“Roman historique”, c’est incontestablement l’expression qui définit avec justesse le 1er livre de Jean-Marie Kutner paru aux Editions Sydney Laurent.  Tel est d’ailleurs le choix de l’auteur : s’engouffrer dans la fiction pour mieux décrire la réalité.

D’où ces 372 pages enracinées dans l’Histoire, la grande avec une majuscule et l’autre, la sienne. Celle qui l’a incité à donner vie. Ou plutôt à faire revivre par des personnages synonymes de destins authentiques mais aussi – et surtout – de membres de sa famille d’hier et d’aujourd’hui.

 

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1942-2019 : TOUTE UNE VIE SANS OUBLIER

Bien sûr, au départ, il y a ces phrases qui retiennent l’attention sur la couverture :

1942 – Elle venait d’un pays qui n’était pas le mien
             Elle était juive et je ne l’étais pas

Et on peut alors penser, à juste titre, qu’il s’agit d’un récit qui se déroule uniquement cette année-là et peut-être les suivantes aussi, bon disons jusqu’à la Libération.

Ah oui, je vous préviens sans tarder.

Ce livre peut être dangereux pour votre sommeil. J’en sais quelque chose pour l’avoir lu, dévoré, en trois soirs, jusqu’au cœur de la nuit. L’envie d’en savoir chaque fois un peu plus sur le destin des personnages, aussi bien ceux que l’auteur a inventé que ceux qui sont enracinés avec émotion dans sa vie familiale.

Il faut donc bien préciser que ce livre débute bien en 1942 mais il ne s’achève qu’en 2019. Et c’est sous la forme d’un journal intime rédigé année après année que Jean-Marie Kutner raconte l’enfance, l’adolescence, et la vie d’adulte de celui qui ne pourra jamais oublier Myriam.  

Le 3 juillet 1942, c’est le dernier jour de classe à Paris et aussi le dernier jour de liberté pour Anne Frank à Amsterdam. Et nous sommes alors à trois jours de la rafle du Vél d’Hiv.

Le narrateur, c’est un enfant de 11 ans. Il se lie d’amitié avec Myriam. Elle est juive, porte l’étoile jaune et lui pas. Complicité d’enfants oui, mais dans un environnement qui n’échappe évidemment pas aux deux écoliers parisiens. Et lorsque Myriam doit monter dans la dernière rame du métro, celle réservée aux Juifs, son jeune ami goy l’accompagne.

Amitié ou amour d’enfants ?

“Au moment où je te tendis la main, tu t’es avancée pour me murmurer à l’oreille quelque chose comme “icardilib”, sans doute du yiddish, et tu m’as embrassé sur la joue. Je n’avais pas compris tes mots mais j’étais fou de joie”.

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1982, attentat de la rue des Rosiers à Paris. Un des temps forts du livre de Jean-Marie Kutner

 

“UN PETIT CAILLOU BLANC EN FORME DE CŒUR QUE JE LUI AVAIS OFFERT”

Lorsque la guerre s’achève, l’espoir renait chez l’enfant devenu adolescent.

Dans la fumée des trains qui reviennent de l’enfer, il espère de quai de gare en quai de gare revoir celle qui lui a lancé depuis la fenêtre de son appartement un mouchoir noué .

“J’arrive à la maison et me jette sur mon lit en pleurs. Repensant au caillou, je mets ma main dans ma poche Je défais le nœud. Il était lesté du petit caillou blanc en forme de cœur que je lui avais offert. A l’intérieur, un petit morceau de papier, rapidement, arraché. “NE M’OUBLIE PAS“.

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Joseph Migneret et sa classe des garçons école Hospitalière St Gervais

 

“LES FAITS, LES DATES ET LES LIEUX DONT IL EST FAIT MENTION DANS CE LIVRE SONT RIGOUREUSEMENT EXACTS”

L’enfant devenu adulte ne pourra pas oublier l’écolière, et il lui faudra apprendre à vivre.

A revivre, à apprendre à aimer, à fonder une famille, avoir une fille … qui sera prénommée Myriam.

Jean-Marie Kutner précise : “Ce roman historique pourrait avoir comme sous-titre “Une histoire dans l’Histoire. Il nous permet d’aborder une des pages les plus noires de notre Histoire et d’en comprendre la genèse, les dessous et le déroulement. Il met en évidence la lourde responsabilité du gouvernement de Vichy et de Pierre Laval en particulier. La rafle du Vél d’Hiv’ est la première déportation massive d’enfants. 3500 durent déportés Aucun n’est revenu.  Les faits, les dates et les lieux dont il est fait mention dans ce livre sont rigoureusement exacts”

Tout au long du livre, le lecteur évolue en permanence entre deux mondes : un destin personnel ponctué de tant de rencontres  dont celles si décisive de Lina Morales,  la concierge de l’immeuble où Myriam  vécut avec sa famille.Lina, réfugiée en France à cause de la dictature de Franco en Espagne.

