J’ai passé quarante ans à faire mon métier de musicien, d’auteur, de compositeur, de « faiseur de chansons », d’interprète et d’arrangeur. J’ai enregistré 7 albums. Mon premier disque m’a valu d’être intégré dans Le 9e Art, une encyclopédie sur la chanson française contemporaine, parue à Bruxelles en 1978. Tandis qu’au Québec

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Jean Custeau dans son studio Bleuciel à Stanstead (Photo Albert Weber)

Au Québec, on a pu entendre mes chansons à Radio-Canada, la radio d’État, et dans certaines radios communautaires. Mais à la radio commerciale? J’en doute. Voici comment les radios commerciales font leur choix musical : une seule personne à Montréal décide de ce qui va tourner dans toutes les stations du réseau. Ainsi, tout ce que vous entendez au Québec dans les radios commerciales est choisi par 4 personnes : les directeurs musicaux de Rouge FM, NRJ, Rythme FM et CKOI. Idem pour la télé, idem dans le reste du Canada.

Il est évident que pas un artiste qui s’autoproduit n’est diffusé par ces réseaux : il faut être poussé par une grosse machine qui mettra argent et énergie pour faire « tourner » ses poulains les plus rentables. Or il y a dans toutes les régions des artistes de talent qui génèrent des productions et un contenu artistique de haute qualité.

Pourtant, ils sont confinés le plus souvent à la misère, à une vie sans dignité. Pour quelques-uns, une petite bourse gouvernementale viendra leur donner un mince répit, leur permettant de colmater les brèches financières les plus graves et de pouvoir vivre sans l’aide sociale (aide de dernier recours) pendant quelques mois.

Parlons justement d’argent : d’où vient celui des grands réseaux? Les radios commerciales tirent leurs seuls revenus des annonceurs. Or, au Québec, les entreprises locales contribuent en moyenne pour 68,3 % aux ventes de publicité. Ce sont des entreprises et des commerces d’une région donnée qui font vivre les radios commerciales dans cette même région.

Pourtant, aucun artiste de cette même région ne peut tourner sur leurs ondes. Plus des deux tiers des revenus viennent d’une région donnée, mais elles ne rendent rien à cette région.

On ne peut que conclure que cette situation est totalement immorale et doit cesser au plus vite. Dans un monde juste, les médias commerciaux de masse devraient diffuser une part raisonnable de répertoire régional. Les artistes doivent, par tous les moyens possibles, obtenir un espace légitime minimal de diffusion dans leur propre région pour pouvoir pratiquer leur métier avec un minimum de dignité.

Jean Custeau
Auteur-compositeur-interprète québécois
jeancusteau@hotmail.com

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