cette world-music planante aux accents 70’s. Elle nous balade, entre rock, reaggae, maloya et couleurs plus jazzy, sur nos chemins intimes à nous : de l’amour passionné irraisonné, au deuil, en passant par les vieux démons assumés.
Et on s’y installe franchement, dans ce débit d’émotions sous licence cœur.

Isabelle Kichenin

Article paru sur le site partenaire www.7lameslamer.net/

 

ACADIE/ CAROLINE SAVOIE : APRES MONCTON, LANCEMENT DU CD A MONTREAL

La chanteuse acadienne de 18 ans, Caroline Savoie, lancera son album jeudi 11 avril 2013, à 17 h, au Divan Orange à  Montréal. Une initiative qui fait suite au lancement du mardi 12 mars à Moncton de cet opus de six chansons en français intitulé “Laisse-moi rêver” : le premier CD du nouveau label de disque acadien “Le Grenier musique”.

Le premier extrait radio “Je pense à toi” est de style folk/pop. “Cette chanson explique à ma façon la souffrance qu’on vit quand on est la personne qui se fait quitter par l’autre à la fin d’une relation” explique la jeune artiste de Dieppe, étudiante en 1ère année à l’Université de Moncton.

C’est à la Salle Empress du Théâtre Capitol de Moncton, que s’est déroulé le lancement du deuxième mini-album de Caroline Savoie. L’artiste y a interprété les six chansons de l’album, accompagnée des musiciens Danny Bourgeois, Christien Belliveau, Robin Anne Ettles, Philippe Desjardins, Roland Bourgeois et André LeBlanc.

Le disque “Laisse-moi rêver” est une production de Caroline Savoie Music Inc., de son père et gérant Rodrigue Savoie. C’est le premier album à paraître sous le label acadien Le Grenier musique, lancé cette semaine par la gérante d’artistes Carol Doucet. L’album a été réalisé par Jesse Mea et l’enregistrement au studio Pumpk’n Patch à Memramcook, au Nouveau-Brunswick, par Danny Bourgeois.

Les six chansons du mini-album sont écrites et composées par Caroline Savoie, avec une collaboration de Rodrigue Savoie (paroles) et Jesse Mea (musique) sur l’une des chansons. Le matriçage est de Jean-Pascal Comeau, le graphisme de Rodrigue Savoie et les photos de l’artiste par Denis Duquette. Des collaborations aux arrangements sont créditées à Jesse Mea, Danny Bourgeois, Philippe Desjardins, André Leblanc et Robin Anne Ettles.

De nombreux musiciens acadiens ont participé à ce CD distribué par Distribution Plages D’où une diversité d’instruments : guitare acoustique (Caroline Savoie, Philippe Desjardins et Christien Belliveau); la guitare électrique (Denis Surette et Christien Belliveau); dobro (Christien Belliveau); ukulélé (Caroline Savoie); basse (Chris Wheaton et Robin Anne Ettles); batterie et percussions (Danny Bourgeois); orgue B3 et piano (Jesse Mea); trompettes (Roland Bourgeois et Sébastien Michaud) et violoncelle (Tim Isaac).

CAROLINE SAVOIE
Caroline Savoie photographiée par Denis Duquette

Caroline Savoie s’est fait connaître grâce à YouTube

Elle n’a peut-être que 18 ans, mais Caroline Savoie a déjà une grande expérience musicale depuis qu’elle a commencé à écrire des chansons et présenter des spectacles en 2009. En plus d’avoir lancé un premier mini-album en anglais il y a deux ans, elle est la grande lauréate de l’Accro de la chanson 2012 organisé par la Fédération des jeunes francophones du Nouveau-Brunswick.

Parmi les nombreux spectacles présentés ces dernières années, notons ceux qui l’ont plus marquée : les boîtes à chanson à l’École Mathieu-Martin, de Dieppe où elle a fait ses études secondaires ; le spectacle télévisé par Radio-Canada le 15 août 2012 à Dieppe ; le spectacle Clair de lune à Memramcook avec Isabelle Bujold et invités ; les ateliers et spectacles des Rencontres qui chantent présentés à Petite-Vallée et Moncton ; le Festival blues Dutch Mason ; et le radiothon L’Arbre de l’espoir de Radio-Canada, entre autres.

Caroline Savoie s’est fait connaître grâce à YouTube. Depuis l’année 2009, elle met régulièrement sur son canal des clips d’elle interprétant ses propres chansons ou des chansons d’artistes qu’elle aime. Un des clips, un “cover” d’une chanson de Michael Jackson, a été vu à ce jour 175 000 fois ! D’autres ont été vus 100 000 fois ! On retrouve en fait sur YouTube une soixantaine de chansons de cette artiste néobrunswickoise qui avait lancé en octobre 2011 un premier mini-album de cinq chansons en anglais intitulé “Just Sayin”.

“Laisse-moi rêver” es et sera en magasin dès le mardi 12 mars. Plus de renseignements sur l’artiste à www.carolinesavoie.com. La production de « Laisse-moi rêver » a été rendue possible grâce à l’aide financière de la Fondation Musicaction, des Caisses populaires acadiennes et du gouvernement du Nouveau-Brunswick.

Un deuxième lancement aura lieu le jeudi 11 avril, à 17 h, au Divan Orange à Montréal, au 4234, boulevard Saint-Laurent.

Source Carol Doucet – www.legreniermusique.com