Et bien sûr un autre personnage qui va accompagner le narrateur de son enfance à sa vie d’adulte : Simon, rescapé des camps de la mort. “Simon est un héros fictif de mon roman, mais il est la voix de millions de victimes. La récit de son arrestation, de sa déportation et de sa participation à la capture d’Eichmann s’inspire de témoignages parvenus et des faits qui nous sont connus” souligne l’auteur. 

Ce livre s’enracine dans tant de rencontres, notamment en France et aussi en Allemagne durant le service militaire du narrateur.

Il met aussi en évidence l’Histoire de l’Alsace à travers divers dialogues qui en disent long sur la complexité de son destin. En témoigne entre autres ce constat : “Oradour est un drame pour Schiltigheim, car on trouve des Schillikois dans les deux camps. Comme je vous le disais, il y en eut neuf parmi les victimes, mais il y en eut également parmi les quatorze Alsaciens intégrés à la division Das Reich. C’est un procès difficile car, parmi ces quatorze Alsaciens, deux étaient volontaires et douze étaient des Malgré-Nous”

Et puis il y a l’actualité qui invariablement fait résonance à la vie personnelle : Auschwitz, Oradour-sur-Glane, le procès de Bordeaux, la  traque d’Eichmann, la guerre froide, celle des Six Jours, la chute du mur de Berlin, l’assassinat de Kennedy, la mort de Franco, l’attentat de la rue des Rosiers et bien d’autres événements encore qui ont tous, d’une manière ou d’une autre, des répercussions dans la vie quotidienne du journal intime rédigé, année après année par le narrateur.

Comme en juillet 1951 où il écrit : “Ce soir j’apprends qu’après six ans de détention, Philippe Pétain est mort en captivité à l’ile d’Yeu. Maréchal, te voilà devant Dieu. C’est l’heure de rendre des comptes. Sache que je ne t’ai jamais pardonné”

“Il traverse le XXe siècle, fidèle à sa promesse” souligne l’auteur qui se met dans la peau de cet enfant traumatisé par la disparition de Myriam. Et qui jusqu’à son dernier souffle ne cessera de penser à elle. De la faire revivre à sa manière, tout en vivant intensément sa vie d’adulte familiale et professionnelle.

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“ANNE, ESTER ET MYRIAM SONT TROIS VICTIMES DE LA BARBARIE NAZIE, RÉUNIES POUR TOUJOURS”

 

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Ester Kutner
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Jean Marie Kutner, petit-fils d’Ester Kuttner, fils de David Kutner (=Henri Kutner) ; Lily Kutner, née Assidon, veuve d’Henri Kutner, mère de Jean Marie, Michael Cyter, petit-fils de Pinkus Cyter (Zitter), frère aîné d’Ester Kutner.

En 2006, Jean-Marie Kutner rencontre la Fondation Anne Frank et revient profondément marqué de son voyage à Amsterdam. Anne ne l’a jamais quitté.

En 2011, des habitants de ville natale de son père – Göppingen en Allemagne – l’invitent à la pose d’un pavé mémoriel en souvenir de sa grand-mère, Ester, assassinée par les nazis en 1942. C’est là qu’il découvre son histoire, ses origines.

Les trois photos ci-dessus sont extraites du site STOLPERSTEINE GÖPPINGEN .
A découvrir si vous avez envie d’en savoir plus sur le destin d’Ester Kuttner et de sa famille.

Coupables ou responsables ?

C’est la question lancée par l’auteur en fin d’ouvrage, en présentant plusieurs personnages-clés de la barbarie nazie : Carl Albrecht Oberg; Théodor Dannecker; Josef Mengele ; René Bousquet ; Jean Leguay ; André Tulard et Emile Hennequin. 

“Anne, Ester et Myriam sont trois victimes de la barbarie nazie, réunies pour toujours” explique Jean-Marie Kutner né au Maroc en 1951 et arrive en France en 1957. Un auteur bien connu en Alsace pour des raisons autres que littéraires.

Diplômé de la faculté de pharmacie de Strasbourg, il exerce dans une officine à Schiltigheim, où se déroulent plusieurs chapitres du livre.  Jean-Marie Kutner y est élu en 1995. Il y sera adjoint au maire à l’enfance jeunesse, puis maire de la ville et vice-président de l’Eurométropole de Strasbourg. Et il prendra sa retraite et se retirera la vie politique en 2018.

 

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Laissons le mot de conclusion à Jean-Marie Kutner :

“En écrivant ce livre, j’ai une pensée particulière pour Joseph Migneret, héros et homme de cœur méconnu, pour ma grand-mère, Ester Kutner, assassinée le 27 mars 1942, pour mon père Henri, décédé le 24 novembre 2000 et pour Anne Franck, qui inconsciemment m’a inspiré.”

 Albert WEBER

 SITE DE L’ÉDITEUR

DÉDICACES

19 mars, Librairie Ehrengart route du Polygone

26 mars Librairie Totem, rue Principale à Schiltigheim

14 mai Salon Littéraire de Parentis en Born (Landes)